Dès le vendredi 17 mai 2024, l'Institut Royal Météorologique avait placé la province de Liège en alerte orange, prévoyant des cumuls de précipitations de 50 à 80mm sur 24 heures. Soit entre 6 et 9% des précipitations annuelles sur une seule journée.
Les évènements de précipitations extrêmes se multiplient sur notre territoire et une question s’impose:
Les Wallons sont-ils vulnérables face aux inondations?
Le territoire wallon est parcouru par 26.000 kilomètres de cours d'eau. Ce qui le rend particulièrement vulnérable, vu la forte artificialisation des sols et les aléas climatiques en augmentation.
La Wallonie est traversée par 4 districts hydrographiques. La Meuse, l'Escaut, le Rhin et la Seine.
40.000 personnes sont concernées par des inondations fréquentes selon les Plans de Gestion des Risques d'Inondation du Service Public de Wallonie (SPW). 80% d'entre elles se concentrent dans le bassin de la Meuse, qui a été victime des récentes inondations. Population en zone inondable
Dans le cas de scénario extrême , ce sont un demi-million de Wallons qui sont concernés par les débordements de cours d'eau. Population en zone inondable
On hérite d'une situation historique. On a autorisé des constructions sans règle spécifique et on en subit les conséquences aujourd’hui.
Directeur du Centre régional de Crise wallon
Il n'existe pas, pour l'heure, de chiffres sur l'impact du ruissellement, affectant des habitations potentiellement éloignées des cours d'eau (Photonews).
2021 reste gravé dans toutes les mémoires
En rouge, vous pouvez voir les zones inondées en juillet 2021, que nous avons superposées à la densité de population, en vert. Nous avons ainsi voulu quantifier le nombre de personnes qui ont été touchées lors de ces inondations extrêmes.
Selon nos calculs, un peu plus de 100.000 personnes ont été touchées par ces inondations. Soit 1 Wallon sur 30. Les cours d'eau ont parfois été au-delà de la zone prévue par les modèles, en bleu.
“Certains phénomènes locaux, comme un arbre en travers d'une rivière, peuvent altérer les modèles théoriques”, argumente Simon Riguelle.
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Les évènements de 2021 ont en effet surpris pas mal de monde. Ici, à Pepinster près de Liège où l’eau a envahi la ville (Pascal Bonnière).
“C'est un évènement qu'on n'imaginait pas rencontrer en Wallonie, en tout cas pas dans l'immédiat.”
Responsable du district de NamurModèles théoriques face à la pratique
La carte des aléas d'inondations du SPW nous renseigne sur le risque d'inondations, selon la récurrence et l'importance de celles-ci. Les zones bleues claires représentent un risque très faible, alors que les zones bleues foncées un risque élevé.
Nous sommes ici dans la Vallée de la Vesdre, largement touchée en 2021. Mais aussi par les récentes inondations.
Pour le climatologue de l'ULiège Xavier Fettweis, "c'est dans cette vallée que le risque est le plus grand en Belgique, à cause du relief des Hautes-Fagnes qui fait barrage aux nuages, et donc aux précipitations”.
À Trooz, par exemple, le zoning de Prayon ou le hall sportif sont entièrement en zone inondable. Pour rappel, le bleu le plus clair représente le risque le plus faible.
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À quelques kilomètres de là, le chocolatier Galler avait vu son atelier ravagé par les eaux en 2021 (Valentin Bianchi).
À Pepinster, particulièrement touchée, l'eau est montée à près de 4 mètres à certains endroits cette année-là.
Selon le SPW, chacun des sous-bassins des 4 districts “est exposé de manière significative à un risque potentiellement important d'inondation”.
Celles-ci ont un impact direct sur l'activité économique (certaines activités industrielles ont tendance à être situées dans le lit majeur des cours d'eau), touristique et sur les populations.
La charge des sinistres en 2021, supportée par les assureurs et les régions, a atteint 2,57 milliards d'euros selon Assuralia. C'est 7,5 fois plus que l'année précédente.
Pour l'instant, la prise en compte de l'impact du changement climatique se résume à augmenter l'ampleur des scénarios extrêmes. Il faudra du temps pour établir de nouveaux modèles fiables.
Les modèles ne tiennent donc pas compte des aléas climatiques récents, qui prédisent une augmentation de l'intensité des évènements pluvieux. Les inondations de 2021 se situent en effet hors des scénarios établis.
Si les communes wallonnes ont mis en place ou ont renforcé des actions concrètes pour protéger les citoyens, Benjamin Englebert met en garde:
“Si des crues comme celles de 2021 se reproduisent, on aura encore un souci. On ne peut déplacer tout le bâti.”
Responsable du district de NamurLa montée des eaux la semaine dernière, et leur impact sur la population belge témoignent de la nécessité de repenser le territoire.
Selon le site fédéral climat.be, “le nombre moyen annuel de journées avec précipitations abondantes a pratiquement doublé” par rapport aux années '50.
Le coût annuel futur des inondations fluviales belges sur les infrastructures telles que des routes ou des bâtiments, est d'ailleurs “estimé entre 134 millions et 290 millions d'euros par an” en 2050, selon une étude commandée par la Commission Nationale Climat.