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L’Europe libère 42 milliards pour les semi-conducteurs

Le commissaire au Marché intérieur et au Numérique, Thierry Breton, pilote le "Chip Act" européen. ©REUTERS

L'UE présentera le 8 février prochain son "Chip Act", un projet à 42 milliards d'euros pour relancer le secteur des semi-conducteurs. Le commissaire européen Thierry Breton, à la manœuvre, a accepté d'en dévoiler le contenu à L'Echo.

La pandémie de Covid-19, et la forte reprise économique, ont entraîné une pénurie mondiale de semi-conducteurs, ou puces électroniques, un secteur indispensable à toute l'industrie. Cette situation a révélé la grande dépendance de l'Europe envers les producteurs asiatiques, ultra-dominants sur la place mondiale. L'industrie européenne était encore dominante au début des années 2000. Aujourd'hui, elle ne représente plus que 10% du marché planétaire, les délocalisations des usines en Asie ayant créé des écosystèmes locaux, puis des géants mondiaux.

Forte de ce constat, la Commission européenne présentera le 8 février son "Chip Act", une législation visant à relancer l'Europe dans la course technologique mondiale. Ce paquet législatif est piloté par le commissaire au Marché intérieur, Thierry Breton, ancien CEO d'Atos.

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Quadrupler la production européenne

42
milliards d'euros
Le "Chip Act" est doté d'une enveloppe de 42 milliards d'euros pour relancer le secteur européen des semi-conducteurs.

"On va tout faire pour quadrupler la production européenne de semi-conducteurs d'ici 2030, ce qui la fera passer à 20% de la production mondiale", confie Thierry Breton. Le commissaire français affirme qu'un consensus sur le "Chip Act" existe au sein du collège des commissaires européens. "L'Europe va retrouver sa place sur le marché des semi-conducteurs, et cela se fera en cinq à six ans."

L'exécutif européen va dégager une enveloppe de 42 milliards d'euros en subventions pour alimenter ce repositionnement. "C'est l'équivalent du plan américain à 52 milliards de dollars pour relancer leur propre industrie", poursuit Thierry Breton. L'Europe et les États-Unis veulent se montrer de taille face à la Chine, qui ambitionne de prendre une part de marché de 24% dans ce secteur grâce à un plan d'investissement de 100 milliards de dollars.

"Si Taiwan n'était plus en mesure d'exporter ses semi-conducteurs, en 3 secondes,toutes les usines du monde s'arrêteraient."

Pour Thierry Breton, il y a urgence. La situation est telle que "si Taiwan n'était plus en mesure d'exporter ses semi-conducteurs, en 3 secondes toutes les usines du monde s'arrêteraient", résume-t-il. Les puces électroniques sont vitales dans tous les grands segments industriels, de l'automobile à l'électroménager.

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Le Belge Imec aux premières loges

Le "Chip Act" comporte un volet de subventions dédiées à la recherche. La Commission propose de rediriger vers la recherche 12 milliards d'euros, dont 6 milliards du budget de l'UE et 6 milliards versés par les États membres. Cet argent financera des lignes pilotes visant à fabriquer des puces à l'échelle atomique.

Une partie de la recherche portera sur des puces FinFET de 2 nm (nanomètres, milliardièmes de millimètres), alors que l'industrie actuelle les fabrique à 14 nm. Ces puces, les plus rapides, sont destinées par exemple à l'électronique embarquée. L'institut de microélectronique de Louvain, Imec, leader mondial dans ce domaine profitera de la manne européenne.

"Une plateforme commune permettra aux 27 États membres de bénéficier de ces recherches."

Thierry Breton

L'argent ira aussi à la recherche portant sur des puces FD-SOI de 7 nm, dont le spécialiste est l'entreprise de Grenoble Soitec. Ce type de puces est caractérisée par une moindre consommation d'énergie.

Les subventions alimenteront aussi les recherches sur le "packaging", ou l'intégration des logiciels dans les semi-conducteurs.

En outre, "une plateforme commune permettra aux 27 États membres de bénéficier de ces recherches", précise Thierry Breton.

Aides d'État

La Commission propose aussi d'allouer 30 milliards d'euros à l'industrie afin de rapatrier la fabrication de puces en Europe. Cet argent serait versé par les États membres sous forme d'aides dans le cadre du plan de relance européen à 750 milliards.

L'exécutif européen ambitionne de voir 3 ou 4 usines de puces électroniques établies en Europe d'ici 5 ans. Les aides d'État pourraient aller à des groupes étrangers incontournables, comme les géants mondiaux Intel, TSMC ou Samsung.

La Commission propose d'entourer ces aides de conditions et de joindre au "Chip Act" une législation de type DPA américain (Defense Production Act) pour éviter que ces technologies quittent l'Europe. Les entreprises devront, entre autres, répondre à des obligations de service public.

Cette ouverture du marché européen "sous condition" est une position de principe adoptée par la Commission en mai 2021, affirme Thierry Breton. "Quand la pandémie est arrivée, on a vu que c'était bien d'être ouverts, mais sous conditions."

Pour rappel, face aux réticences d'une entreprise américaine à livrer à l'UE des matériaux pour fabriquer les vaccins contre le covid, l'UE avait créé un "instrument de réciprocité" dissuasif qui avait permis de débloquer la situation. Ce fut un tournant pour la politique commerciale de l'UE.

Le résumé
  • La Commission européenne présentera le 8 février le "Chip Act", une législation visant à relancer la fabrication de semi-conducteurs, ou puces électroniques, en Europe.
  • Le secteur, dominé par les producteurs asiatiques, est en pénurie depuis la pandémie.
  • Le commissaire européen chargé du Marché intérieur, Thierry Breton, ambitionne de libérer plus de 42 milliards d'euros de subventions, sous forme d'aides à la recherche (12 milliards) et d'aides États pour soutenir la fabrication de puces en Europe (30 milliards).

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