Alors que les États-Unis et l'Europe retrouvent quelques couleurs, la plupart des pays émergents ralentissent fortement. Nabil Jijakli, Deputy CEO du Groupe Credendo, organisme d'assurance-crédit qui note pas moins de 250 pays et régions dans le monde, brosse le tableau de cette situation très contrastée.
Les notations (ratings) de Credendo constituent un baromètre fiable de la situation géopolitique et économique du monde. Sur les neuf mois écoulés de l'année 2015, l'assureur-crédit belge a déjà baissé plus de notes qu'en 2014.
" On ne revient pas aux dégradations des notations de 2008-2009, mais la détérioration du climat général est certaine ", résume Nabil Jijakli. " Certes, la Tunisie résiste, l'Égypte, la Jordanie et le Liban se maintiennent, mais le chaos règne en Libye, en Syrie, au Yémen et en Irak. La note globale du Moyen-Orient et de l'Afrique du Nord s'abaisse de deux points, et elle n'était déjà pas bien élevée. Parallèlement, la Turquie s’affirme de plus en plus comme une puissance régionale – une redistribution des cartes qu'il faut suivre. La crise russo-ukrainienne affecte toute la zone ex-soviétique. Les tensions en mer de Chine ne semblent pas près de s'apaiser. "
On ne revient pas aux dégradations des notations de 2008-2009, mais la détérioration du climat général est certaine.
Un changement de cycle
Côté économie, les émergents plombent la croissance mondiale, alors qu'ils la tiraient auparavant. Et leur endettement élevé inquiète. " La chute des prix des matières premières, qui entraîne de surcroît un impact sur les taux de change, est durement ressentie, notamment en Afrique subsaharienne (11 baisses de notation) et dans la Communauté des États indépendants (6 baisses de notation). L'Asie reste relativement stable en termes de risques, malgré le ralentissement chinois. "
Le monde se trouve sans doute au début d'un changement de cycle. Ce que confirme la (modeste) croissance en Europe et aux États-Unis, et le plongeon de la plupart des émergents. Aucun indicateur ne permet d'anticiper une reprise des matières premières dans les mois à venir – la locomotive chinoise est grippée, la demande mondiale de pétrole s'est contractée, alors que l'offre reste abondante, plusieurs années de bonnes récoltes maintiennent les prix agricoles bas, etc.
" Et l'épée de Damoclès d'une remontée des taux d'intérêt américains menace les émergents, dont l'endettement (notamment en dollars) s'est alourdi ", rappelle Nabil Jijakli. " Les économies peu diversifiées, dont la balance commerciale est déséquilibrée, et disposant de peu de réserves de change, vont particulièrement souffrir. L'Afrique subsaharienne se trouve ici en première ligne. "