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La réponse numérique à la demande du client

Benoit Gérard (EY), Mieke Debeerst (Belfius), Gunter Uytterhoeven (BNP Paribas Fortis) et Bernard Ghigny (EY). ©Dries Luyten

La révolution des données rebat les cartes dans l’univers des banques. Que veut le client numérique ? Comment répondre à l’arrivée de nouveaux acteurs comme Apple Pay ou Sixdots ? À quoi ressemblera l’agence bancaire du futur ? Nous avons écouté les réponses des plusieurs experts expérimentés : Mieke Debeerst, Director Corporate & Marketing Communications chez Belfius, Gunter Uytterhoeven, directeur marketing chez BNP Paribas Fortis, Benoît Gérard et Bernard Ghigny d’EY.

Comment appréhendez-vous la révolution numérique ?

Uytterhoeven : Un certain nombre de changements se sont greffés récemment et très rapidement sur les révolutions du mobile et d’internet, qui ont toutes deux eu besoin de 40 ans pour arriver à maturité. Subitement, 60% des Belges possèdent un smartphone, et une grande partie de la population communique abondamment sur les réseaux sociaux. Cela crée une foule de réseaux et de nouvelles formes d’interaction dans le cadre desquelles des informations personnalisées sont échangées très rapidement.

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À cela s’ajoutent les Big Data, les énormes quantités de données qui résultent de ces interactions, et la technologie qui convertit ces données en informations utiles. Ces évolutions ont subitement commencé à se croiser, avec pour résultat un big bang qui a donné naissance non seulement à une génération d’entreprises proposant de nouveaux modèles d’affaires, comme Uber, Airbnb et Alibaba, mais aussi à un nouveau profil de client, capable de maîtriser les technologies numériques et très exigeant.

Debeerst : La grande question est : comment les banques peuvent-elles gérer ce phénomène ? Comment traduire cette révolution en services qui apportent une réelle plus-value à nos clients ? Les banques offrent la possibilité d’effectuer des opérations en ligne depuis plus de 10 ans, la plupart d’entre elles disposent déjà d’excellentes solutions et applications de mobile banking. À présent, nous devons franchir une nouvelle étape.

Ghigny : Cette révolution intervient à un moment très intéressant pour le secteur financier. Après la crise, les banques ont dû se concentrer sur la consolidation de leurs bilans, parfois tout simplement pour survivre. À présent que la poussière est quelque peu retombée, le secteur peut à nouveau focaliser toute son énergie sur le client. C’est d’ailleurs urgent et indispensable.

Le client aux commandes

Comment le client réagit-il ?

Debeerst : Dans la révolution numérique, le client est aux commandes. Il veut pouvoir faire ses opérations bancaires où il le souhaite, et sur le canal de son choix. Les données présentes sur chaque canal doivent être adaptées de manière à ce que le client reçoive chaque fois la réponse appropriée. Un énorme défi, mais aussi, c’est vrai, une gigantesque opportunité pour tout le secteur.

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Gérard : Une récente enquête révèle que l’expérience client est le principal critère dans le choix d’une banque. La proximité d’une agence, qui arrivait en tête il y a quelques années, est rétrogradée en cinquième position. La donne est complètement différente.

L’avenir est-il entièrement numérique ? Ou les agences bancaires vont-elles subsister ?

Gunter Uytterhoeven, BNP Paribas Fortis
Gunter Uytterhoeven, BNP Paribas Fortis ©Dries Luyten

Uytterhoeven : Il ne s’agit certainement pas de faire un choix entre l’agence bancaire et les canaux numériques. Ils sont complémentaires. Un client qui modifie des données sur son application pour smartphone et appelle ensuite le call-center, attend de la personne qui lui répond qu’elle soit parfaitement au courant.

Notre marque numérique, Hello Bank!, en est un bon exemple : parfois, nous la complétons par des agences temporaires. Ceux qui pénètrent dans cette agence pop-up peuvent par exemple essayer les Google Glass, surfer gratuitement en ligne ou recevoir une boisson. C’est une expérience supplémentaire en plus de la présence mobile. Le contact humain reste crucial, continue à générer de la valeur ajoutée. Notre but est de renouveler l’endroit et le contexte dans lequel il est établi. Il ne s’agit plus du guichet derrière une vitre, après avoir fait la file pour retirer du cash.

Debeerst : Le client ne se rend plus dans une agence pour régler une transaction, il le fait via d’autres canaux. Quelle expérience fournissons-nous dans l’agence ? Proposons-nous des rencontres avec des experts ? L’aidons-nous à utiliser son smartphone ? Allons- nous mettre notre réseau d’agences à la disposition de nouveaux partenaires complémentaires ? Notre réseau d’agences et notre contact humain sont des atouts essentiels, mais il est très difficile de les exploiter de manière innovante.

Big Data

Jusqu’où ira la banque du futur dans les Big Data ?

Ghigny : Comment la banque gère-t-elle les énormes quantités de données qu’elle reçoit de ses clients ? La sécurité est cruciale. La technologie est mature, mais nous avons un rôle éducatif à remplir, en mettant en garde les clients qui adoptent un comportement à risque. La protection des données à caractère confidentiel est également primordiale. Comment les banques demandent-elles à leurs clients l’autorisation d’utiliser leurs données sans se montrer indiscrètes ?

