Vers la fin des taxes anti-entreprises en Wallonie?
L’exécutif MR-cdH voudrait inviter les communes à geler certaines taxes, comme celle sur les enseignes publicitaires, qui pèsent sur le développement des entreprises sur le territoire.
En Wallonie, l’imagination des communes n’a pas de limite en matière de taxes. Il suffit de se plonger dans la longue liste officielle qui reprend plus de 70 taxes et redevances communales admises par l’autorité de tutelle pour découvrir l’inventivité de certains bourgmestres (lire l’encadré). On y trouve de tout.
La fin de la taxe sur les enseignes publicitaires?
Si l’existence de la majorité de ces taxes n’est pas menacée, le gouvernement wallon MR-cdH annonce du changement. On parle d’un grand nettoyage.
"Il faut évidemment veiller à ne pas priver les communes de revenus."
La ministre des Pouvoirs locaux Valérie De Bue (MR) veut profiter de l’envoi de la prochaine circulaire budgétaire, qui sera adressée en juin aux 262 communes wallonnes, pour faire disparaître certaines taxes communales et rétablir la "paix fiscale" sur le territoire wallon. "Il faut renégocier les conditions d’une vraie paix fiscale entre la Région wallonne et les communes", explique-t-on au cabinet de la ministre.
Cette paix fiscale vise en priorité les taxes qui frappent les entreprises. On les appelle les taxes "antiéconomiques".
Très concrètement, le cabinet de la ministre veut "décourager" les communes à lever des taxes antiéconomiques sur les entreprises. Il est aussi question de supprimer celles qui freinent l’implantation des PME sur une localité.
Si aucune liste n’est encore arrêtée, les radars du gouvernement s’intéressent en particulier à la taxe sur les enseignes publicitaires. "C’est une piste parmi d’autres. L’objectif est de décourager la taxation antiéconomique qui frappe les entreprises." On évoque également la taxe sur les éoliennes.
Marge de manœuvre limitée
Le sujet est forcément délicat. En voulant geler certaines taxes, la ministre touche ici au sacro-saint principe d’autonomie communal garanti par la Constitution.
Pour les municipalistes, il est forcément hors de question de renoncer à ce droit "d’autonomie" d’autant que les recettes issues de la fiscalité contribuent à près de 50% de leurs budgets communaux. D’après les chiffres de Belfius, sur un budget global de 5,1 milliards d’euros en 2017 pour l’ensemble des 262 communes wallonnes, la fiscalité pesait 2,5 milliards d’euros.
"Il ne doit pas y avoir d’impact sur les recettes communales. Il faudra dès lors augmenter d’autres taxes."
Pour agir, le gouvernement sait que sa marge de manœuvre est limitée. Voici pourquoi. À travers sa circulaire budgétaire envoyée aux communes, l’exécutif wallon peut rationaliser la liste des taxes et redevances admises ainsi que leurs taux maxima recommandés. Cette circulaire n’est cependant pas contraignante. Il s’agit tout au plus d’un simple avis sur lequel les communes peuvent s’asseoir. Et dans le cas où une commune voudrait lancer une nouvelle taxe, la Région ne pourrait pas se retrancher derrière les dispositions de la circulaire budgétaire pour la refuser. "Il faut évidemment veiller à ne pas priver les communes de revenus. Il s’agit plus d’opérer un glissement sur les sources de revenus sans que cela n’encourage non plus la création de nouvelles taxes", estime le cabinet De Bue.
Risque de vases communicants
Cela dit, du côté des municipalistes, on ne ferme pas la porte à la discussion. "Il y a une volonté partagée avec la Région wallonne de simplifier la nomenclature (la liste des taxes) de la fiscalité locale en en diminuant le nombre", explique l’Union des villes et communes de Wallonie (UVCW).
Si le lobbying communal se montre ouvert à la négociation, il avance déjà certaines conditions. "Il ne doit pas y avoir d’impact sur les recettes communales. Il faudra dès lors augmenter d’autres taxes. Et si on veut être parfaitement équitable, a priori, il faudra augmenter les recettes auprès des mêmes redevables (les entreprises) qui ont profité de la baisse d’autres taxes. Il semble difficile de reporter la charge sur les ménages", estime encore l’UVCW qui rappelle son droit d’autonomie face au gouvernement régional. "On ne peut pas empêcher une commune de reporter les recettes d’une taxe sur une autre taxe."
Chien, poney, piscine et corbillard
L’inventivité des communes n’a pas de limite en matière de taxes. Ainsi, posséder un chien dans certaines localités coûte 15 euros par an. Le prix du cheval est lui fixé à 50 euros par an, un montant ramené à 25 euros si l’équidé est mis en pension dans un manège. Le prix du poney est lui de 25 euros par an.
La mise à l’eau d’un kayak fait aussi l’objet d’une rentrée fiscale fixée entre 15 et 30 euros par embarcation. Pour une piscine privée ou un terrain de tennis, il en coûtera entre 200 et 500 euros. Le transport funèbre est aussi source de rentrées financières. Une commune demande par exemple 50 euros en cas de sortie du corps de la commune et 125 euros s’il entre dans la commune.
Sur le front économique, on découvre par exemple que dans une commune, la taxe pour l’installation d’une éolienne dont la puissance est inférieure à 2,5 mégawatts (MW) est fixée à 12.500 euros.
Concernant le cas des enseignes publicitaires, une grande ville fixe le montant à 22 euros par m² pour les enseignes et publicités non lumineuses. La facture monte à 33 euros si l’enseigne est lumineuse. Il faut en outre rajouter 6,2 euros par mètre courant pour les cordons lumineux qui ne font pas corps avec l’enseigne.
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