Un quota de genre mort-né pour les dirigeants du Bel 20
Bien qu'Ecolo porte des quotas de genre ambitieux pour les principales sociétés cotées belges, la chance d'aboutir est maigre. Sur le terrain, les réalités sont contrastées, faute de cadre.
Les partenaires de la Vivaldi ont réagi avec surprise à la proposition de la secrétaire d'État à l'Égalité des genres, Marie-Colline Leroy (Ecolo), d'introduire un quota d'un tiers de femmes minimum au sein des comités de direction du Bel 20, en augmentant au passage de 33,3 à 40% celui des conseils d'administration déjà d'application pour les vingt principales sociétés cotées belges.
En effet, pareil seuil ne figurant pas dans l'accord de gouvernement, le projet a peu de chance d'aboutir. Selon plusieurs voix au Fédéral, il eut été préférable de consulter d'abord les acteurs concernés et les partenaires de la coalition avant de sortir du bois de la sorte.
"Le débat va maintenant avoir lieu, en ce compris à la table du gouvernement et avec le secteur."
Selon l'écologiste, il n'y avait pas de temps à perdre. "Cette question vit fortement dans la population. Le débat va maintenant avoir lieu, en ce compris à la table du gouvernement et avec le secteur lui-même." Marie-Colline Leroy renvoie d'ailleurs à la présidence européenne, où la Belgique doit "faire preuve d'ambition". Certains verront plutôt ici l'idée pour celle qui a pris ses fonctions fin avril, suite à la démission de sa prédécesseure Sarah Schlitz, d'obtenir des résultats d'ici aux élections de 2024.
Désaccords politiques
Les Verts et les socialistes soutiennent le principe. Pour le CD&V par contre, "il n'est pas nécessaire que le gouvernement s'en mêle", commente son président, Sammy Mahdi. Pour Georges-Louis Bouchez (MR), "c'est et cela reste un choix libre des actionnaires, qui doivent s'organiser eux-mêmes". Chez les libéraux flamands, on botte quelque peu en touche à ce stade.
Pour Marie-Colline Leroy, un quota n'est pas tant idéologique, que rendu obligatoire par une directive européenne qui "nous pend au nez". Selon la secrétaire d'État, il y est clairement stipulé que la Belgique doit introduire des quotas de genre d'un tiers dans les comités de direction et de 40% dans les conseils d'administration d'ici fin 2026. Pour autant, on entend dire au sein de l'exécutif que ladite directive est sujette à interprétation. "Elle laisse une marge de manœuvre et doit être examinée en profondeur", dit ainsi une source gouvernementale de haut rang.
Des hauts et des bas
Mais qu'en est-il dans la pratique? La part de femmes dans les conseils des sociétés du Bel 20 est aujourd’hui supérieure aux exigences légales. Près de quatre administrateurs sur dix sont ainsi des administratrices, ressort-il des données compilées par notre rédaction. Seules KBC (banque) et Cofinimmo (immobilier) pèchent, mais de peu (et sans sanction), quand neuf de leurs semblables satisfont déjà à l’objectif de plus de 40% de femmes.
Pour ce qui est des comités de direction par contre, les réalités sont bien plus contrastées en raison notamment de l’absence de quotas. Faute d’obligation, certaines sociétés comme Ageas (assurance) ou WDP (immobilier) ne présentent d’ailleurs même aucune femme parmi les principaux dirigeants de leur activité. Si un minimum d’un tiers devait être instauré aujourd’hui, un peu moins d’un de nos fleurons belges sur quatre seulement serait en règle.
Toutefois, et c'est peut-être là la question du verre à moitié vide ou à moitié plein, quatre entreprises surpasseraient le critère et deux l’atteindraient. Il en va respectivement d’argenx (biotech), Cofinimmo, Galapagos (biotech) et UCB (pharma) , et d’Umicore (métaux) et D’Ieteren (mobilité). Le secteur des sciences de la vie réussit de la sorte un sans-faute, puisque tous ses représentants figurent parmi les meilleurs élèves du Bel 20 et dépassent (parfois de loin) les 33% de femmes au sein de leur comité de direction. Mieux, Galapagos pourrait d’ores et déjà se targuer d’avoir atteint les 40%, et au sein de son top management, et au sein de son conseil.
Ceci étant dit, ces chiffres doivent être relativisés. En effet, au vu du nombre parfois très restreint de membres au sein d’un comité de direction, comme chez D’Ieteren (3 personnes) ou GBL (4) par exemple, les fluctations peuvent très vite être importantes. Ainsi, pour prendre le cas de Proximus (9 personnes), le départ de Dominique Leroy, en tant que CEO, et de Sandrine Dufour (passée chez UCB), en tant que CFO, aura eu vite fait de peser sur la performance de l’opérateur historique en matière de diversité de genre.
À cela, il convient évidemment encore de penser aux autres types de diversité, souligne-t-on chez Solvay (chimie), où Ilham Kadri, CEO, se retrouve bien seule parmi cinq hommes qui l'épaulent au comité exécutif. "La diversité des genres, des origines, des modes de pensée, des ethnies, des handicaps - visibles ou invisibles - est tout aussi importante", rappelle Peter Boelaert, porte-parole.
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