Mieke Debeerst, Belfius
Mieke Debeerst, Belfius ©Dries Luyten

Debeerst : Une enquête révèle que 80% des clients demandent des propositions plus nombreuses, meilleures et plus proactives de la part de leur banque, et ils n’ont aucune objection à ce que celle-ci exploite les données qu’elle possède pour le faire. 20% des clients opposent un refus de principe. Nous le respectons. Mais nous devons apporter un meilleur service à ces 80%, ce qui se fait déjà de manière très efficace au sein de notre secteur. C’est précisément à ce niveau que les Big Data doivent tenir leurs promesses.

Uytterhoeven : Nous utilisons encore trop peu les grandes quantités de données. Les possibilités existent, mais nous devons nous montrer très prudents. Un paiement qui n’est pas passé, une facture GSM plus salée que prévu : le client veut en être informé. Nous pouvons aussi aller un peu plus loin : si nous pouvons démontrer que ses pairs paient leurs télécommunications beaucoup moins cher, notre client nous en sera reconnaissant. Les outils sont là. Certains clients attendent encore plus, par exemple que nous les aidions à obtenir un abonnement de GSM moins cher. Même si nous le pouvions dans le respect total de la protection des données et de la vie privée, la véritable question reste : où s’arrête le rôle de la banque ?

Nouveaux acteurs

Comment les banques appréhendent-elles l’arrivée de nouveaux acteurs qui grignotent leurs marges ?

Gérard : Il est clair que les banques sont sous pression dans un certain nombre d’activités-clés. Voyez les sites web qui comparent des produits et services bancaires ou des assurances, ou les acteurs qui proposent des interfaces très sexy comme Apple Pay, Google Wallet et Sixdots. Dans notre pays, nous voyons se développer de nouveaux modèles d’affaires en matière d’octroi de crédits, notamment le prêt peer-to-peer et le crowdfunding. Subitement, un détaillant chinois en ligne comme Alibaba propose des services de private banking. Ces acteurs s’insèrent entre la banque et le client, grignotent les marges et la chaîne de valeur. Et cela va très vite.

Uytterhoeven : Les banques doivent se réinventer d’urgence. Avec un objectif : combler les attentes du client. Pas uniquement par une stratégie purement incrémentielle. Il faut aussi de l’innovation disruptive.

Comment les banques peuvent-elles continuer à jouer leur rôle dans un paysage qui change aussi vite ? Uytterhoeven : Une banque possède plusieurs avantages uniques. D’abord et avant tout, une banque connaît tous ses clients personnellement grâce à son réseau d’agences très dense. Plus le monde devient numérique, plus s’accroît le besoin de véritables contacts, j’en suis convaincu. Deuxièmement, les banques disposent de pare-chocs financiers pour absorber le risque de contrepartie.

Benoit Gérard (EY), Mieke Debeerst (Belfius),
Gunter Uytterhoeven (BNP Paribas Fortis) et Bernard Ghigny (EY).
Benoit Gérard (EY), Mieke Debeerst (Belfius), Gunter Uytterhoeven (BNP Paribas Fortis) et Bernard Ghigny (EY). ©Dries Luyten

De nombreux acteurs alternatifs n’ont pas des poches aussi bien garnies. Troisièmement, notre longue expérience de l’informatique, de la sécurité et de la protection de la vie privée est un plus. Les nouveaux acteurs pourraient s’y brûler les ailes. Les banques qui exploitent ces atouts de façon adéquate dans le monde numérique en récolteront certainement les fruits.

Debeerst : Le métier de banquier ne se remplace pas aussi facilement. Tous les Apple et Google de ce monde le comprennent parfaitement. Pour proposer Apple Pay, Apple se repose sur des partenariats avec des banques. Notre rôle est donc respecté. Cela ne veut pas dire que nous devons rester les bras croisés. Il nous incombe également de rechercher des partenariats dans le cadre desquels nous prenons nous-mêmes l’initiative.

Transformation

Quel est l’impact de l’évolution numérique sur le back-end des banques ?

Ghigny : D’abord et avant tout, l’ajout de canaux numériques aux autres canaux entraîne une augmentation des coûts. La révolution numérique n’exige pas seulement une adaptation du côté du front-end, dans les relations avec le client. Pour réellement devenir " omnicanaux " ou intégrer parfaitement les différents canaux, il faut une organisation et une communication interne parfaites. Ceci requiert une profonde restructuration du back-end, des processus, des compétences des collaborateurs. C'est toute l'organisation qui doit évoluer.

Debeerst : Cela demandera des investissements considérables. En informatique, mais aussi au niveau de nos collaborateurs. Le back-end se transforme de plus en plus en frontend, ce qui constitue un changement fondamental. Nous investissons pleinement dans l’accompagnement de nos collaborateurs en matière d’orientation client, de flexibilité et de maîtrise du numérique.

Uytterhoeven : Notre secteur est en difficulté, avec des taux très bas, une croissance en berne, une forte baisse des bénéfices et des hausses d’impôts. Et c’est précisément dans ce contexte que nous devons investir, dans des projets qui ne porteront peut-être pas immédiatement leurs fruits, mais qui sont indispensables pour garantir un avenir florissant.

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