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Comment protéger votre partenaire de la faillite?

Vous croyez dur comme fer aux chances de réussite de votre projet. Mais si les choses devaient mal tourner, vous ne voulez pas que votre partenaire en subisse les conséquences. Pour éviter ce risque, il ne suffit pas de choisir la bonne forme de société. Il faut aussi choisir la bonne forme de vie en commun.
©Reinhart Croon

Lorsqu’on crée son affaire, il y a mille choses à faire: demander un prêt à la banque, établir un plan financier, lancer un site internet, trouver des clients et des fournisseurs, dénicher un endroit adapté, créer un nom d’entreprise et un logo, etc. Bref, il faut tout inventer. Et le comptable ou l’expert-comptable que vous engagez va immanquablement aussi vous demander quelle forme de société vous envisagez.

Mais à côté de ces choix techniques, financiers et juridiques, il y a encore un nœud – et non des moindres – que vous devez dénouer si vous avez un partenaire, voire des enfants. "Il est important d’examiner sous quelle forme vous cohabitez et, si vous êtes marié, sous quel régime matrimonial", souligne Peter Meeuwssen, spécialiste en estate planning et associé auprès du cabinet d’avocats Sherpa Law. "C’est une situation qu’on rencontre fréquemment. Un couple est marié sans contrat de mariage. Monsieur crée une société et souscrit toutes les actions à son nom. Si le couple bat de l’aile quelques années plus tard, c’est la douche froide. Car monsieur a cru pendant toutes ces années que la société lui appartenait. Bien sûr, il a tous les droits de vote. Mais en droit patrimonial, la société appartient au patrimoine commun et revient donc pour moitié à la future ex-épouse. En effet, la société a été créée avec de l’argent que le couple a épargné pendant le mariage. En d’autres termes, les actions font partie du patrimoine commun du couple. Et monsieur devra donc indemniser madame de la moitié de la valeur de l’entreprise au moment de la convention de divorce."

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La manière de cohabiter ne fait pas seulement une différence en cas de séparation. Le choix de la cohabitation légale, de la cohabitation de fait ou du mariage, avec ou sans contrat, joue aussi un rôle dans différents risques professionnels, même si vous les avez réduits en exerçant vos activités en société à responsabilité limitée.

1. Qui est responsable?

Si vous optez pour une société à responsabilité limitée ou SPRL (lire p. 9), les créanciers ne peuvent s’en prendre qu’au patrimoine de la société. "Mais dans certains cas, le patrimoine personnel du gérant ou de l’actionnaire peut malgré tout être mis en danger. Et ce qui se trouve ou non dans ce patrimoine dépend du mode de cohabitation", précise Liesbeth Franck, avocate chez Sherpa Law.

En outre, la responsabilité limitée ne vaut pas si…

  • ... la société tombe en faillite dans les trois ans après sa fondation et si les fondateurs ne peuvent pas prouver que le capital avec lequel la société a démarré était suffisant pour affronter les deux premières années. C’est ce que l’on appelle la responsabilité des fondateurs. Ceci ressort notamment du plan financier qui doit être déposé chez le notaire le jour de la fondation.
  • ... il s’agit d’une profession libérale. Jusqu’à présent, la plupart des titulaires de professions libérales, tels les médecins, sont personnellement responsables pour les fautes commises dans l’exercice de leur profession. C’est ce que l’on appelle la responsabilité professionnelle.
  • ... le gérant/administrateur a commis une faute grave. C’est ce que l’on appelle la responsabilité d’administrateur.
  • ... le gérant/administrateur s’est porté personnellement garant pour des emprunts auprès de la banque.

