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analyse

Jean Faniel (politologue): "Après la démission de De Wever, la N-VA pourrait désormais se raidir"

Bart De Wever a pris le temps de faire un selfie avec son fils avant d'aller chez le Roi. ©BELGA

Game over pour De Wever. Le MR n'a pas accepté "l'ultime" proposition de compromis du formateur, qui a démissionné. Le Palais va relancer des consultations avec les partis de l'Arizona.

L'Arizona aura-t-elle bien été un horizon désertique? La tonalité des déclarations de plusieurs présidents des partis à la table de négociations le laisse en tout cas penser: cette coalition à cinq est peut-être bel et bien enterrée.

Paradoxalement, il n'y a à ce stade que Georges-Louis Bouchez, le président du MR, pour tempérer la gravité de la situation: "Le fait de ne pas y être encore parvenu n’est en rien un constat définitif", assure celui qui avait respecté jusqu'ici une inhabituelle discrétion par rapport aux discussions en cours.

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"Nous avons refusé sur la base d'une vue globale et pas seulement sur les plus-values"

Une source libérale

Le MR se défend

Est-ce à dire qu'il y croit encore véritablement? Ou qu'il tente, peut-être en vain, une pirouette pour esquiver le "zwarte piet", le rôle du fautif, que d'autres tenteront forcément de lui coller dans le dos? Dans la séquence qui s'achève, Georges-Louis Bouchez a inévitablement un rôle central, lui qui a refusé les concessions que le formateur De Wever avaient consenties à Conner Rousseau et Vooruit, parti le plus à gauche de l'attelage Arizona, autour d'une taxe sur les plus-values.

Au MR, on se défend d'avoir bloqué uniquement sur ce point. Il faut à cet égard rappeler que Bouchez n'avait pas hurlé lors de la première version de la "super-note" de De Wever, qui contenait déjà l'idée d'une telle taxe. Ce sont, disent les libéraux francophones, les concessions ultérieures qui se sont ajoutées à ce qui était déjà une concession majeure dans leur chef, qui ont provoqué la crise. "Nous avons refusé sur la base d'une vue globale et pas seulement sur les plus-values", assure un libéral proche des négociations. Il cite: une TVA alourdie sur les produits de première nécessité, des accises plus élevées sur l'essence et plus d'impôts pour les PME.

Mais dans les autres partis à la table, singulièrement au nord du pays, ces arguments ne passent pas. Pour la Flandre, le seul coupable, c'est bien le président du MR, accusé d'avoir fait des contre-propositions s'apparentant à des "provocations".

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"Ce que veut faire Georges-Louis Bouchez n'est pas limpide. Il a peut-être été dépassé par ce qu'il pensait obtenir."

Jean Faniel
Politologue (Crisp)

Clap de fin pour l'Arizona?

C'est donc au Palais de trouver la formule suivante. Exit De Wever, dont la démission a été acceptée par le Roi jeudi soir. Est-ce pour autant la fin du scénario voyant le président des nationalistes flamands incarner l'unité fédérale sachant que le Roi va entamer de nouvelles consultations des cinq partis dès ce vendredi?

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"Il sera désormais compliqué de faire advenir la formule qui paraissait la plus évidente, mais on n'est pas forcément au terme de la négociation, estime Jean Faniel, politologue et directeur général du Crisp. Cela étant, l'idée que ça allait aller relativement vite, qui prévalait au soir des élections, et puis quand Bart De Wever a cité la date du 20 septembre pour la formation d'un gouvernement, est sérieusement remise en cause."

Pourtant, dit le politologue, les ingrédients du blocage actuel étaient en germe dès le départ. Notamment un legs de la Vivaldi: l'inimitié entre Conner Rousseau et Georges-Louis Bouchez.

Sur le fond, aussi, il n'y avait rien d'évident à voir Vooruit accepter d'entrer dans une coalition où il était le seul parti penchant à gauche. Bart De Wever l'avait bien compris, offrant une série de concessions aux socialistes flamands. Ce qui a provoqué en retour le refus du MR. Et voilà donc le blocage. Comment en sortir? "Ce que veut faire Georges-Louis Bouchez n'est pas limpide. Il a peut-être été dépassé par ce qu'il pensait obtenir", s'interroge Jean Faniel.

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"La N-VA pourrait désormais se raidir."

Jean Faniel
Politologue (Crisp)

La fin du momentum

Ajoutons que ces difficultés, entre partenaires pressentis de la coalition semblant la plus évidente, interviennent alors qu'ils n'avaient pas encore affronté la montagne budgétaire, pas plus que l'éléphant institutionnel. Cela illustre d'autant plus que contrairement à ce qu'elle pouvait paraître sur papier, la confection de l'Arizona n'avait rien d'une promenade de santé.

C'est donc la fin du momentum post-élections au niveau fédéral. "On ne peut pas présager de l'avenir. Mais des choses sont inévitablement abîmées. Ce qui a pu être recousu entre Bart De Wever et Georges-Louis Bouchez vient d'en prendre un sérieux coup. La N-VA pourrait désormais se raidir", après avoir joué le jeu fédéral jusqu'ici, souligne le politologue.

Le PS peut-il revenir dans le jeu, si l'Arizona sèche? Les socialistes francophones ont opté pour l'opposition "a priori" partout, bien qu'ils négocient avec le MR à Bruxelles. "Bouchez aurait alors gaspillé une occasion en or, estime Jean Faniel. Il aurait alors gâché le consensus qu'il a imposé au sein du MR avec sa victoire et certains ne lui pardonneraient pas."

Le résumé
  • C'est le blocage entre les cinq partis qui négocient une coalition fédérale, dite Arizona.
  • Le MR se braque sur les nouvelles taxes qui figureraient dans "l'ultime" proposition de compromis formulée par Bart De Wever.
  • Le formateur a remis sa démission au Roi.
  • Une période d'incertitude s'ouvre.
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