Cartes blanches à gogo au Gaume Jazz Festival

Avec vingt-quatre concerts en trois jours, sur cinq scènes réparties dans le parc du château et dans le village de Rossignol, au sud de la province du Luxembourg, le Gaume Jazz Festival reste fidèle à sa réputation de grande fête bucolique et musicale. Caractérisée par sa diversité d'approches et de genres, cette trente-huitième édition se distingue par les nombreuses cartes blanches délivrées à des projets innovants signés Fabrice Alleman, saxophoniste, Margaux Vranken, pianiste et Pia Salvia, harpiste.

"Une carte blanche donne lieu à une création, qui est le cheminement personnel d'un artiste, explique Jean-Pierre Bissot, fondateur et directeur du festival. Certaines de ces créations sont éphémères, d'autres donnent lieu à des développements dans la durée: tournées, projets phonographiques, etc."

Certains albums ont été captés au festival, comme le trio réunissant la pianiste Nathalie Loriers, la saxophoniste Tineke Postma et le bassiste Philippe Aerts enregistrés à l'été 2013. L'album a paru l'année suivante sous le titre "Le peuple des silencieux" chez W.E.R.F. à Gand. "Une projet de femmes, avec une Wallonne et une Hollandaise, capté en Gaume et publié sur un label flamand", résume Jean-Pierre Bissot.

De nombreux autres projets, créés sur l'une des scènes gaumaises, ont perduré, les musiciens se retrouvant ensuite en studio, comme le trio Aka Moon avec le percussionniste indien Umayalpuram Sivaraman. Signe des temps, la prestation de la pianiste Margaux Vranken l'an dernier, avec quatuor à cordes et voix, par des musiciens belges pour la plupart, a donné lieu à la parution de "Purpose, la suite", disponible chez Igloo en version numérique. Carte blanche qui se poursuit cette année, puisque Margaux Vranken revient en terres gaumaises, en duo avec la chanteuse américaine Farayi Malek cette fois.

Artistes en résidence

En 2021, Margaux Vranken était artiste en résidence au Gaume Jazz. Cette année, c'est au tour de la harpiste et chanteuse Pia Salvia de résider cinq jours sous les auspices du festival avec son quartette original comprenant trompette (Jean-Paul Estiévenart), basse (Victor Foulon) et batterie (Noam Israeli).

Les trois autres créations de cette trente-huitième édition sont le fait d'un même homme, Fabrice Alleman. On comprend qu'il soit, lui aussi, artiste en résidence. Son premier projet, qui s'appelle "Evidence", consiste en des compositions originales, en hommage au trompettiste et chanteur américain Chet Baker, dont le saxophoniste belge revendique la grande influence. La proposition est d'autant plus alléchante que Fabrice Alleman est accompagné d'une rythmique – Nicola Andrioli, piano, Philip Catherine, guitare et Jean-Louis Rassinfosse – dont les deux derniers ont connu Chet Baker, et enregistré avec lui l'album "Crystal Bells", chez Igloo, en 1983.

Intitulé "Now", le deuxième projet voit Fabrice Alleman entouré d'un sextette international et se veut en phase avec l'évolution du monde: changement climatique, eau, migrations en sont les sujets d'inspiration. Après ce retour de la musique engagée, Fabrice Alleman termine son périple gaumais en l'église du village, d'abord en solo, ensuite avec trois voix, pour terminer en chœur avec le public. D'où le titre "From one to… all".