Les robots peuvent accomplir bien davantage que du travail à la chaîne ou des tâches répétitives. Les derniers modèles sont des ordinateurs sophistiqués à même d'observer leur environnement, d'user d’intelligence artificielle et d'exécuter des missions complexes avec une précision surhumaine. Ils travaillent par ailleurs mieux et plus étroitement avec l'humain. Le nouveau programme de maîtrise en robotique de l'Université technique de Delft prépare les ingénieurs à relever ce défi.
Développer des robots et les utiliser de manière ciblée requiert une solide dose de compétence en ingénierie. Acquérir celle-ci est l’objectif du programme de maîtrise en robotique de l’Université technique de Delft, où les étudiants développent des compétences techniques à la jonction entre l’ingénierie mécanique, l’informatique et l’intégration système. La première promotion sera diplômée cet été.
Araignée dans la toile
Ce programme de maîtrise dure deux ans et compte aujourd’hui plus de 220 étudiants. La plupart sont néerlandais, un cinquième venant d’autres pays européens et non européens, dont une poignée d’étudiants belges. “L’ingénieur en robotique joue le rôle de l’araignée dans la toile”, résume Joost de Winter, directeur du programme de maîtrise en robotique et maître de conférences au département de robotique cognitive de la TU Delft. “L’étudiant intègre plusieurs disciplines et peut superviser divers processus au sein d’un système de développement.” Ce profil répondant parfaitement aux besoins du monde des affaires, le programme a été élaboré en étroite collaboration avec les entreprises.
- Le mot “robot” vient du tchèque “robota”, qui signifie “travail forcé” ou “esclave”.
- Dès 1495, Léonard de Vinci a esquissé un robot mécanique sous la forme d'une armure autopropulsée.
- L'IA a été mise en œuvre pour la première fois en 1951 avec un programme d'échecs écrit pour le Ferranti Mark 1, le premier ordinateur disponible dans le commerce.
- Les Grecs disposaient déjà d'un assistant de bar mécanique en 300 avant J.-C.: une sorte de statue qui pouvait verser du vin.
- Facebook a mis fin à une expérience d'IA il y a quelques années, car deux systèmes informatiques avaient commencé à communiquer entre eux dans un langage incompréhensible (pour les humains).
Le cursus se concentre, entre autres, sur les applications robotiques dans les entreprises agricoles, l'industrie automobile, la logistique et les environnements de production industrielle. “Pensez aux robots de traite intelligents qui passent automatiquement d'une vache à l'autre, aux véhicules à conduite autonome, aux robots de triage intelligents dans les entrepôts et aux robots de rééducation dans le secteur des soins de santé”, illustre Joost de Winter. L'accent est placé sur la programmation et le contrôle des robots intelligents et non sur le développement de la partie hardware.
Mensch und Maschine
Les ingénieurs étudient et conçoivent également ce qu'on appelle des “cobots”, des robots complexes qui collaborent avec les humains dans des environnements imprévisibles. Pour toutes ces raisons, les ingénieurs en robotique doivent plus que jamais faire preuve d'esprit d'équipe. “Ils doivent pouvoir travailler de manière fluide avec des personnes aussi bien qu’avec des robots”, prévient Joost de Winter. “Dans une équipe multidisciplinaire composée de différents spécialistes, ils gardent une vue d'ensemble sur le système de développement. Les étudiants développent ainsi des compétences telles qu'une attitude autocritique et “enseignable”, la communication, la présentation de la recherche et le fait de donner et de recevoir du feed-back. “Ils gardent trace de toutes leurs expériences d'apprentissage dans un portfolio, qui les aide à être conscients en permanence de leur propre rôle dans une équipe de projet.”
La coopération de l'humain et des robots soulève des questions sociales. Quel rôle les humains joueront-ils dans un monde de plus en plus peuplé de robots? Les robots et les hommes ne sont pas concurrents, juge Joost de Winter, “ils se complètent à merveille”. Les machines intelligentes, par exemple, sont plus rapides et plus efficaces dans des tâches extrêmement difficiles à réaliser pour les humains, comme effectuer des calculs compliqués à partir d'une immense quantité de données. “De nombreuses actions humaines apparemment anodines sont en revanche très complexes pour un robot, comme ouvrir des portes ou sauter. Les humains et les robots ont leurs propres forces et faiblesses, très complémentaires.”
Questions éthiques
Les ingénieurs en robotique doivent par ailleurs prendre en compte diverses questions éthiques et évolutions sociales. Quel rôle est moins approprié, voire complètement inadapté, pour un robot dans la société de demain? C'est pourquoi les robots capables d'expliquer leurs décisions gagnent en importance. Si les gens forment mal l'intelligence artificielle – en mettant l’accent sur les Blancs, par exemple –, un système d'IA raciste peut apparaître.
L'ingénieur en robotique joue le rôle d'une araignée dans la toile.
Plus encore, les robots peuvent servir à poursuivre des fins éthiquement discutables, comme l'espionnage, la surveillance des individus et la guerre. “Nous voulons que les ingénieurs en robotique soient pleinement conscients de tous ces travers”, déclare Joost de Winter. “Ces éléments sont abordés dans les cours Robot & Society et Human-Robot Interaction. C'est ainsi que nous sensibilisons les étudiants à ces défis sociétaux et que nous les rendons critiques.”
Robots et ingénieurs de demain
À quoi ressemble l'avenir de la robotique? Les robots et l'automatisation contribueront-ils, en la rendant plus abordable, à ramener en Europe une grande partie de la production des pays à bas salaires? “Les robots seront de plus en plus intelligents”, avance Joost de Winter. Entre autres parce que les ordinateurs deviennent plus rapides et les applications plus intelligentes. Ainsi les robots seront-ils capables de comprendre de mieux en mieux leur environnement et s’imposeront-ils en entreprise, à la maison et dans la rue.
Les humains et les robots ont leurs propres forces et faiblesses, très complémentaires.
“Les tondeuses à gazon robotisées ne sont qu'un début”, conclut Joost de Winter. “Bientôt, nous verrons peut-être des robots livrer des colis à des particuliers ou des marchandises à des entreprises. Ou des robots de sécurité surveiller des terrains ou des bâtiments.” L'ingénieur du futur jouera un rôle de liant dans cette histoire. “Il/elle devra coordonner les applications et permettre aux disciplines de travailler ensemble de façon transparente.”