Les entreprises qui ne respectent pas les règles sanitaires seront fermées
Les employeurs qui n’autorisent pas télétravail et permettent à leur personnel de travailler dans des conditions dangereuses, en ne respectant par exemple pas la distance de 1,5 m entre chaque employé, seront traduits en justice et traités sévèrement, a annoncé le Collège des procureurs généraux.
Les auditeurs du travail du pays auront pour instruction de procéder à la fermeture des entreprises récalcitrantes et, si besoin, de les poursuivre devant la justice pénale. "Le Collège des procureurs généraux a décidé ce jeudi que nous devions appliquer strictement les règles Covid-19 sur le lieu de travail", indique Danny Meirsschaut, auditeur du travail de Gand et président du Conseil des auditeurs du travail du pays.
"L’employeur doit intervenir immédiatement. S’il ne le fait pas, nous devrons ordonner la fermeture beaucoup plus rapidement qu’en temps normal." Si un employé a subi un dommage de santé, les auditeurs du travail pourraient poursuivre au pénal, étant en mesure de requérir des peines allant jusqu’à trois ans de prison.
Cette annonce intervient alors que, dans le domaine de la construction, le débat fait rage entre ceux qui ont fermé, revendiquant le statut de force majeure pour tous les ouvriers du secteur, et ceux qui, se retrouvant aujourd’hui avec des chantiers à l’arrêt, estiment que c’était aller un peu vite en besogne.
7 entreprises fermées par l'inspection du travail
Certaines entreprises belges ne respectent pas pleinement les mesures de prévention dans le cadre de la lutte contre la propagation du coronavirus Covid-19, ressort-il des chiffres de la ministre fédérale de l'Économie Nathalie Muylle (CD&V).
L'inspection du travail a reçu, entre le 23 et le 25 mars, 176 plaintes relatives aux mesures de prévention imposées dans le cadre de l'épidémie, rapportent plusieurs journaux flamands. Un contrôle téléphonique a été effectué auprès de 245 entreprises, et les inspecteurs ont rendu visite à 96 sociétés.
Des infractions ont été constatées chez 84 d'entre elles. Septante-sept entreprises ont reçu un avertissement et devront fermer leurs portes si une nouvelle plainte les concerne. Dans une large proportion, un délai leur a été imposé pour se mettre en ordre. Dans le cas de sept entreprises, l'inspection a toutefois noté qu'aucune mesure n'avait été prise, et a ordonné leur fermeture.
"Nous savons qu'il y a beaucoup d'entreprises qui respectent avec soin les mesures de prévention, mais les plaintes sont alarmantes et les résultats des contrôles ne sont pas bons", a commenté la ministre Nathalie Muylle (CD&V). "Aller travailler est très important, mais cela doit se passer de manière sûre (...). La situation est trop grave que pour faire preuve de nonchalance avec la santé des personnes sur le lieu de travail", ajoute-t-elle.
Entreprises de construction et donneurs d'ordre dos à dos
Très rapidement, avant même l’annonce par le Fédéral des mesures de confinement, plusieurs entreprises majeures de construction – dont Willemen puis Thomas & Piron – ont débrayé, arguant de l’impossibilité de poursuivre leurs activités en respectant les consignes sanitaires. Cet arrêt brutal a fait rapidement réagir l’Union professionnelle du secteur immobilier (Upsi), qui représente les principaux promoteurs, lotisseurs et investisseurs immobiliers du pays. Son administrateur délégué Olivier Carrette a pris, dès lundi dernier, contact avec son homologue de la Confédération Construction, Robert de Mûelenaere. Un premier contact téléphonique informel. Mais dès mercredi, un courrier officiel - pas piqué des hannetons - suivait.
