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analyse

Négociations fédérales: blâmé par la gauche, Vooruit peut-il encore intégrer l'Arizona?

Conner Rousseau et Frank Vandenbroucke, les négociateurs de Vooruit, font face à un dilemme: ils ont les grandes forces de gauche contre eux... ©BELGA

Vooruit est malmené par la gauche politique et syndicale pour les concessions qu'il ferait afin d'intégrer une coalition Arizona. Quel est le calcul de Conner Rousseau?

Maxime Prévot, nommé médiateur par le Roi, consulte cette semaine les négociateurs des cinq partis intéressés par l'Arizona (N-VA, MR, Engagés, Vooruit et CD&V). De lundi à mercredi, il a organisé des rencontres en tête-à-tête. Ce jeudi, il a réuni tout le groupe.

Les cinq présidents de partis se sont retrouvés pour la première fois depuis que Bart De Wever a fait un pas de côté, après avoir expliqué au Roi l'échec de sa mission de formateur.

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On connaît la cause principale des dissensions dans le quintette: la réforme fiscale, avec les modalités de la taxation sur les plus-values sur actifs.

Coincé par la gauche

Vooruit voit désormais les autres grandes forces de la gauche s'élever contre lui.

Le médiateur doit maintenant rapprocher les points de vue, surtout entre le MR et Vooruit, et tester la faisabilité de l'Arizona. Mais la position des socialistes flamands est particulièrement compliquée.

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D'abord parce qu'ils représentent le seul parti rouge de l'Arizona, face à du centre-droit et à de la droite affirmée. Ils savent depuis le début qu'ils risquent de passer cinq années à ramer pour empêcher une telle coalition de dériver à droite.

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Mais aussi parce que Vooruit voit désormais les autres grandes forces de la gauche s'élever contre lui: l'opposition politique — le frère francophone PS, l'extrême gauche PTB-PvdA, les verts — et le syndicat socialiste FGTB-ABVV. Miranda Ulens, présidente du syndicat, a lâché: "Je serais étonnée qu'un parti social soutienne ce projet", après les fuites de la "super note" de De Wever dans la presse.

À la vue de cette "super note", ceux-là en ont déduit que Vooruit avait accepté des éléments inacceptables pour eux.

Ce parti semble si coincé qu'on se demande pourquoi il continue à s'accrocher à une perspective d'Arizona. "Parce que les alternatives ne sont pas simples. Parce qu'en Flandre, Vooruit est le seul parti centripète qui a progressé aux élections; la N-VA, le CD&V et l'Open Vld ont reculé. Parce que dans le gouvernement flamand, Vooruit est quasi indispensable, or Bart De Wever souhaite des coalitions miroirs", énumère Pascal Delwit, politologue à l'ULB.

Une nouvelle note?

"Le calcul politique de Conner Rousseau semble mystérieux."

Pascal Delwit
Politologue (ULB)

"On ne voit absolument pas ce que Vooruit avait obtenu dans cette note. Il n'y a rien que la gauche puisse revendiquer quand on considère les mesures envisagées en matière de pensions, santé, TVA ou politiques publiques comme le rail", s'étonne Pascal Delwit. "Les marqueurs sont à droite sur le budget et la mobilité. Je ne crois pas que cela puisse être apprécié par l'électorat de Vooruit dans les grandes villes telles qu'Anvers, Gand ou Louvain."

Comment expliquer ce manque de marqueurs à gauche, alors que Vooruit est en position de force dans les négociations, qu'il se sait défié par Groen sur son électorat de classe moyenne, et par le PvdA du côté des classes populaires? "Vooruit espère-t-il des compensations au niveau de l'accord en Flandre, une forme d'échange? Mais quoi? Un ministère très important?" s'interroge le politologue de l'ULB. "Le calcul politique de Conner Rousseau semble mystérieux. Veut-il que le parti s'incarne en une personne? Cela ne marche qu'un temps, et il y a peu de chance pour que cela soit déterminant pour les communales d'octobre et le bilan dans 5 ans."

"À voir si le bureau, si le parti vont suivre Conner Rousseau. La sortie de l'ABVV va-t-elle les influencer?" envisage Pascal Delwit.

Il apparaît en tout cas très difficile de repartir sur la base de la même "super note" pour ravigoter l'Arizona. Mais Maxime Prévot pourra-t-il faire avaler aux autres partenaires la nécessité d'un nouveau schéma, plus marqué à gauche?

Nouvelles batailles en perspective

Avec toute cette fièvre à gauche, le redémarrage de l'Arizona risque de s'avérer compliqué.

Pour la suite des négociations, les socialistes flamands doivent réfléchir à leur positionnement. Ils devraient continuer à plaider pour une taxation accrue du patrimoine, puisqu'il n'y a que là qu'ils avaient déjà pu apposer leur empreinte. Ils avaient obtenu l'annulation de la baisse du précompte mobilier, qui avait été assortie à la taxe sur les plus-values pour obtenir l'adhésion du MR. Suite à ce gain de Vooruit, les libéraux francophones avaient coincé et la mission de De Wever avait capoté.

Avec toute cette fièvre à gauche, le redémarrage de l'Arizona risque de s'avérer compliqué. D'autant que l'aventure est désormais marquée du sceau de l'échec et que Bart De Wever et sa N-VA ne doivent plus endosser le rôle du conciliateur.

Maxime Prévot rencontrera le Roi lundi pour lui faire son rapport. Il pourra toujours demander une extension de son mandat. Mais pas trop longue, parce que l'enjeu des communales brouille déjà les radars du Fédéral.

Le résumé
  • Vooruit est fortement critiqué par l'extrême gauche et le syndicat socialiste pour sa participation aux négociations autour de la "super note" de De Wever.
  • Le projet de l'Arizona est nettement connoté à droite.
  • Pourtant, Vooruit, quasi indispensable, est en position de force.
  • Pourquoi les socialistes flamands n'imposent-ils pas des vues plus sociales?
  • Analyse avec Pascal Delwit, politologue à l'ULB.
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