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analyse

La start-up prend-elle le dessus sur l'industrie traditionnelle?

La start-up parisienne ChefClub vient de nouer un partenariat avec SEB, nouvelle preuve de l'intérêt de l'industrie traditionnelle pour ces jeunes pouces innovantes. ©PHOTOPQR/LE PARISIEN/MAXPPP

La start-up ChefClub, spécialisée dans le contenu culinaire, vient de nouer un partenariat avec SEB. Ce type de partenariat tend à se multiplier avec une question: l'industrie traditionnelle a-t-elle perdu sa capacité à innover?

Innover. Se réinventer. Prendre de l'avance. Aujourd'hui les défis de l'industrie traditionnelle, tous secteurs confondus, sont nombreux. Si hier encore, elles étaient considérées comme des machines de guerre prêtes à tous les combats, désormais pour ne pas rester sur le carreau, elles puisent davantage l'énergie et les idées dans des starts-up.

L'heure de gloire des départements de recherches et développement de ces grands acteurs est-elle révolue?

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Les grandes sociétés enchaînées

"L'innovation est de plus en plus difficile dans de grandes sociétés gangrenées par la bureaucratie, les niveaux de fonctions, la réglementation", explique Denis Knoops. L'ancien patron de Delhaize navigue désormais au sein de ce monde entrepreneurial.

"L'innovation est de plus en plus difficile dans de grandes sociétés gangrenées par la bureaucratie, les niveaux de fonctions, la réglementation. Tous cela sont des freins."

Denis Knoops
Ancien patron de Delhaize

Il évoque ainsi le "stop" mis à certains projets pour des raisons x ou y par le département légal ou par celui de l'IT, quand ce n'est pas la direction elle-même.

"Dans les start-up, mais aussi les PME ou les TPE, les équipes travaillent rapidement sans barrière. La première question qu'elles se posent, c'est 'y-a-t-il un marché?' L'aspect légal intervient ensuite."

Voilà deux extrêmes qu'il faut arriver à concilier à l'instar de Google qui a pris le parti de décharger un ou deux jours par semaine ses salariés des tâches quotidiennes pour des projets personnels qui, s'ils aboutissent, seront la propriété de Google.

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L'intrapreneuriat est une possibilité, mais elle est rare. Il a donné naissance à l'enseigne "Red Market" au sein de Delhaize et à d'autres spin-off.

"Les grandes sociétés sont très attentives au risque de réputation, d'image, au risque lié à l'incertitude. Dans ces groupes, on doit réfléchir avec des données mesurables."

Baudouin de Trootsenberg
Startup Factory

Jonathan Mingoia, cofondateur de Soprism, start-up active dans le profilage, pointe encore l'idée de l'"innovation Lab". Ce "poste de surveillance" des idées innovantes fait recette en France. Quasi tous les grands acteurs ont leur Lab. En Belgique, c'est plus timide.

Autre frein à l'innovation interne: le risque. "Les grandes sociétés sont très attentives au risque de réputation, d'image, au risque lié à l'incertitude. Dans ces groupes, on doit réfléchir avec des données mesurables", déclare Baudouin de Trootsenberg de Startup Factory.

Collaboration ou rachat?

A l'énumération de ces difficultés, on comprend mieux pourquoi les banques, l'automobile, la distribution et dernièrement le fabricant d'ustencils ménagers SEB louent l'agilité des start-ups.

"Si les investissements sont bien faits, il est plus efficace de construire sur l’existant que de démarrer de zéro, et ce tant financièrement qu’en terme de 'time to market'."

Belfius

"Nous choisissons des partenaires avec plusieurs années d’expertise, de développement et d’investissement. Si ces investissements sont bien faits, il est plus efficace de construire sur l’existant que de démarrer de zéro, et ce tant financièrement qu’en termes de 'time to market'", concède-t-on chez Belfius.

Cette collaboration peut prendre diverses formes. La start-up peut, en tant que "fournisseurs de service", nouer un partenariat commercial. Elle garde une gestion indépendante, mais bénéficie d'un réseau commercial de poids.

50
%
Près de la moitié des entreprises du Bel20 sont actives dans le corporate venturing.

Il y a aussi le corporate venturing. En prenant une part dans le capital de la start-up, l'entreprise intègre le know how et supporte une partie du risque de développement. La participation restant souvent minoritaire, la start-up garde toutefois les mains libres.
Cette formule a le vent en poupe puisque désormais près de la moitié des entreprises du Bel20 sont actives dans le corporate venturing.

Enfin, il y a le rachat pur et simple. "Le rachat coûte moins cher et est moins risqué que de développer la technologie en interne", insiste Baudouin De Trootsenberg. Denis Knoops y ajoute un bémol. "Ces deux mondes sont tellement différents que l'intégration ne fonctionne pas toujours. La créativité des équipes des start-ups sont vite tuées par les freins internes."

À l'intersection des deux mondes

"Avec la Covid, on sait enfin où on va. Les nouvelles données disponibles ouvrent des opportunités." Baudouin de Troostenberg note chaque jour 4 à 5 demandes de start-ups. "Prenez un restaurateur. Désormais, il est attentif à la digitalisation qui lui permettra de combiner les livraisons, les réservations et le paiement des commande en ligne."

Si une autoroute s'ouvre aux start-ups, les grands groupes vont-ils, eux, changer de mentalité?

"Nous avons l’intime conviction que briser les silos entre les différents secteurs et travailler avec d’autres sociétés va nous permettre d’innover d’avantage", affirme-t-on chez Belfius.

Denis Knoops se veut prudent. "Je suis inquiet pour les grandes entreprises qui sont sur une pente descendante. Hier, il fallait être grand pour avoir accès au capital, maintenant il y a des solutions comme le crowdfunding. Hier, il fallait être grand pour attirer les talents et avoir accès à l'information mondiale. Ce n'est plus le cas."

Et de conclure: "dans un monde où la vitesse est importante, les grandes entreprises sont trop lentes."

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