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analyse

Joe Biden: "La Russie et la Chine cherchent à diviser l'Otan"

Le président des États-Unis Joe Biden au quartier général de l'Otan. ©EPA

Le président des États-Unis et l'Otan ont lancé un message d'unité face à la Russie et à la Chine, deux adversaires systémiques de plus en plus agressifs.

Le vrombissement incessant d'un hélicoptère de surveillance surplombe le quartier général de l'Otan, à Bruxelles. Sur le toit du bâtiment de verre, quelques snipers surveillent l'horizon sous le ciel azuré. Une sécurité discrète, mais omniprésente a transformé la base en forteresse. Un à un, les dirigeants des trente pays membres de l'alliance militaire la plus puissante de la planète ont été accueillis par le secrétaire général, Jens Stoltenberg. Vu les règles d'hygiène et de distanciation, quelques journalistes seulement ont pu assister au sommet, à condition d'exhiber un test PCR. Parmi eux, un nombre encore plus restreint a pu rencontrer les leaders.

"J'ai dit à nos alliés que si la Russie continue, nous allons répondre."

Joe Biden
Président des États-Unis

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Avant le début de la réunion, les "Trente", démasqués, debout face à une tour numérique, ont assisté à une projection illustrant l'avenir de l'alliance en 2030. Tout tranchait avec le climat électrique du dernier sommet en 2018, marqué par un Trump agressif qui avait jugé l'Otan "obsolète".

La déclaration matamoresque du président français Emmanuel Macron sur l'alliance en état de "mort cérébrale" était, elle aussi, oubliée. "C'est un moment de clarification stratégique qui commence", a-t-il confié à la sortie du sommet. Le président français a insisté sur la nécessité de maintenir une "autonomie stratégique de l'Europe au sein de l'alliance".

"America is back"

"Je veux juste que toute l'Europe sache que les États-Unis sont là", a lâché le président Joe Biden lors d'une conférence de presse.

"La Russie et la Chine cherchent à diviser notre solidarité transatlantique, il y a de plus en plus de cyberactivité, de désinformation", a-t-il dénoncé. "J'ai dit aux alliés que si la Russie continue, nous allons répondre!"

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260
milliards de dollars
Les pays de l'alliance ont accru leurs dépenses militaires de 260 milliards de dollars supplémentaires depuis 2014.

Alors que Trump n'avait que l'augmentation des dépenses militaires à la bouche, Biden a évoqué à peine le sujet, soulignant que dix États ont atteint le niveau espéré (une hausse à 2% du PIB), et que les autres "sont sur la bonne voie". Ces sept dernières années, les pays de l'alliance ont accru leurs dépenses militaires de 260 milliards de dollars.

"L'Otan est d'une importance cruciale pour les intérêts américains." L'article 5, la clause de défense mutuelle de l'alliance, est "une obligation sacrée". "Il est solide comme la roche et inébranlable", a insisté Joe Biden. Il y a trois ans, Trump vouait cet article aux gémonies.

"La montée en puissance militaire de la Chine, son influence croissante et son comportement coercitif posent un certain nombre de défis en matière de sécurité."

Jens Stoltenberg
Secrétaire général de l'Otan

À l'ordre du jour du sommet, il y avait la lutte contre le terrorisme, la stratégie Otan 2030, la défense contre la désinformation, les cyberattaques et la prolifération nucléaire, face aux deux adversaires systémiques de l'alliance, la Russie et depuis peu la Chine. Pour la première fois, les changements climatiques étaient aussi au menu.

Le président des États-Unis, Joe Biden, et le secrétaire général de l'Otan, Jens Stoltenberg.
Le président des États-Unis, Joe Biden, et le secrétaire général de l'Otan, Jens Stoltenberg. ©AFP

"Aucune nation, aucun continent ne peut gérer seul ces défis", a lancé Jens Stoltenberg.

Le président Biden a également fait allusion à la crise de coronavirus, omniprésente en toile de fond du sommet. "C’est un sentiment oppressant de penser à toutes ces vies perdues. Vaccinez-vous, faites le plus vite possible", a-t-il dit. "Nous sommes face à une crise sanitaire comme il y en a qu'une seule par siècle."

La Chine dans le viseur de l'Otan

La montée en puissance de la Chine était dans tous les esprits. Lors du sommet de Londres en 2019, son nom avait été à peine évoqué. Cette fois, plusieurs lignes lui sont consacrées dans la déclaration finale.

"Nous sommes ici pour dire que la Chine sera bientôt la première puissance mondiale, c'est le deuxième investisseur au monde dans l'armement et la première marine de la planète", a averti Jens Stoltenberg. "Sa montée en puissance militaire, son influence croissante et son comportement coercitif posent un certain nombre de défis en matière de sécurité."

