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analyse

La face cachée des promesses de Donald Trump

Donald Trump n'a pas été élu sur un programme clair. ©REUTERS

Comment vont tourner les États-Unis durant le prochain mandat de Donald Trump? L'expérience passée et ses slogans de campagne donnent le ton de son programme. Guerres commerciales en vue.

Qu'a-t-on retenu du premier mandat de Donald Trump, de 2017 à 2021? Surtout sa lamentable fin de mandat, avec l'invasion du Capitole par ses partisans. Aussi, son hyper communication sur les réseaux sociaux, ses bonnes relations avec des dictateurs et sa gestion chaotique de la crise du covid.

Mais il ne faut pas oublier que l'économie américaine se portait fort bien sous Trump; beaucoup d'Américains s'en sont souvenus. Jusqu'à l'arrivée de la pandémie, en tout cas, l'Amérique vivait plutôt sa belle vie. La véritable influence du président républicain reste cependant à relativiser.

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"Ce genre de personnalité est choisie sur base d'un programme vide, et parce qu'elle a pu jouer avec les frustrations."

Tanguy Struye
Politologue (UCLouvain)

Un bilan mitigé pour Trump I

Sous Trump, les États-Unis avaient connu la plus forte baisse d'impôts depuis des décennies, les règles s'étaient assouplies pour les banques, le combat environnemental semblait oublié.

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À l'époque cependant, la gigantesque dette fédérale avait encore gonflé et les guerres commerciales avaient compliqué les relations internationales.

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Bref, un bilan mitigé. Qu'attendre, cette fois, de Donald Trump, qui a 78 ans? On repart pour un tour sur le même tempo.

"Le problème des candidats populistes dans nos démocraties, c'est qu'ils sont souvent élus sans avoir proposé un vrai projet", résume d'emblée le politologue Tanguy Struye (UCLouvain). "Ce genre de personnalité est choisie sur base d'un programme vide, et parce qu'elle a pu jouer avec les frustrations."

Donald Trump a, encore une fois, de la chance: l'inflation est à nouveau sous contrôle. Mais l'homme s'est montré ambitieux: il a annoncé des mesures qui bouleverseront l'économie mondiale. Droits de douane et baisses d'impôts sont ses objectifs.

Il compte encore utiliser les tarifs douaniers, avec une taxe sur les importations de produits étrangers dont il attend "des milliards de dollars". Objectif? Booster l'économie américaine, au détriment des importations.

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"Il veut imposer des tarifs douaniers au Mexique, à l'Europe, à la Chine, pour 'relancer l'économie'. Mais cela va accroître l'inflation, donc toucher les classes qui ont voté pour lui."

Tanguy Struye
Politologue (UCLouvain)

Relancer les guerres commerciales

Le prochain président vise ainsi des droits de douane forfaitaires de 10% à 20% sur nombre de biens arrivant aux États-Unis, mais aussi des taxes d'au minimum 60% pour les importations en provenance de Chine. Il compte aussi taxer à 200% les constructeurs automobiles qui déplaceront leur production au Mexique, ce qui paraît contraire à l'accord de libre-échange signé en 2020 par son administration de l'époque. Mais il voudrait renégocier cet accord conclu avec Mexico et Ottawa.

"Il veut imposer des tarifs douaniers au Mexique, à l'Europe, à la Chine, pour 'relancer l'économie'. Mais cela va accroître l'inflation, donc toucher les classes qui ont voté pour lui. Et ce qu'il a oublié de dire, c'est que les autres pays vont riposter!", alerte Tanguy Struye, politologue à l'UCLouvain. Les marchés boursiers pourraient aussi être fortement ébranlés par ces nouvelles guerres commerciales.

Le républicain veut par ailleurs, avec des aides à la recherche et au développement, encourager les constructeurs basés aux États-Unis.

Baisse d'impôts à gogo

En matière d'impôt, Trump propose d'abaisser de 21% à 15% le taux frappant les entreprises qui produisent aux États-Unis.

Il veut aussi réduire les impôts des particuliers, notamment des plus riches et des citoyens américains expatriés, touchés par une double imposition.

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Au travail, les heures supplémentaires ne seront plus taxées. Les taxes sur les pourboires dans l'horeca sont vouées à disparaître sous ce nouveau mandat de Trump.

Des spécialistes des matières budgétaires ont tiré la sonnette d'alarme durant la campagne. Ces baisses d'impôts pourraient alourdir le déficit public fédéral de 3.600 milliards à 6.600 milliards de dollars en une décennie.