2. Qui est protégé sur le plan social et fiscal?

Chez un salarié, les cotisations sociales sont retenues automatiquement, tout comme le précompte professionnel. En cas de maladie, celui-ci perçoit une indemnité et en cas de licenciement, il peut compter sur une allocation de chômage. Par contre, l’indépendant ne reçoit qu’une indemnité limitée en cas de maladie et n’a pas droit normalement à des allocations de chômage (lire p. 32). En outre, il doit payer ses cotisations sociales lui-même et faire des versements d’impôts anticipés. "C’est là que se situe le risque, pointe Peter Meeuwssen. Les entrepreneurs débutants se focalisent généralement sur le lancement de leur business et affectent leurs revenus au financement de leur croissance. Beaucoup ne paient que le montant minimum des cotisations sociales. Quand ils reçoivent plus tard la ‘douloureuse’ fiscale ou la régularisation des cotisations sociales, d’aucuns vont au-devant de très désagréables surprises. S’il apparaît qu’ils ne peuvent pas payer immédiatement cette dette d’impôt, cela risque de concerner le partenaire marié, étant donné qu’il peut être appelé à la rescousse. Il est donc capital de jeter au préalable un œil sur le régime matrimonial et de convenir entre les conjoints de la formule la plus intéressante."

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3. Qui doit payer les dettes?

Les dettes contractées par un des deux partenaires dans l’intérêt du ménage peuvent toujours être réclamées aux deux partenaires. Même si l’un des deux les a faites à l’insu de l’autre. Songez aux frais de médecins et d’hôpital, aux frais de réparation de la voiture, aux dépenses de rénovation de l’habitation familiale et tous les frais exposés pour les enfants que le couple élève ensemble.

"Si vous êtes marié sous le régime de la communauté légale, les revenus de l’activité professionnelle entrent dans le patrimoine commun. Le revers de la médaille, c’est que les dettes professionnelles peuvent aussi être considérées comme communes et que les créanciers pourraient donc aller chercher leur dû dans le patrimoine de chacun des conjoints."

4. Comment faire le bon choix?

Autant de bonnes raisons donc de choisir la bonne formule pour cohabiter ou se marier. Et ensuite de s’y tenir! "Vous devez avant tout respecter les règles du jeu du régime que vous avez choisi. On ne voit que trop souvent des couples qui ne suivent pas les règles qu’ils se sont imposées. Du coup, cela entraîne quand même une confusion des patrimoines", souligne Liesbeth Franck.

Exemple

Un couple se marie sous le régime de la séparation de biens. Un des partenaires se porte ensuite garant pour les crédits de l’autre. Ce faisant, le couple ouvre tout grand la porte aux créanciers en engageant aussi le patrimoine personnel du partenaire qui s’est porté garant. «Mieux vaut ne pas vous porter garant de la société dont vous êtes gérant ou actionnaire, précise Liesbeth Franck. Et si vous ne pouvez vraiment pas faire autrement, limitez cette caution dans le temps.» 

Protégez votre habitation familiale contre une saisie

Il est fréquent qu’un couple se marie sous le régime de la séparation de biens, mais qu’il achète quand même ensemble l’habitation familiale et rembourse ensemble l’emprunt qui la finance. Du coup, l’habitation familiale entre aussi dans le faisceau du radar des créanciers. Peter Meeuwssen: "Ce que beaucoup d’entrepreneurs débutants ne savent pas, c’est que le logement familial peut être protégé contre les revendications des créanciers professionnels.

Il suffit pour cela de déposer une déclaration d’insaisissabilité devant le notaire. Mais il faut naturellement tenir compte des garanties que la banque va demander si un crédit bancaire est contracté."

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Cette option existe depuis 2007, mais elle n’est que peu utilisée, parce qu’il est plus difficile dans ce cas de décrocher des crédits auprès des banques. Selon les chiffres de la Fédération des Notaires, il y a à peine 900 déclarations de ce genre par an. Il est pourtant important de déposer cette déclaration avant que les problèmes financiers pointent le bout du nez. Car la protection ne vaut que pour les dettes professionnelles contractées après l’enregistrement. "Si vous utilisez une partie de l’habitation familiale pour votre activité d’indépendant, vous pouvez rendre insaisissable la totalité de l’habitation si la partie professionnelle n’atteint pas 30% de l’ensemble, poursuit Peter Meeuwssen. Si cette part est de 30% ou plus, il faut établir des statuts de copropriété et seule la partie privée pourra être déclarée non susceptible de saisie." 