"Il n'y aura pas de nouvelle guerre froide, la Chine n'est pas notre ennemi. Mais nous devons faire face en tant qu'alliance au défi que représente la Chine pour notre sécurité."

Jens Stoltenberg

Pour l'Otan, l'Empire du Milieu est devenu un "défi systémique". "La Chine se rapproche de nous. Elle est dans le cyberespace, en Afrique, dans l’Arctique. Elle investit dans nos infrastructures électroniques et essaye de les contrôler", a regretté Jens Stoltenberg. "Il n'y aura pas de nouvelle guerre froide, la Chine n'est pas notre ennemi. Mais nous devons faire face en tant qu'alliance au défi que représente la Chine pour notre sécurité."

Le secrétaire général de l'Otan Jens Stoltenberg et le Premier ministre belge Alexander De Croo.
Le secrétaire général de l'Otan Jens Stoltenberg et le Premier ministre belge Alexander De Croo. ©BELGA

La Russie "agressive"

"Les actes agressifs de la Russie menacent notre sécurité."

Jens Stoltenberg

"Notre relation avec la Russie n'a jamais été aussi mauvaise depuis la fin de la guerre froide", a martelé le secrétaire général de l'Otan, égrenant les conflits provoqués par Moscou aux frontières de l'Europe. "Les actes agressifs de la Russie menacent notre sécurité."

La relation avec la Russie s'est détériorée ces dernières années, depuis la guerre menée en Géorgie, l'annexion de la Crimée, le conflit en Ukraine et la révolte en Biélorussie.

"La mort de Navalny serait une indication supplémentaire sur le fait que la Russie n’a pas l’intention de respecter le droit humanitaire."

Joe Biden

Joe Biden rencontrera le président russe Vladimir Poutine mercredi à Genève, après s'être coordonné avec ses alliés à Bruxelles. Le président américain devrait trancher froidement avec l'amitié étrange que Donald Trump avait nouée avec le maître du Kremlin.

"Je proposerai à Poutine de collaborer. S'il choisit de ne pas coopérer, eh bien nous réagirons à la hauteur de ce qu'il aura fait", a confié le président Biden. "C'est un homme brillant, intelligent, et je ne vais pas vous dire ici ce que je vais négocier avec lui."

"Nous ferons tout notre possible pour faire en sorte que l’Ukraine soit en mesure de résister à l’agression physique qu'elle subit."

Joe Biden

Interrogé sur une déclaration où il avait qualifié Vladimir Poutine de "tueur", le président Biden est resté en retrait. "Je pense que M. Poutine par le passé a reconnu qu’il était prêt à faire certaines choses et qu’il les avait faites", a-t-il nuancé.

Concernant le sort du dissident russe Alexeï Navalny, Joe Biden a lancé un avertissement. "La mort de Navalny serait une indication supplémentaire sur le fait que la Russie n’a pas l’intention de respecter le droit humanitaire", a-t-il déclaré.

Joe Biden a également exprimé sa solidarité avec l'Ukraine, estimant qu'elle pourrait intégrer l'Otan si "elle respecte les critères". "Affaire à suivre, en attendant nous ferons tout notre possible pour faire en sorte que l’Ukraine soit en mesure de résister à l’agression physique" qu'elle subit, a-t-il dit.

"Sortir de l'ombre des États-Unis"

Biden est venu pour rassurer et remettre son pays sur les rails du multilatéralisme. Mais la priorité des États-Unis, c'est la Chine, en passe de les détrôner comme première puissance mondiale. Or, le régime chinois n'est ni démocratique, ni considéré comme respectueux des droits humains.

"L'Europe doit sortir de l'ombre des États-Unis, elle est le premier bloc commercial du monde."

Alexander De Croo

"On se réjouit qu'il y ait un signal fort des États-Unis", dit le Premier ministre belge Alexander de Croo. "Après une période difficile, où il y a eu beaucoup de désaccords, nous sommes prêts à tourner la page", a-t-il ajouté.

"Ce qui est important, c'est que l'Europe définisse elle-même ses priorités. L'Europe doit sortir de l'ombre des États-Unis, elle est le premier bloc commercial du monde," a-t-il conclu.

Le résumé
  • Le président des États-Unis Joe Biden et les autres dirigeants ont lancé un message d'unité ce lundi lors du sommet de l'Otan à Bruxelles.
  • La rencontre signe le "retour" des États-Unis à ses engagements au sein de l'alliance, après quatre années troubles sous Donald Trump.
  • La Russie et la Chine, deux rivaux systémiques de plus en plus agressifs, seront au cœur des discussions.
  • Après avoir rencontré ses partenaires européens, Joe Biden rencontrera Vladimir Poutine mercredi à Genève.

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