Publicité

Le métier d'enseignant est-il réellement pénible?

© /Hollandse Hoogte

Alors que le gouvernement prévoit de réformer les pensions des enseignants, la question de la pénibilité du travail se pose, surtout lorsqu'on sait que deux profs sur trois quittent le métier dans les cinq premières années de carrière.

"Les profs ont trop de congés" - "Ils travaillent à peine une vingtaine d’heures par semaine"...

Le métier d’enseignant n’a pas bonne presse. A tort ou à raison? L’Echo fait sauter les tabous. Notre enquête.
Les profs ont-ils vraiment raison de se plaindre?

 

Publicité

"Un enseignant devra travailler deux ans de plus pour toucher 11.000 euros de pension en moins chaque année " s’indignait Frédéric Daerden, député PS, au début du mois d’août. Il réagissait à la parution d’une note interne au gouvernement qui visait, entre autres, à modifier le calcul de la pension, mettre fin progressivement à la bonification des diplômes ainsi qu'à de supprimer le régime de tantièmes préférentiels. Ces mesures, déjà annoncées lors de l’arrivée du gouvernement Michel, devraient permettre à ce dernier d’économiser 57 millions d’euros sur les pensions publiques en 2016.

"Le métier est difficile, surtout pour les plus âgés. Il n’y a plus de punition. La société de punit plus"

Mamadou Diagne
Enseignant

Si ce projet est mis en place, le métier d’enseignant n’aura plus beaucoup d’avantages concernant la retraite. Un coup dur pour le moral des jeunes enseignants, dont le pays est pourtant en pénurie.

Vous avez dit pénible ?

On peut se demander si le professeur a réellement le droit d’avoir un régime préférentiel pour sa pension. Dès lors, La question à poser est simple: le métier d’enseignant est-il réellement pénible?

Et qu’est-ce que la "pénibilité", exactement? Car n’importe quel travail pourrait être qualifié de pénible, et aucune liste officielle n’a été dressée.

Publicité

En théorie, un métier pénible l’est quand les travailleurs risquent une détérioration de la santé, éprouvent une difficulté à effectuer la même tâche sur le long terme, subissent une invalidité due au travail et voient leur espérance de vie diminuer. Pas très joyeux tout ça. En Belgique, on parlera plutôt de métier "lourd", mais les critères sont encore plus précis et restrictifs. Pas étonnant, car lorsqu’on exerce un métier lourd, on peut prétendre à un départ anticipé à la retraite, ce que  le gouvernement veut éviter.

©Kristof Vadino

Évidemment, les professeurs ne sont pas soumis aux mêmes conditions de travail selon la zone géographique et l’école où ils exercent. "C’est forcément plus simple dans une école où les élèves sont triés sur le volet!" affirme d’emblée Julie (nom d'emprunt, elle souhaite garder l'anonymat), enseignante dans une école bruxelloise considérée comme "difficile". Elle est d’ailleurs en procès contre la direction pour harcèlement, c’est vous dire.

Des absences dues au stress

2/3
En Belgique francophone, deux profs sur trois quittent le métier en début de carrière.

Statistiquement, plus de 40% des jours d’absences sont directement liés au stress - induits en partie par les élèves - et aux problèmes psychologiques. Et pourtant, une étude de Christian Maroy (GIRSEF, UCL) intitulée "Radioscopie du monde enseignant" met en avant que la principale motivation des professeurs est "le travail et la relation avec les élèves", avant même l’intérêt pour la matière enseignée, qui ne vient qu’en deuxième position. C’est dire l’importance d’une bonne relation avec les élèves, qui réduit le stress. Une bonne relation qui semble de plus en plus difficile à maintenir.

Les conditions de travail ont évolué. "La salle de classe n’est plus un sanctuaire. S’ils ont un problème à régler, les élèves le font tout de suite", nous dit Mamadou, professeur d’une cinquantaine d’années. Même s’il est plutôt content de son métier et de l’école réputée difficile dans laquelle il exerce, il concède que "le métier est difficile, surtout pour les plus âgés. Il n’y a plus de sanction. La société ne punit plus". Un constat plus que confirmé par Loyola et Julie, qui dénoncent le côté "administratif" des punitions actuelles. Et les exclure du cours? "Ils ne demandent que ça!" s'esclaffe Julie. "L'enseignant est responsable en cas d'échec des élèves, culpabilisé par la direction, montré du doigt par les parents". Une situation qui colle avec la hausse des burn-outs constatés dans la profession.

Une étude de l’université de Bordeaux menée entre 2008 et 2011 auprès de 744 enseignants en début de carrière montre que près de la moitié d’entre eux souffrent d’épuisement professionnel. Loyola, jeune prof de néerlandais à Anderlecht, dans sa première année d’exercice, déclare avoir déjà pris des relaxants. Son médecin lui a conseillé de changer d’école. C’est ce qu’elle fera pour l’année 2015-2016. Travailler jusqu’à 67 ans comme ça ?  " De là façon où je le vis cette année, certainement pas " nous dit-elle.

Un métier exigeant, épuisant même. Mais Mamadou, l’optimiste, nuance : "Ce qu’on ne dit jamais, c’est que les professeurs existent parce qu’il y a des jeunes. Et dans une école difficile, il y a plus de profs, c’est grâce à cela qu’on est là. On existe grâce à ces jeunes".

Alors, pénible d’être prof? Oui, peut-être plus qu’auparavant. Les conditions de travail ont fortement évolué. Mais le type d’école et la zone géographique restent des facteurs très importants à prendre en compte. Enfin, une chose est sûre, si la motivation fond comme neige au soleil, la pénurie de professeurs ne sera que plus forte, ce qui détériorera les conditions de travail des autres, et c'est le cercle vicieux qui se met en place. Sans oublier que les coupes budgétaires ne favorisent pas l'amélioration de ces conditions et des perspectives d'avenir, ça se saurait.

©Photo News

Publicité
Le président du MR Georges-Louis Bouchez.
Sans le PS, le MR teste la piste du gouvernement minoritaire
Sachant qu'il ne possède pas une majorité au parlement bruxellois, le MR va mettre les prochaines heures à profit pour aller chercher du soutien, sans doute auprès de DéFI et d'Ecolo.
Messages sponsorisés