Une brique mobilière dans le ventre
Le secteur immobilier coté reste numériquement le plus important de la Bourse de Bruxelles avec 17 SIR, 4 développeurs immobiliers et quelques certificats immobiliers. Les perspectives et les actions préférées des spécialistes.
"À court terme, il se peut qu’une hausse des taux ait un impact sur le secteur. Mais sur le long terme, la corrélation est faible."
Frank Vranken | Stratégiste en chef chez Puilaetco Dewaay Private Bankers
Quels sont les principaux attraits des sociétés immobilières?
Au vu de la faiblesse des rendements obligataires, les sociétés immobilières restent une véritable alternative pour les investisseurs à la recherche de rendement, même après déduction du précompte de 30%. La conjoncture reste favorable avec un taux d’occupation élevé, ce qui est l’assurance que le dividende sera versé. Depuis le début de 2018, le secteur s’est nettement mieux comporté que la cote belge dans son ensemble, avec toutefois des performances très différenciées au niveau des sous-secteurs, entre la logistique et l’immobilier commercial.
Une hausse des taux affecterait-elle le secteur?
À court terme, il est possible qu’il y ait un impact. Mais sur le long terme, la corrélation est faible, en particulier si la hausse des taux est provoquée par une accélération de la croissance. En outre, la plupart des sociétés se sont couvertes contre un éventuel impact d’une hausse des taux. Les sociétés belges sont aussi limitées dans l’endettement qu’elles peuvent contracter, au contraire des immobilières d’autres pays européens. Le risque d’une faillite est donc relativement faible. Il y a aujourd’hui des valeurs qui sont tombées à des niveaux de valorisation extrêmement attractifs avec des rendements qui dépassent souvent 6%.
Quelles sont vos valeurs immobilières préférées?
Un groupe comme Ascencio est aujourd’hui ridiculement bon marché, avec un rendement qui dépasse 7% et peu de danger que le dividende ne soit pas versé. Wereldhave Belgium ou Retail Estates sont d’autres sociétés qui affichent des décotes très importantes dans l’immobilier commercial. Dans la logistique, un groupe comme Intervest Offices & Warehouses est en train de clairement se retourner après avoir réglé ses problèmes de vacances locatives dans les bureaux. Enfin, il est toujours intéressant de détenir des sociétés actives dans le secteur résidentiel, qui reste le plus défensif. Les rendements y sont moins intéressants, mais ils sont peu affectés par la conjoncture économique. Dans ce domaine, nous apprécions des groupes comme CP Invest ou Aedifica.
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"Plusieurs segments du marché immobilier sont aujourd’hui dans une dynamique d’expansion internationale, comme la logistique, les maisons de repos ou les kots étudiants."
Jean-Marie Caucheteux | Analyste du secteur immobilier chez Degroof Petercam
Quelles sont les dynamiques en cours dans le secteur?
Plusieurs segments du marché immobilier sont aujourd’hui dans une dynamique d’expansion internationale, comme la logistique, les maisons de repos ou les kots étudiants. Le marché national est vu comme mature, par rapport notamment aux Pays-Bas, qui offrent encore beaucoup de débouchés. En outre, la législation y est moins pénalisante qu’en Belgique et les terrains disponibles sont beaucoup plus importants. À l’inverse, l’immobilier commercial est beaucoup plus centré sur le marché belge et est aujourd’hui dans une passe plus difficile.
Quelles sont les thématiques attrayantes?
Le vieillissement de la population entraîne une croissance de la demande de lits dans les maisons de repos pour les prochaines années. Ceci constitue une opportunité pour des groupes actifs sur ce segment. De même, les kots d’étudiants sont une spécificité belge qui est appelée à se développer un peu partout en Europe. Dans l’ensemble, nous continuons à privilégier les zones de croissance sans risque, telles que la logistique ou les soins de santé.
Est-il trop tôt pour revenir sur l’immobilier commercial?
Tout d’abord, il faut noter que la morosité dans ce secteur n’est pas une spécificité belge, mais concerne l’ensemble des groupes européens, qui doivent faire face à un recul de leur fréquentation. Les décotes sont aujourd’hui assez terribles, alors que ces groupes affichaient encore des primes il y a quelques années. Quant à revenir sur le secteur, c’est une question que nous nous posons souvent, mais nous n’avons pas encore identifié de facteurs qui permettent de restaurer la confiance dans ce segment.
Et pour l’immobilier de bureaux?
Il y a une révolution en cours, avec une augmentation de la demande d’espaces de co-working, qui commence à peser fortement. Il n’y a aujourd’hui plus tellement de gros locataires en mesure de louer de grands ensembles dans le centre de Bruxelles, à l’exception des administrations européennes. Nous pensons que le marché a mangé son pain noir.
"Il y a deux ans, le secteur était cher avec une prime moyenne de 25% par rapport à la valeur d’inventaire. Depuis, une correction a eu lieu."
Dirk Peeters | Analyste chez Leleux Associated Brokers
Le secteur immobilier est-il cher?
Il y a deux ans, il était cher avec une prime moyenne de 25% par rapport à la valeur d’inventaire. Depuis, une correction a eu lieu, avec des portefeuilles qui ont continué à augmenter, tandis que les cours corrigeaient sur certains segments. C’est dans l’immobilier commercial que cette correction a été le plus visible, la plupart des actions de ce segment étant affectées par les craintes d’une concurrence accrue de la part des acteurs du commerce en ligne. Sur les cinq prochaines années, je n’ai pas beaucoup d’inquiétude sur le maintien du dividende de ces sociétés.
Quel sera l’impact d’une hausse des taux?
Les taux obligataires sont une composante qu’il faut nécessairement tenir à l’œil lorsqu’on s’intéresse au secteur immobilier. Si la hausse des taux est liée à des tensions inflationnistes, l’impact est relativement modeste, car les groupes immobiliers ont généralement la capacité de répercuter la hausse des prix sur les loyers. Par contre, si la hausse des taux est liée à un facteur comme une crise politique au niveau de la zone euro, l’impact à court terme sera beaucoup plus dommageable. Dans la réalité, il est probable que nous aurons un peu des deux, mais les groupes immobiliers ont généralement mis en place des couvertures afin de limiter l’impact, de sorte que les dividendes pourront être maintenus, voire relevés. En cas de correction, les sociétés les moins liquides ont tendance à être moins affectées.
Quelles sont les meilleures opportunités actuelles?
Dans le secteur de l’immobilier commercial, Retail Estates constitue la meilleure opportunité. La direction a commis moins d’excès pendant la période de baisse des taux, le coût de financement a fortement diminué et le groupe est géré de manière assez conservatrice. Xior est notre valeur préférée dans l’immobilier résidentiel, avec un profil différencié et une stratégie de croissance, ainsi que Home Invest ou Aedifica dans les maisons de repos. Enfin, dans le secteur de la logistique, j’apprécie les perspectives offertes par Intervest Offices & Warehouses, qui affiche une valorisation nettement plus attractive que les autres groupes cotés.
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