Gant de velours mais poigne de fer
Si la missive évoque le dialogue et se dit "constructive", le ton est musclé. Jugez-en: "La crise actuelle touche de plein fouet le secteur de la construction; et nous en sommes bien conscients. Néanmoins, nous ne pouvons accepter une remise en cause unilatérale des accords contractuels signés entre parties; notamment la fermeture des chantiers, le report de la livraison des bâtiments et l’augmentation des coûts de construction", balance Olivier Carrette.
"Quand des pans entiers de notre économie sont sur le flanc, c’est un manque de civisme d’arrêter une activité autorisée qui peut être exécutée dans le respect des consignes d’hygiène et de distanciation"
"Qu’on se comprenne bien: nous souhaitons nous profiler comme partenaire constructif, collaborer et trouver des solutions acceptables pour toutes les parties", insiste-t-il. Avant de rebondir: "La situation actuelle dans le secteur de la construction ne peut nullement être qualifiée de cas de force majeure", en faisant ensuite référence à la jurisprudence et à plusieurs jugements en cassation.
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"Manque de civisme"
Un des premiers à être sorti du bois via les réseaux sociaux sur le sujet, c’est Gaëtan Hannecart, le patron de Matexi, la plus importante société de promotion résidentielle du pays. "Je suis le premier à dire qu’il faut protéger notre personnel et ralentir la propagation du coronavirus en faisant travailler le personnel à domicile si possible. Mais on ne sait pas gérer un chantier de son domicile. Nos collaborateurs se battent pour maintenir nos chantiers en activité dans le respect des règles. Malheureusement, ça devient très compliqué parce que bon nombre d’entreprises de la construction ont arrêté unilatéralement leur activité même là où il est techniquement possible de continuer", insiste-t-il.
"L’heure n’est pas à la musculation. Si je peux en comprendre l’esprit, je trouve le ton de la lettre de l’Upsi vraiment malvenu dans les circonstances particulières que nous vivons."
Il rappelle d’ailleurs avoir recommandé à son personnel de travailler à domicile avant même que le gouvernement l’impose. "Mais, poursuit-il, il est capital que nous contribuions tous, dans le respect le plus strict de la légalité, à faire tourner l’économie. Je considère que, maintenant que des pans entiers de cette économie sont sur le flanc, c’est un manque de civisme d’arrêter une activité autorisée qui peut être exécutée dans le respect des consignes d’hygiène et de distanciation. Cela nuit à notre économie, engendre des coûts supplémentaires énormes pour l’État; et in fine, c’est nous tous qui allons payer l’ardoise. J’ose donc encore espérer qu’il y aura une prise de conscience collective et que les entreprises de construction qui ont cessé leur activité vont se remettre à travailler très rapidement."
"Penser solidaire"
Pour Louis Amory, propriétaire et patron du groupe de construction Maisons Blavier, il est impératif de penser solidaire dans toutes les situations critiques désormais rencontrées. "L’heure n’est pas à la musculation. Si je peux en comprendre l’esprit, je trouve le ton de la lettre de l’Upsi vraiment malvenu dans les circonstances particulières que nous vivons."
Il s’explique: "Dès l’annonce des mesures de confinement, j’ai demandé à mes ouvriers de se rendre sur chantier par véhicule séparé et de respecter les consignes fédérales. Puis je suis allé prendre la température sur le terrain. Et là, j’ai senti un désarroi auquel il faut pouvoir répondre. Même quand un carreleur qui travaille seul dans une maison vide vous dit qu’il a fait demi-tour parce qu’il avait peur."
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Il poursuit: "Prenons le temps et réfléchissons en termes de priorités. Si on doit rester dans une logique de confinement, il sera difficile pour énormément d’activités humaines sur chantier de reprendre avant le gros de la vague de contamination. Et ce n’est ni à l’employeur ni à l’employé d’être acculés dans une position où il doit être juge et partie. Il faut que le Fédéral, qui abat pour l’instant un travail titanesque et doit arbitrer les priorités au jour le jour, édicte le moment venu les travaux qui peuvent reprendre et ceux qui restent dangereux."
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