Évitez l’inégalité entre les partenaires

Le mariage sous le régime de la séparation des biens offre une meilleure protection contre les créanciers que les autres régimes matrimoniaux. "Le revers de la médaille, c’est qu’un régime de séparation de biens très poussé peut être à la base d’une inégalité entre les partenaires, certainement si un des conjoints interrompt sa carrière pour s’occuper des enfants."

Et cela devient encore plus pénible si ce conjoint – comme c’est souvent le cas – vient "donner un coup de main" dans l’entreprise, sans être rémunéré. Aussi longtemps que l’indépendant est en vie et que la relation tient, cela apporte incontestablement un plus, car le couple peut profiter de ce qu’ils construisent ensemble. Mais dans un scénario moins rose, le partenaire reste littéralement dans l’ombre, les mains vides. Sans droits de pension et sans droits de propriété sur les actions. Liesbeth Franck voit cependant poindre une amélioration. "Le 9 février 2017, la Cour d’appel de Gand a déclaré que le conjoint aidant qui est marié sous le régime de la séparation de biens peut introduire, après un divorce, une créance pour les prestations de travail non rémunérées, à condition que le travail presté ne fasse pas partie de la contribution obligatoire normale au mariage."

Recourez à une clause d’attribution

Pour les couples qui veulent autant que possible soustraire le patrimoine privé à l’appétit des créanciers, mais qui veulent quand même se protéger mutuellement en cas de divorce ou de décès, le mariage sous le régime de la séparation de biens, complété d’une clause d’attribution, constitue un juste milieu. La clause d’attribution la plus fréquente est ce que l’on appelle la "clause comme si": les conjoints sont mariés sous le régime de la séparation de biens, mais font une attribution en cas de divorce et/ou de décès comme s’ils étaient mariés sous le régime légal.

N’oubliez pas votre planification successorale

Quand les partenaires décident de ne pas se marier ou de signer une déclaration de cohabitation légale, le patrimoine de chacun reste isolé. Sur ce plan, la cohabitation offre la même garantie qu’un mariage sous le régime de la séparation de biens. Mais la cohabitation requiert une autre planification successorale que le mariage. Les cohabitants légaux n’héritent que de l’usufruit de l’habitation familiale, tandis que les cohabitants de fait n’héritent de rien du tout, sauf s’ils ont pris l’initiative de régler les choses eux-mêmes. En outre, il est possible de déshériter un cohabitant légal par testament, alors que des partenaires mariés sont des héritiers réservataires. Ce dont hérite le conjoint survivant dépend du régime matrimonial choisi et de la présence d’éventuels autres héritiers.

Les taux des droits de succession pour les cohabitants légaux sont les mêmes que pour les personnes mariées. Pour les cohabitants de fait (après avoir réglé entre eux certains accords de succession), ce n’est le cas qu’en Flandre et ce, après un an de cohabitation de fait (et même après trois ans en ce qui concerne l’exonération de droits de succession pour le partenaire cohabitant sur le logement familial). En Wallonie et à Bruxelles, par contre, les cohabitants de fait sont considérés comme des étrangers, si bien que le taux des droits de succession peut y atteindre 80% dans certains cas.

De toute façon, un couple dans lequel un des deux partenaires est un entrepreneur ne peut pas être tenu à l’écart d’une planification successorale pour l’entreprise familiale.

Jusqu'où un créancier peut-il aller?

Cliquez sur votre situation personnelle pour en connaître les implications.

Si vous êtes cohabitant de fait

Vous êtes domicilié à la même adresse. Ni plus ni moins.

Chaque partenaire conserve son propre patrimoine et ses propres dettes.

Il n’y a pas de dettes communes, hormis les dettes que les partenaires ont contractées ensemble.

Les créanciers ne peuvent réclamer à chaque partenaire que ses dettes et sa part dans les dettes communes.

