Soupçons d’espionnage: la Wallonie demande au Fédéral d’étayer ses soupçons vis-à-vis d’Alibaba
Le ministre wallon Adrien Dolimont vient d'écrire au ministre de la Justice pour lui demander de clarifier les soupçons à l'égard d'Alibaba à Liège.
Nouveau round de tensions dans le dossier Alibaba et ses soupçons d’espionnage à Liège. Ce qui remet le feu dans cette poudrière chinoise, c’est un article paru dans le journal britannique Financial Times (FT)la semaine dernière et dans lequel le géant chinois de l’e-commerce est à nouveau décrit comme étant une base avancée pour l’espionnage de la Chine en Europe à travers son hub logistique qu’il opère à Liège depuis 2018 via sa filiale Cainiao.
"Les services du renseignement belges surveillent la principale plateforme logistique d’Alibaba en Europe à des fins d’espionnage, car ils soupçonnent Pékin d’exploiter sa présence économique croissante dans les pays occidentaux", lisait-on dans le journal.
Ras-le-bol wallon
Il n’en fallait pas plus pour relancer le débat. Notamment au Parlement wallon ce mercredi. À la suite de la parution de l'article du FT, l’actuel ministre en charge des Aéroports en Wallonie, Adrien Dolimont (MR), a expliqué avoir interpellé son collègue de la Justice Vincent Van Quickenborne.
Dans son courrier daté de ce mardi 10 octobre, Adrien Dolimont remet sous le nez de Vincent Van Quickenborne un échange qu'il a eu avec son prédécesseur Jean-Luc Crucke le 4 juin 2021 dans laquelle le ministre de la Justice évoquait le fait que "la Sûreté de l’État a (…) affirmé qu’il n’y a pas d’indices de présence d’agents de renseignements chinois ou d’activités d’espionnage chez Alibaba à Liège", lit-on.
"Il faut arrêter de sortir sur ce sujet sans apporter des éléments probants. Soit, on nous fait part d’éléments probants qui étayent les soupçons, soit on passe à autre chose."
Face à une absence de preuves et de charges basées sur des soupçons de la part des renseignements belges, Andrien Dolimont demande au ministre de la Justice de clarifier la situation. "Si ce constat venait à être modifié, je vous prierais de bien vouloir m’en informer et de prendre tous les contacts nécessaires dans le cadre de la poursuite de la bonne coopération entre le Fédéral et la Région wallonne." Mais comme il l'a expliqué aux députés mercredi, "rien n'indique actuellement que le risque est bien existant et que la situation a changé."
Entre les lignes wallonnes, il faut y voir un certain ras-le-bol. "Il faut arrêter de sortir sur ce sujet sans apporter des éléments probants. Soit, on nous fait part d’éléments probants qui étayent les soupçons, soit on passe à autre chose. Mais il faut sortir de ces soupçons qui décrédibilisent l’aéroport de Liège", assure-t-on dans les couloirs du gouvernement wallon.
Les soupçons de la Sûreté
Ce n’est pas la première fois que les soupçons des renseignements belges à l’égard d’Alibaba sont relayés dans la presse. Mais comme le répète un proche du dossier en Wallonie "le problème est qu’il n’y a jamais eu d’éléments concrets. On en reste au stade des soupçons…"
"Nous n’avons jusqu’à présent pas d’indications concrètes relatives à la présence d’officiers de renseignements chinois sous couverture ni d’activités d’espionnage liées à Alibaba et sa filière logistique Cainiao."
Comme en mai 2021, lorsque la Sûreté interpelle Jean-Luc Crucke, aujourd'hui chez Les Engagés, mais alors ministre en charge de la politique aéroportuaire en Wallonie, concernant la présence d’Alibaba à l’aéroport de Liège. On y aborde des soupçons sans pouvoir les confirmer.
"Nous n’avons jusqu’à présent pas d’indications concrètes relatives à la présence d’officiers de renseignements chinois sous couverture ni d’activités d’espionnage liées à Alibaba et sa filière logistique Cainiao", soulignait la Sûreté dans son courrier que nous n’avons pas pu voir en intégralité en raison de son statut "classifié".
Nouveau round
Deux ans plus tard, en février 2023, un rapport rédigé par le professeur Jonathan Hoslag, de la VUB, au sujet d’Alibaba et de l’incapacité du service des douanes à assurer les contrôles à l’aéroport face à un système "pire que celui des trafiquants de cocaïne", relance ces éternels soupçons.
"Il serait pertinent de s’intéresser au problème des douanes dans les ports, dont le volume de marchandises est bien plus élevé."
Cette fois-ci, il poussera la direction de l’aéroport à faire part de son exaspération. "Nous avons pris connaissance de ce document qui comprend de nombreuses informations hasardeuses et non recoupées, ainsi que de nombreuses erreurs qui auraient pu être corrigées par l’auteur s’il avait pris contact avec les responsables de l’aéroport ou de la société visée", explique l’aéroport de Liège dans un courrier adressé au ministre Dolimont le 20 février 2023. L’aéroport conclura que ces "allégations selon lesquelles le projet Cainiao constituerait une menace pour la sécurité nationale belge sont infondées".
De là à y voir une campagne de dénigrement vis-à-vis de l’aéroport liégeois? En Wallonie, certains commencent à le croire et demandent au Fédéral de scruter ce qui se passe en Flandre. "Il serait pertinent de s’intéresser au problème des douanes dans les ports, dont le volume de marchandises est bien plus élevé", estime un acteur du dossier. En 2021, la Wallonie pointait le cas du terminal conteneurs du port de Zeebruges qui est aux mains de la société chinoise Cosco et qui "interpelle plus qu'un simple client d'un opérateur belge, comme l'est Alibaba par rapport à l'aéroport de Liège".
- Le ministre en charge des Aéroports en Wallonie vient d'interpeller son collègue de la Justice au sujet d'Alibaba en lui demandant de la clarté.
- Il fait référence à un article du journal FT qui relaye de nouveaux soupçons d'espionnage de la Chine à travers le hub d'Alibaba à Liège.
- Pour de nombreux acteurs du dossier en Wallonie, il serait temps que la Sûreté de l'État apporte des éléments probants.
- Le cas des douanes dans le port de Zeebruges qui est aux mains de la société chinoise Cosco, est montré du doigt.
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