Roman: "Capturez Clark Gable!"
Avec le roman-fantaisie "Herr Gable", Jean-Baptiste Lantéric entrechoque le Reich et le 7 art, par uchronie interposée…
On le sait, Hitler était un vrai fan de cinéma. Tout comme Staline, d'ailleurs. Le Führer avait un temps rêvé de faire de Fritz Lang, qu'il adulait, le cinéaste officiel du Reich. Il dut se contenter de Leni Riefenstahl et de ses athlètes blonds aux corps bien huilés, captés en contre-plongée aux Jeux Olympiques de Berlin – avec un certain Jesse Owens dans le rôle du trouble-fête (4 médailles d'or pour l'Afro-américain).
Partout où il séjournait – ou presque –, Hitler fit installer des salles à fauteuil de velours rouge, histoire d'agrémenter les soirées avec des bouffées de 7e Art, en bonne compagnie. Parmi ses favoris, un certain… Clark Gable. La star la plus plébiscitée du monde, à l'époque, c'est lui. Il a conquis l'Amérique (l'Europe, ce sera pour après la guerre), grâce au blockbuster absolu: "Autant en emporte le vent". Mais on avait déjà pu apprécier son charme désinvolte – bien que hautement viril – dans "New York-Miami" ou "Les révoltés du Bounty".
En janvier 1942, un drame survient dans sa vie: la mort brutale de sa troisième épouse, la géniale Carole Lombard. L'avion qui la ramenait d'un événement lié à l'effort de guerre s'écrase près de Las Vegas. Par désespoir, Gable décide de s'engager dans l'US Air Force.
Le roman foisonne de détails véridiques, de situations plausibles, voire de rebondissements vraisemblables. Au lecteur de faire le tri!
Et si… Et si Hitler, mis au courant, avait ordonné la capture de son acteur préféré? C'est sur cette supposition pas si absurde que s'est basé Jean-Baptiste Lantéric pour échafauder son récit. Alors, bien sûr, il s'agit d'une fantaisie. Qu'on ne cherche pas ici la vérité historique… quoique… À bien y regarder, le roman foisonne de détails véridiques, de situations plausibles, voire de rebondissements vraisemblables. Au lecteur de faire le tri!
Adolph, Clark... et Ewa
Les personnages principaux, ici, ne sont ni Hitler, ni même Gable, mais… Eva Braun, la jeune maîtresse blonde du dictateur. Et aussi le capitaine Florian Weiter, ancien de Stalingrad et tireur d'élite. Lequel est envoyé en mission spéciale, afin de mettre la main sur l'acteur mythique, dont l'avion vient d'être abattu. Arrivera-t-il à le ramener dans l'antre de la bête, c'est-à-dire le fameux Berghof ?
Quelques invraisemblances ne viendront pas ternir le plaisir du lecteur, qui se retrouve propulsé dans un récit à la Indiana Jones: si tous les ingrédients sont vrais, les héros, eux, échappent à l'historicité pour mieux nous entraîner dans leur sillage. Et les dialogues, dans la foulée, de sonner juste.
Le ciment qui tient tout cela est bien sûr cet "ailleurs absolu" que fut effectivement le nazisme, avec son mélange de récits fondateurs contradictoires, de prise au sérieux, et de fantasmes mal assumés. Bref, un melting pot idéologique notoire, où tout était possible en termes d'archétypes et de comportements. Tout, et bien sûr son contraire…
Roman historique
"Herr Gable"
De Jean-Baptiste Lentéric, 432 p.
éditions Belfond.
Note de L'Echo: