La population vieillit, elle vit plus longtemps et les maladies chroniques pèsent sur l'accessibilité financière des soins de santé. Toutefois, grâce aux nouvelles technologies, l'espérance et la qualité de vie peuvent considérablement augmenter. “Nous constatons à ce titre une convergence des entreprises médicales et technologiques”, déclare Lucien De Busscher, Life Sciences Leader chez EY.
“Les sciences de la vie constituent un vaste écosystème où le patient occupe une place centrale – même si, au fil des ans, il est devenu de plus en plus un consommateur”, souligne Lucien De Busscher, Partner chez EY.
“Outre le patient, on y retrouve les prestataires de soins de santé : les hôpitaux, les médecins, le personnel infirmier, etc. Le législateur développe une politique cohérente en matière de soins de santé, sans oublier les ‘payeurs’, c’est-à-dire les organismes qui remboursent les coûts, comme les caisses d'assurance maladie et les compagnies d'assurance.”
“Cet écosystème comprend aussi toute une série d'entreprises privées, à commencer par les entreprises pharmaceutiques pures, ainsi que les fabricants d'appareils médicaux qui conçoivent des pacemakers, des prothèses de hanche et de genou, par exemple. Certaines entreprises installent des chambres d'hôpital entières ; elles sont responsables de l'équipement médical. Enfin, on peut citer les fabricants de consommables, notamment les entreprises qui produisent des seringues.”
Beaucoup d’acteurs nouveaux ont rejoint l'écosystème ces dernières années. “Aux États-Unis par exemple, des supermarchés ont pris en charge des pans entiers de la chaîne d'approvisionnement des soins de santé. Et, bien sûr, il y a les opérateurs technologiques qui intègrent de plus en plus la technologie de la santé dans leurs produits.”
Qui paiera ?
Grâce à ces nouvelles technologies, on assiste à une nette évolution des soins prodigués aux malades. “Les technologies et les thérapies connaissent un essor incroyable, mais en contrepartie, les budgets prennent des proportions catastrophiques et l’on manque cruellement d'infirmières et de médecins”, déplore Lucien De Busscher.
Grâce à la technologie, nous sommes en mesure de saisir des données de santé en continu par le biais d’applications, de patchs et de montres connectées. Ces données deviennent réellement pertinentes lorsqu’elles concernent des groupes plus importants.
“Il n'est pas nécessaire d'être un économiste de talent pour comprendre que nous allons au-devant d'un énorme problème. Le coût des soins de santé est sur le point d'exploser. C'est pourquoi je plaide vigoureusement en faveur d'une politique de long terme, sur plus d'une décennie.”
“Soit nous acceptons que la santé au sens large représente plus de 80% de notre budget, soit nous devons faire des choix en matière de remboursement. Les médecins pourraient être encouragés à ne plus pratiquer systématiquement certaines interventions. Et nous pourrions donner aux patients les moyens de gérer leur propre santé."
"Ceux-ci seront alors confrontés à des choix tels que faire un citytrip ou vivre deux ans de plus. Aux États-Unis, ils ont déjà Omada Health, une plateforme en ligne qui fournit des conseils pour manger plus sainement, pour faire davantage d'exercices… Elle partage les données avec l’assureur du patient, qui peut relever ou diminuer vos primes en fonction de son style de vie.”
Des données sous stéroïdes
La technologie, et plus particulièrement l'intelligence artificielle, ne peuvent-elles pas remédier en partie à ce problème ? “Grâce à la technologie, nous sommes en mesure d'enregistrer en permanence des données de santé par le biais d’applications, de patchs et de montres connectées. Nous le faisons individuellement, mais ces données deviennent réellement pertinentes lorsqu’elles concernent des groupes plus importants."
L'IA va apporter quantité de nouvelles connaissances, de méthodes de traitement inédites, une détection et une prévention plus précoces pour de vastes groupes de personnes, de nouvelles thérapies mettant l'accent sur le traitement individuel. Les budgets nécessaires dans cette optique seront gigantesques.
"Heureusement, il existe des initiatives louables telles que l'Espace européen des données de santé. Le Parlement européen a approuvé en avril le regroupement de toutes les données des patients, les dossiers médicaux, la recherche clinique, les données génétiques, les informations des registres de santé publique, etc., dans une vaste base de données. Désormais, si vous avez un accident pendant vos vacances, le médecin que vous consulterez en Italie pourra accéder directement à votre dossier médical.”
“Cela dit – et cet élément est encore plus crucial –, quels liens peut-on établir entre ces données ? Quelles conclusions tirer de l'assemblage et de l'analyse de tous ces ensembles de données ? Avec l'IA, les données sont en quelque sorte sous stéroïdes. L’intelligence artificielle a un impact particulier sur l'amélioration des processus et les gains d'efficacité."
"En outre, elle permet une meilleure planification, elle élimine les tâches répétitives, la formation devient plus ciblée et moins coûteuse, etc. Le secteur des soins de santé va certainement adopter cette technologie. L'IA apportera quantité de nouvelles connaissances, de méthodes de traitement inédites, une détection et une prévention plus précoces pour de vastes groupes de personnes, de nouvelles thérapies mettant l'accent sur le traitement individuel. Et les budgets nécessaires dans cette optique seront gigantesques. Il faut rester prudent : on n’est pas à l’abri d'un emballement comme celui de la bulle internet.”