“Le changement climatique? On va régler ce problème!” Luc Vandenbulcke, CEO du fournisseur de services maritimes DEME, se veut serein. “Les sociétés d'ingénierie peuvent certainement apporter les solutions nécessaires au problème mondial le plus important. Les seules choses qui manquent sont un cadre réglementaire et des ressources financières. C'est là que se situent les défis de l'avenir.”
- DEME est un constructeur d'infrastructures maritimes. Au départ, il s'agissait d'une entreprise de dragage, mais au cours des 20 dernières années, son portefeuille s'est fortement diversifié.
- Elle dispose d'une flotte de plus de 100 navires, avec lesquels elle est active sur toutes les mers du monde et couvre tous les continents. Le siège social est situé à Zwijndrecht, dans le port d'Anvers.
- Le groupe emploie quelque 5.000 personnes de 80 nationalités différentes. Le rapport entre les hommes et les femmes est de 85-15. “Cette proportion correspond aux taux d'obtention de diplômes dans les écoles d'ingénieurs belges”, déclare le CEO, Luc Vandenbulcke.
- Les navires de DEME deviennent verts, au sens propre comme au figuré. Les premiers navires qui ne naviguent plus au fioul lourd mais au GNL sont déjà en circulation. Et à bord, l'entreprise prend des initiatives pour réduire son empreinte écologique.
DEME est souvent considérée comme une entreprise de dragage – ce qu'elle est, même si ces activités ne représentent que 40% de son chiffre d'affaires. Voici plus de deux décennies, l'entreprise était déjà au berceau de l'énergie éolienne offshore. Elle a compris à temps que la construction de parcs éoliens en mer deviendrait une activité extrêmement lucrative. DEME a cherché et trouvé les partenaires (notamment financiers) nécessaires, et investi à la fois dans les navires géants pour construire les parcs et dans les parcs eux-mêmes. Désormais, ce sont près de 400 éoliennes qui tournent au large de nos côtes, produisant 2,3 gigawatts, l'équivalent de deux centrales nucléaires… et suffisamment pour fournir de l'électricité à la moitié des ménages belges.
“L'énergie éolienne assure déjà 80% de nos activités en mer, contre seulement 20% pour le pétrole et le gaz”, chiffre Luc Vandenbulcke, CEO de DEME. “À long terme, je ne peux que voir la part de l'énergie éolienne augmenter, notamment parce que l'Extrême-Orient et les États-Unis prennent de plus en plus le train en marche. Au cours des dernières décennies, l'Europe a pris la tête du développement de cette technologie. Parallèlement, l'énergie éolienne offshore est un produit d'exportation. Nous avons installé près de la moitié de toutes les turbines éoliennes offshore dans le monde.”
Pionnier de l'hydrogène
Tout comme DEME a été un pionnier de l'énergie éolienne en mer, elle ambitionne aujourd'hui d'assumer ce rôle dans le domaine de l'hydrogène, le carburant du futur. “Il se produit aisément, avec un électrolyseur, en scindant l'eau en hydrogène et en oxygène à l'aide d'électricité. Si vous y parvenez avec de l'électricité verte, vous obtenez une source d'énergie totalement non fossile, qui peut être facilement transportée et stockée avec l'infrastructure gazière existante. Et si vous la laissez réagir avec d'autres molécules, vous pouvez la transformer en carburant vert ou en d'autres matières premières de base.”
Dans un premier temps, l'hydrogène sera destiné à l'industrie. Au port d'Anvers, il existe déjà une forte demande et une infrastructure complète pour l'hydrogène… mais celui-ci est malheureusement produit avec de l'énergie fossile. “À terme, le prix de l'hydrogène vert devrait baisser, tout comme celui de l'électricité verte”, estime Luc Vandenbulcke. “Mais pour que l'hydrogène soit compétitif, les clients doivent pouvoir compter sur des subventions et le prix du CO2 doit encore croître.”
DEME croit également dans la production d'hydrogène en mer. “Elle est intéressante dans les endroits où la demande directe d'énergie est faible, comme les côtes et les îles éloignées. Et nous devrions aussi nous intéresser aux endroits où il y a beaucoup de vent et de soleil, comme à Oman. Là, nous transformons l'hydrogène en méthanol ou en ammoniac que nous transportons par bateau vers l'Ouest. Le Moyen-Orient bénéficiant d’une excellente exposition au soleil et au vent, les coûts de production compensent les coûts de transport élevés.”
“Quand nous avons commencé le projet de l’energie éolienne en mer, c'était dingue, peut-être plus dingue encore que ne l'est l'hydrogène vert aujourd'hui.”
“Par rapport au pétrole, l'hydrogène vert est un produit très ‘financier’. Il faut vraiment plus de technologie pour le produire, et sans subventions, vous ne trouverez pas de clients. Il s'agit d'un modèle économique nettement plus complexe dans lequel le monde bancaire doit jouer son rôle. Nous comptons sur le financement de projets par nos partenaires; je pense notamment à BNP Paribas Fortis. Nous sommes en dialogue permanent avec le Sustainable Business Competence Center, qui nous sert de caisse de résonance. Heureusement, nous pouvons nous reposer sur notre expérience commune en matière d'énergie éolienne offshore. Quand nous avons commencé le projet, c'était dingue, peut-être plus dingue encore que ne l'est l'hydrogène vert aujourd'hui.”
Matières premières dans l'océan
Luc Vandenbulcke est également très fier du navire de DEME spécialisé dans la récolte de plastiques à Temse. Avec des outils de haute technologie, le groupe tente de repêcher le plastique dans l'Escaut. “La soupe de plastique est un défi bien plus complexe que les émissions de CO2”, estime le CEO. Dans le même temps, il se dit favorable à l'exploitation minière en mer, une activité des plus controversées. “La transition vers l'énergie verte nécessite un flux de nouvelles matières premières. Cela ne se fera pas sans heurts.”
“D'après les recherches que nous avons menées ces dernières années, l'exploitation de ces matières premières au fond des océans est moins nocive sur un grand nombre de critères que l'utilisation de mines terrestres”, conclut-il. “Nous devons en convaincre la société. Et là aussi, les institutions financières jouent un rôle crucial: comment financer ces projets? Dans un cadre réglementaire, bien sûr. Je suis très optimiste. Tous les problèmes peuvent être résolus; scientifiquement, je ne vois aucun obstacle. Les banques ont une lourde tâche à accomplir pour financer la transition.”
Chaque jour, des femmes et des hommes se dépassent pour faire bouger les lignes, pour bâtir une économie durable tout en tirant parti de la digitalisation. Chez BNP Paribas Fortis, nous sommes particulièrement fiers de soutenir ces entrepreneurs passionnés et inspirants. Car construire ensemble l'entrepreneuriat de demain, c'est ça aussi le Positive Banking.