Fabriquer l'énergie

Donald Trump aimerait contrer l'inflation en augmentant la production d'énergie. Il envisage de nouveaux pipelines et le retour de la fracturation hydraulique sur des terres fédérales. De nouveaux projets d'exploitation (pétrole et gaz) peuvent être attendus dans la réserve naturelle arctique, en Alaska.

"Il veut déporter 12 à 13 millions d'illégaux, mais ça semble impossible dans la pratique."

Tanguy Struye
Politologue (UCLouvain)

Stop immigration

C'est le mantra du populiste: fermeture des frontières, stop à l'immigration. Il souhaite chasser du pays les "millions de criminels" entrés illégalement. Comment? On sait juste qu'il s'aiderait de la garde nationale. 

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"Il veut déporter 12 à 13 millions d'illégaux, mais ça semble impossible dans la pratique", juge Tanguy Struye. "Il n'y a pas la place pour mettre toutes ces personnes en détention. Et cela ferait s'écrouler l'économie américaine. Ces personnes travaillent surtout dans l'agriculture et les restaurants, deux secteurs dans lesquels les Américains ne veulent pas travailler…"

  L'inconnue autour de l'IVG

 Quel est vraiment l'avis de Trump sur l'avortement? Alors qu'il y paraissait favorable, il s'est montré conservateur sur le sujet. Il avait soutenu la décision des juges conservateurs de la Cour suprême, laissant à chaque État le choix de sa législation en la matière.

Et pour ajouter à la cacophonie, son épouse Melania défend le droit à l'avortement avec ferveur dans son autobiographie.

"Trump a promis de résoudre le conflit en Ukraine. Mais comment? Au détriment de quels intérêts? Avec quelles conséquences?"

Tanguy Struye
Politologue (UCLouvain)

 L'isolationnisme trumpiste

En matière de politique étrangère, on connaît les principes isolationnistes du trumpisme et son rejet du concept de "communauté internationale". Les relations du futur président populiste avec les dictateurs, tels que Poutine ou Kim jong-Un aussi. Cela influencera immanquablement les relations internationales de ce nouveau mandat.

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Donald Trump soutient fermement Israël. Alors que la relation entre les deux hommes a soufflé le chaud et le froid selon les événements, il a accueilli Benjamin Netanyahou chez lui à Mar-a-Lago, en Floride, cet été. Et il a promis de faire "tous les efforts" pour ramener la paix au Moyen-Orient.

 Concernant l'invasion russe en Ukraine, il a souvent critiqué l'aide financière accordée par les États-Unis à Kiev, ce qui fait craindre un sérieux appauvrissement de cet appui. Il avait aussi promis de régler ce conflit "en 24 heures".

"Il a promis de résoudre le conflit en Ukraine, rappelle Tanguy Struye. Mais comment? Au détriment de quels intérêts? Avec quelles conséquences?"

Climat: retour en arrière

En arrière toute sur les efforts climatiques lancés par Joe Biden: voici ce qu'il faut attendre... Donald Trump souhaite supprimer une série de législations en faveur du climat et il réclame toujours le retrait de son pays de l'accord de Paris sur le climat.

Il veut booster la production d'énergie fossile, supprimer la prime de 7.500 euros offerte à l'achat d'un véhicule électrique...

Quid des procès?

Le nouveau président est impliqué dans plusieurs affaires au pénal, et il pourrait rapidement prendre des décisions touchant ses propres dossiers judiciaires.

Dès qu'il sera investi, il pourra ainsi ordonner l'arrêt des poursuites fédérales à son encontre.

Seule l'affaire Stormy Daniels ne dépend pas du niveau fédéral, mais de la justice de l'État de New York. Cela implique qu'un président ne peut y toucher. Trump a, ici, été reconnu coupable de 34 délits de falsification de documents comptables. Le prononcé de la peine est prévu le 26 novembre. Il pourrait être condamné à de la prison ferme, mais un sursis probatoire semble plus probable.

Le résumé
  • Donald Trump compte abaisser les impôts des particuliers, notamment des plus riches, et des sociétés.
  • Il veut imposer des droits de douane importants sur les produits importés, notamment d'Europe et de Chine.
  • Il voudrait chasser des États-Unis 12 à 13 millions de migrants illégaux.
  • Mais il n'a pas proposé de plan précis pour tout ceci. Ni pris la mesure des conséquences d'un tel programme.
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