Ferrero contraint de fermer son usine d'Arlon jusqu'à nouvel ordre
L'Afsca en a eu assez des atermoiements du groupe Ferrero: faute d'informations et de garanties suffisantes de sa part, il doit fermer l'usine employant 830 travailleurs.
L'Agence fédérale pour la sécurité de la chaîne alimentaire (Afsca) a décidé, ce vendredi, de rappeler la totalité des produits Kinder fabriqués à Arlon et de retirer à l'usine son autorisation de production, en raison d'une centaine de cas de salmonellose identifiés en Europe et des manquements de l'entreprise. "Un lien effectué fin mars entre ces intoxications et l'usine de production Ferrero d'Arlon a été confirmé depuis lors", a indiqué l'Afsca dans un communiqué.
L'Agence fédérale a ouvert une enquête approfondie au sein du site de production d'Arlon. "Suite aux constats et à des informations incomplètes de la part de Ferrero, l'Afsca retire l'autorisation de production du site Ferrero à Arlon", a-t-elle précisé.
Jusqu'ici, seul un certain nombre de lots avaient été retirés de la vente. Mais l'Afsca a désormais décidé de rappeler de manière exhaustive tous les produits des gammes 'Kinder Surprise', 'Kinder Surprise Maxi', 'Kinder Mini Eggs' et 'Schoko-bons', indépendamment des lots ou dates de péremption. Elle demande aux consommateurs de ne plus ingérer aucun de ces produits et appelle les entreprises de distribution à les retirer des rayons.
L'Afsca a par ailleurs exigé de Ferrero "une approche client irréprochable" alors que le groupe a fait l'objet de critiques renouvelées depuis le début de l'affaire.
Nombreux manquements
"Nous avons constaté des manquements dans l’information diffusée par Ferrero et dans la visibilité sur la gestion de l’incident, ainsi que l’absence de garanties que les produits soient correctement mis sur le marché", détaille Jean-Sébastien Walhin, porte-parole de l’Afsca.
"Comme il nous manque une vision sur des éléments importants, nous sommes obligés de prendre ce type de décision pour la sécurité des consommateurs."
"Comme il nous manque une vision sur des éléments importants, nous sommes obligés de prendre ce type de décision pour la sécurité des consommateurs."
Cela signifie que toute production sur le site d’Arlon est arrêtée, "le temps qu’il faudra pour que Ferrero nous apporte tous les éléments utiles". Le groupe devra notamment garantir qu’il respecte bien toute la réglementation en matière de sécurité alimentaire.
L’enquête ouverte par l’Afsca n’est pourtant pas terminée. "Nous avons toutefois déjà des résultats provisoires", dit-on à l’agence, sans qu’on puisse en connaître le contenu. On en saura plus la semaine prochaine, quand les enquêteurs auront remis des résultats définitifs.
"L’autorisation d’avoir une activité dans l’alimentaire est retirée à Ferrero jusqu’à nouvel ordre", précise Jean-Sébastien Walhin. Non pas jusqu’à la fin de l’enquête, mais "jusqu’à ce que l’Afsca décide que l’usine peut rouvrir".
"Une telle décision n'est jamais prise à la légère, mais les circonstances actuelles l'imposent", a déclaré le ministre fédéral de l'Agriculture, David Clarinval, sur le site de l’Agence. "La sécurité alimentaire de nos concitoyens ne peut jamais être négligée." Ce n’est pas la première fois que l’Afsca retire pareille autorisation, ni qu’elle le décide pour une entreprise de cette taille. Elle a procédé à 96 retraits ou suspensions d’autorisation sur la seule année 2020. Il y a eu le précédent célèbre des abattoirs de Veviba à Bastogne en 2018.
"Une telle décision n'est jamais prise à la légère, mais les circonstances actuelles l'imposent."