Les créanciers ne peuvent saisir aucun bien du partenaire pour les dettes de l’autre. Mais il y a une présomption que les biens présents dans le logement familial sont communs. Un huissier part ainsi du principe qu’il peut saisir au choix la moitié des biens qu’il trouve à l’adresse du domicile du débiteur. Il peut donc aussi saisir des biens qui sont la propriété de l’autre partenaire. Pour récupérer ses biens, celui-ci devra faire une "revendication". C’est une procédure chère et qui n’a pas toutes les chances de réussir. C’est pourquoi le mieux est de faire un inventaire à un moment non suspect, reprenant quel bien appartient à quel partenaire. Conservez aussi précieusement les documents nécessaires, comme des factures, à titre de preuve.

Les dettes fiscales sont des dettes propres.

Si vous êtes cohabitant légal

Vous êtes domicilié à la même adresse et avez déposé une déclaration de cohabitation légale à l’état civil.

Chaque partenaire conserve son propre patrimoine et ses propres dettes.

Il n’y a pas de dettes communes, hormis les dettes que les partenaires ont contractées ensemble. Les deux partenaires sont toutefois responsables des dettes faites dans l’intérêt du ménage.

Les créanciers ne peuvent réclamer à chaque partenaire que ses propres dettes et sa part dans les dettes communes.

Les créanciers ne peuvent saisir aucun bien propre du partenaire. Mais il y a une présomption que les biens présents dans le logement familial sont communs. Partant de ce raisonnement, un créancier peut donc faire une saisie sur la moitié de ces biens au choix. C’est pourquoi le mieux est de faire un inventaire à un moment non suspect, reprenant quel bien appartient à quel partenaire. Conservez aussi précieusement les documents nécessaires, comme des factures, à titre de preuve.

Les dettes fiscales peuvent être récupérées auprès des deux partenaires.

Si vous êtes marié sous le régime légal de la communauté d'acquêts

Vous êtes marié sous ce régime si vous n’en avez pas choisi d’autre.

Les biens et dettes antérieurs au mariage restent propres, tout comme les biens et dettes dont vous héritez. Ainsi que les dettes qui sont la conséquence d’opérations illicites, comme une amende.

Les biens et les dettes constitués au cours du mariage sont communs. Tout comme les produits des biens propres et les intérêts qui doivent être payés sur des dettes propres.

Les créanciers professionnels peuvent revendiquer le patrimoine propre de l’indépendant, tout comme le patrimoine commun.

Les biens dans l’habitation familiale achetée ensemble sont présumés être communs, ce qui permet aux créanciers de saisir l’ensemble de ces biens.

Les dettes fiscales peuvent être récupérées sur les biens propres et les biens communs des deux conjoints. Elles ne peuvent cependant pas être récupérées sur les biens propres de l’autre conjoint si ce dernier peut démontrer notamment qu’il détenait déjà ces biens avant le mariage, qu’il en a hérité ou qu’ils lui ont été donnés par une autre personne que le conjoint.

Si vous êtes marié sous le régime de la communauté universelle

Pour cela, vous devez explicitement établir un contrat de mariage, soit avant soit après le mariage.

Il n’y a plus aucun bien propre, ni dette propre.

Tous les biens et dettes sont communs. Les créanciers peuvent donc revendiquer la totalité du patrimoine des deux partenaires.

Si vous êtes marié sous le régime de la séparation de biens

Pour cela, vous devez explicitement établir un contrat de mariage, soit avant soit après le mariage. Après le mariage, cela doit évidemment se faire en période non suspecte et non pas pour écarter les créanciers existants.

Chaque partenaire a ses propres biens et dettes.

Il n’existe plus ni patrimoine commun ni dettes communes, à l’exception des dettes que les partenaires contractent ensemble et des dettes faites dans l’intérêt du ménage.

Les biens présents dans l’habitation familiale sont présumés appartenir au propriétaire de l’habitation, sauf si l’autre conjoint peut fournir la preuve du contraire.

Les dettes fiscales sont des dettes propres.

 

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