Les experts immobiliers sonnent l’alarme: la Belgique pourrait être confrontée à une suroffre d’appartements. C’est surtout le cas en Flandre à cause de l’augmentation démesurée du nombre de permis de bâtir accordés par les autorités. En Wallonie, ce chiffre reste relativement stable, tandis qu’il baisse à Bruxelles. Deux spécialistes proposent leurs solutions.
La baisse des taux d’intérêt a fait flamber les prix des terrains et des habitations, indique Sven Damen, économiste immobilier et chercheur à la KU Leuven. “De plus en plus de candidats-acheteurs doivent dès lors se contenter d’un plus petit logement. En outre, les taux d’intérêt très bas attirent davantage d’investisseurs à la recherche de rendement via les revenus locatifs. En ce sens, le segment des appartements est plus cyclique que le marché immobilier dans son ensemble.”
Montée en flèche des délais de vente des appartements
“Ces trois dernières années, le temps nécessaire à la vente d’un nouvel appartement a grimpé de 28%”
Le marché des appartements semble également plus sensible à une potentielle suroffre. Ces trois dernières années, le temps moyen nécessaire à la vente de nouveaux appartements a grimpé de 28%, révèle l’indice immobilier ERA-KU Leuven. “Avant 2017, il fallait compter en moyenne 250 jours pour vendre un appartement neuf, contre 320 jours désormais”, précise Sven Damen. Depuis 2008, le nombre de logements a augmenté nettement plus vite que le nombre de ménages.
“Les villes qui accordent des permis de bâtir à tour de bras se retrouvent tôt ou tard avec des logements vides. Nous avons besoin d’une politique mieux adaptée en matière de permis”
En 2016, la Ville de Courtrai a par exemple accordé des permis de bâtir pour 297 appartements, dont 213 ont trouvé acquéreur. “Il existe donc un risque potentiel”, estime Frédéric Vandenhende, CEO d’Investr, spécialisé dans l’analyse indépendante d’investissements via sa plateforme dédiée aux investisseurs et aux agents immobiliers. “Les villes qui accordent des permis de bâtir à tour de bras se retrouvent tôt ou tard avec des logements vides. Nous avons besoin d’une politique mieux adaptée en matière de permis. Une commune qui accueille chaque année 100 nouveaux ménages de 2,5 personnes en moyenne, sait qu’elle aura besoin de 40 nouveaux logements l’année suivante.”
Données et analyse de données
Les investisseurs et les agents immobiliers réfléchissent trop souvent en termes de rendement et accordent trop peu d’attention aux utilisateurs finaux. “Ils doivent examiner plus en détail s’ils investissent réellement dans le bon produit immobilier au bon endroit”, poursuit Frédéric Vandenhende. Il n’en reste pas moins difficile d’interpréter certains chiffres. Construit-on réellement trop d’appartements et de maisons qui peineront forcément à se vendre? Ou s’agit-il surtout d’une progression des kots étudiants, des appartements avec services et des secondes résidences?
Le secteur a par-dessus tout besoin de données et d’analyses de données beaucoup plus détaillées, aussi bien pour le neuf que pour le marché secondaire, souligne Sven Damen. “À l’heure actuelle, le taux d’inoccupation des appartements et des maisons n’est pas calculé de manière suffisamment cohérente d’une commune à l’autre. Peut-être un expert indépendant peut-il aider à collecter et anonymiser les données des promoteurs immobiliers? Cela permettrait d’analyser plus simplement et précisément les segments de marché et l’évolution des prix.”