Mea culpa
De son côté, Ferrero reconnaît dans un communiqué "des défaillances internes, (ayant) provoqué des retards dans la récupération et le partage d’informations dans les délais impartis". "Cela a impacté la rapidité et l’efficacité des investigations", dit-il.
Le groupe précise que seuls les produits fabriqués à Arlon sont concernés et insiste sur le fait qu'ils ne représentent que "7% du total des produits Kinder fabriqués chaque année" dans ses usines. L'entreprise décrit la fermeture comme "la seule solution pour garantir le niveau de sécurité alimentaire le plus élevé et éliminer le risque d'autres contaminations".
Jeudi, l'entreprise avait indiqué que la présence de salmonelles avait été détectée le 15 décembre sur un filtre à la sortie de deux réservoirs de matières premières sur son site à Arlon. Elle avait ajouté avoir pris les mesures nécessaires à l’époque pour régler le problème et ne pas comprendre pour quelles raisons l’infection avait perduré.
L’usine emploie jusqu’à 1.200 personnes en haute saison. Actuellement, elle tournait avec environ 700 ouvriers et 130 employés. À noter qu'elle allait de toute manière rester fermée la semaine prochaine, pour cause de vacances pascales! Vendredi en fin de journée, les travailleurs et leurs représentants syndicaux attendaient toujours une communication officielle de l’Afsca et une autre de la direction. Ils étaient dans l’impossibilité de savoir s’il y aurait du chômage économique ou pour force majeure à la clé. Ils gardaient l’espoir, malgré tout, que l’unité puisse rouvrir le mardi 19 avril…
Du côté de la grande distribution, cette affaire embarrasse les enseignes, notamment parce qu’elle entraîne pour elles des coûts supplémentaires. "Conformément aux demandes de l’Afsca, nous avons immédiatement demandé à nos magasins de retirer tous les produits concernés, quel que soit le numéro du lot. Mais avec 786 magasins, cela représente un énorme travail", indique Syril Stambouli, porte-parole de Carrefour Belgique. "Il va de soi que les clients peuvent nous ramener et se faire rembourser les produits Kinder qu’ils auraient récemment achetés", ajoute-t-elle.
Gros travail d’information vers le réseau de magasins et les clients également chez Delhaize: "Cela représente de gros coûts opérationnels – vider les rayons, faire circuler l’information, etc. - que nous devons assumer nous-mêmes, le fournisseur ne prenant à sa charge que le coût des produits", observe Karima Ghozzi, porte-parole de la firme au lion, "mais pendant ce temps notre personnel ne fait plus de réassort de rayons!"
Reste à voir si les enseignes se retourneront contre Ferrero pour ces coûts supplémentaires. Aucune ne souhaite s’exprimer, surtout dans le contexte tendu des relations distributeurs-fournisseurs.
Cette affaire tombe aussi plutôt mal en pleine période de Pâques, époque d’intense activité commerciale dans le rayon confiserie. "Il ne faut pas non plus exagérer la portée de cette affaire dans le contexte de Pâques: hormis pour le Kinder Surprise, Ferrero ne figure pas dans le top des fournisseurs d’œufs en chocolat. Nous avons des alternatives, qu’il s’agisse de marques nationales ou de marques propres", commente Nathalie Roisin, porte-parole de Colruyt.
- L'Agence fédérale pour la sécurité de la chaîne alimentaire (Afsca) a décidé de rappeler la totalité des produits Kinder fabriqués par Ferrero à Arlon et de retirer à l'usine son autorisation de production, en raison d'une centaine de cas de salmonellose identifiés en Europe ces dernières semaines.
- L'agence dénonce une communication défaillante dans le chef de la direction du groupe et l'absence de garanties de sa part sur la sécurité de la production.
- Ferrero reconnaît des "défaillances internes" ayant "impacté la rapidité et l'efficacité des investigations".
- Les 830 travailleurs du site sont inquiets, même si l'usine allait de toute manière fermer la semaine prochaine pour cause de vacances.
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