Fin novembre, Koen Geens présentait sa nouvelle loi bancaire. Comment le ministre des Finances entend-il regagner la confiance des épargnants ? Et comment renforcer dans le même temps le secteur bancaire ? Entretien.
"Garder les banques sur le droit chemin, loin des excès qui peuvent compromettre l’épargne, et regagner la confiance des épargnants. La réforme entend transposer les dispositions européennes en matière de protection et de règlement de capital, dans le droit belge " : telle est, en résumé, la mission que s’est fixée le ministre Koen Geens. Son plan repose sur trois piliers. Tout d’abord, la scission entre l’argent de l’épargne et les activités à risque, afin d’éviter que la spéculation ne contamine l’épargne. Ensuite, l’interdiction des indemnités variables dans les banques qui bénéficient de subsides.
Et enfin, l’élargissement de l’exonération fiscale dont jouissent les intérêts de l’épargne à d’autres produits tels que les bons d’État et les obligations. Évidemment, ces mesures ne doivent pas empêcher les banques d’être rentables. " On attend déjà beaucoup des banques ", estime le ministre. " Pensons aux exigences en matière de capitaux, à la nouvelle réglementation, etc. Cela dit, nous ne pouvons pas nous permettre un trop grand laxisme. Nous devons prendre les décisions justes, même si celles-ci sont souvent difficiles. Il est impératif de finaliser l’Union bancaire européenne. "
Taxe européenne
Depuis plusieurs années déjà l’Europe planche sur une taxe sur les transactions financières, une taxe Tobin européenne en quelque sorte. Sera-t-elle finalement mise en oeuvre ? " Notre gouvernement est favorable à l’instauration d’une Financial Transaction Tax (FTT). La Commission a formulé une proposition et onze États membres – dont la Belgique – ont décidé de poursuivre les discussions à ce sujet.
Cela dit, ces discussions ne sont pas simples. Nous devons élaborer cette taxe dans le cadre le plus large possible. La FTT n’aura réellement de sens qu’à mesure qu’elle sera adoptée par un plus grand nombre de pays dans le monde. Les onze États membres de l’UE constituent-ils une masse critique suffisante ? La réponse à cette question n’est pas encore tout à fait claire. " La Belgique se range toujours derrière le principe de la FTT, confirme le ministre. "
Cependant, nous voudrions que ce qui ressort finalement de ces discussions tienne la route et ne présente pas plus d’inconvénients que d’avantages. Les services financiers représentent un segment d’activités important en Belgique, dans la mesure où ils emploient de nombreux effectifs et ont un impact important sur notre balance des paiements. Il faut en tenir compte également.
D’un autre côté, plusieurs ONG ont le souhait – légitime – de lutter contre la spéculation débridée sur les produits agricoles et les matières premières. " Enfin, la FTT aurait aussi une incidence sur le financement de la dette d’État. " Si la proposition de la Commission européenne est adoptée dans son état actuel, les coûts de financement augmenteraient sensiblement ", assure le ministre.
Taxe bancaire
Sur l’argent parqué sur les livrets d’épargne, les banques versent un intérêt à leurs clients. En plus de cette indemnité, la banque doit s’acquitter d’une contribution pour la protection des dépôts, plus encore près d’un quart de pourcent sous la forme de taxes. L’épargnant qui reçoit un intérêt de 1% aujourd’hui sur son épargne doit donc savoir que la banque paie en réalité 1,32%, taxes et cotisation pour la garantie de dépôt incluses.
Les petites banques estiment que cette mesure est discriminatoire. " Cette taxe bancaire a une plus grande incidence sur les plus petites banques traditionnelles que sur les grandes enseignes ou banques de niche, qui ont d’autres activités que la collecte de l’argent de l’épargne ", convient le ministre Geens. " Ceci étant dit, il n’est pas simple de trouver une solution convenant à toutes les parties. Un abaissement des charges pour certaines banques devrait forcément être contrebalancé par une augmentation pour les autres. " Enfin, quels sont les défis que doivent relever les banquiers belges ? Koen Geens en identifie trois : " L’adaptation à la nouvelle réglementation, le rapprochement de l’économie réelle et le rétablissement du lien de confiance avec la communauté. "