Manifestation nationale: "L'industrie a besoin d'investissements, même Mario Draghi le dit"
Ils étaient 5.000 selon la police, plus de 10.000 selon les syndicats, à manifester, ce lundi, dans les rues de Bruxelles en solidarité avec les travailleurs d'Audi Brussels et pour réclamer une politique industrielle européenne porteuse d'avenir.
"Quand l'industrie tousse, c'est toute l'économie qui est malade!" Sur le podium installé place du Luxembourg, avec le Parlement européen dans son dos, Thierry Bodson harangue les milliers de manifestants qui ont fait le déplacement ce lundi à l'appel du front commun syndical.
Le président de la FGTB déroule: "La souveraineté industrielle est essentielle pour notre prospérité. On n'a pas besoin d'austérité, mais d'un plan d'investissement massif qui ne soit pas un chèque en blanc pour les entreprises, mais qui soit conditionné!" Il égrène la liste des fermetures intervenues depuis le début de l'année dans le secteur industriel.
Au premier rang desquelles: Audi Brussels. Certes, la fermeture n'est pas encore certaine. Mais une sérieuse hypothèque est placée sur les 3.000 emplois du site de Forest, sans compter les centaines de sous-traitants dont l'activité en dépend.
Les sous-traitants très remontés
"La direction d'Audi fait comme si on n'existait pas! On réclame donc les mêmes conditions que les travailleurs d'Audi en cas de plan social."
Ces derniers réclament à cor et à cri d'être pris en compte dans le plan social. Présents en délégation, ils sont parmi les plus vocaux dans les rues de Bruxelles ce lundi. "La direction d'Audi fait comme si on n'existait pas! Mais certains travailleurs des cinq sous-traitants opérant à Forest étaient déjà là à l'époque de VW. On réclame donc les mêmes conditions que les travailleurs d'Audi en cas de plan social", explique Jamal El Yakoubi, permanent CSC Metea.
Cela fait quatre semaines que ces 500 travailleurs sont au chômage économique, sans salaire donc. Après quatre autres semaines de fermeture collective de l'usine. "C'est dur pour ces familles, mais elles tiennent bon parce qu'elles ne veulent pas passer à la trappe!"
"En 2007, on pensait encore avoir un avenir. Aujourd'hui, on pense qu'il n'y en a pas..."
Du côté des travailleurs d'Audi, c'est plutôt le fatalisme qui semble l'emporter. Jean-François opère dans le département peinture. C'est un ancien. Il est actif sur le site depuis 1985. Il a connu la restructuration de 2007-2008, quand Volkswagen Forest est devenue Audi Brussels.
"C'est surtout triste pour les jeunes, qui ont encore un prêt à payer, des enfants à élever. En 2007, on pensait encore avoir un avenir. Aujourd'hui, on pense qu'il n'y en a pas", déplore-t-il. "Nous, avec 3.000 travailleurs, on peut produire 50.000 voitures par an. Les Chinois installent une usine en Turquie capable de produire 150.000 voitures avec 5.000 travailleurs." Impossible de rivaliser.
"Si même Mario Draghi, l'ancien patron de la BCE, dit que l'industrie a besoin d'investissements, mais que c'est incompatible avec l'austérité..."
"Même Draghi le dit"
La problématique dépasse largement le cas d'Audi Brussels et même du secteur automobile. C'est toute l'industrie européenne qui tire la langue, prise de vitesse par la concurrence chinoise, mais aussi américaine, dopées aux subsides publiques.
Que peut, que doit faire l'Union européenne? On n'aura jamais entendu autant de représentants syndicaux se revendiquer d'un banquier, Mario Draghi en l'occurrence, dont le rapport sur la compétitivité des entreprises européennes est abondamment cité.
"Si même lui, l'ancien patron de la BCE, dit que l'industrie a besoin d'investissements, mais que c'est incompatible avec l'austérité", constate Esther Lynch, secrétaire générale de la Confédération européenne des syndicats. Elle espère un sursaut européen. "Il s'agit de choix difficiles. Mais va-t-on faire payer une fois de plus la crise aux plus pauvres? Ce serait un scandale!" Les syndicats ont sollicité une rencontre avec Ursula von der Leyen pour leur faire part de leur point de vue.
Des représentants d'IG Metall, le puissant syndicat allemand, des Polonais de Solidarnosc et des métallos italiens défilent également ce lundi. Il y a un moment à saisir, pressentent-ils. Cette manifestation pourrait n'être qu'un début d'un mouvement plus large, à entendre les syndicats, qui promettent de nouvelles actions s'ils ne sont pas entendus ou si "la note De Wever - Bouchez" devient réalité.
- Entre 5.000 et 10.000 personnes ont manifesté ce lundi à Bruxelles en soutien à Audi Brussels et pour réclamer une politique industrielle porteuse d'avenir.
- S'appuyant sur le rapport Draghi, les syndicats veulent mettre la pression sur la Commission européenne pour qu'elle choisisse la voie des investissements et non celle de l'austérité.
- "Va-t-on faire payer une fois de plus la crise aux plus pauvres? Ce serait un scandale!", estime Esther Lynch, secrétaire générale de la Confédération européenne des syndicats.
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