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"La voix dans ta tête" veut créer la première plateforme belge 100% podcast

Caroline Prévinaire et l'équipe de lvdt ambitionne de structurer le marché belge du podcast. ©Valentin Bianchi / Hans Lucas

Issue du monde du spectacle vivant, l’équipe de "La voix dans ta tête" (lvdt) se fait fort de faire du podcast un média puissant et rentable. Mais le business model est encore empirique.

Caroline Prévinaire a de qui tenir. Comme son père, cette entrepreneuse culturelle entend allier business et créativité. Son père, c’est Emmanuel Prévinaire, fondateur de Flying-Cam, un système de prise de vue aérienne sans pilote adopté par Hollywood et même oscarisé il y a quelques années. Comédienne formée à l’IAD, la jeune liégeoise entend de son côté faire du podcast un vrai marché en lançant le premier média belge qui lui est exclusivement dédié.

En réalité, cela fait longtemps qu’elle planche sur le podcast. Il y a plus d’un an, elle a lancé lvdt.audio (pour "La voix dans ta tête"), un site de curation de podcasts internationaux, produits par d’autres studios dans le monde entier, destiné à aider les auditeurs francophones à trouver les podcasts qui leur parlent grâce à une sorte de "magazine en ligne". Le site propose plus de 200 podcasts sélectionnés et commentés et il s’en ajoute chaque mois de nouveaux.

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Un studio de production belge

"L’idée est donc de structurer le marché, de créer une communauté autour du podcast avec des auteurs, des techniciens, des stratèges, etc."

Caroline Prévinaire
Fondatrice de lvdt

Mais aujourd’hui, avec avec lvdt.studio, elle a décidé de passer à la vitesse supérieure. Alors que bon nombre de médias belges dits traditionnels (RTBF, Trends, Le Soir, L’Echo - qui va bientôt lancer une offre de podcast quotidienne - et d’autres) se sont lancés dans l’aventure, l’initiative lvdt.studio vise à proposer un catalogue de podcasts maison qui seront disponibles sur les plateformes d’écoute, indépendants donc des grands médias. "À notre connaissance cela n’existe pas en Belgique, l’idée est donc de structurer le marché, de créer une communauté autour du podcast avec des auteurs, des techniciens, des stratèges, etc.", résume-telle.  

Fait amusant, c’est un de ces médias traditionnels, la RTBF en l’occurrence, qui lui a mis le pied à l’étrier. "Il y a trois ans, une amie m’avait suggéré de répondre à un appel à projets de la RTBF pour son premier podcast de fiction. Je ne savais pas ce qu’était un podcast mais j’ai quand même rendu un dossier. À ma grande surprise, il a été retenu, c’est ainsi qu’on a créé Doulange qui a généré 200.000 écoutes en six semaines. Cela m’a ouvert les yeux sur ce nouveau média qui a beaucoup de points commun avec le théâtre. J’arrive à faire avec le podcast ce que je cherche à faire avec le théâtre de rue: amener une proposition culturelle artistique là où les gens sont, en l’occurrence sur leur smartphone ou leur PC."

Modèle économique hybride

Voilà pour l’origine du projet. Restait à le monter. Avec ce constat: hormis les médias installés cités plus haut, le marché est balbutiant en Belgique: "Notre cible naturelle c’est la francophonie car la Belgique est beaucoup trop petite; mais nous avons un gros retard avec la France où 34% des gens écoutent du podcast régulièrement, contre 14% seulement chez nous", détaille-t-elle. Pourquoi ? "Parce qu’ils ont là-bas de grands studios dédiés comme Nouvelles Ecoutes, Binge Audio, Louise Media, etc. "

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C’est le genre d’outil que Caroline Prévinaire entend activer pour développer son nouveau média. Celui-ci repose sur un modèle économique hybride. Avec d’un côté une ASBL de promotion culturelle dédiée initialement au théâtre et réorientée vers le podcast, et, de l’autre, une SRL. Toutes deux produisent des contenus. En fonction de la mission et de l'objectif du podcast, ceux-ci trouvent leur place dans l'une ou l'autre structure. "Cela nous permet de ne pas faire porter le poids des objectifs de l'un à l'autre, tout en mutualisant les outils et en rationalisant les efforts de diffusions et de communication."

"L’ASBL nous permet de soutenir un projet artistique et citoyen, d’accompagner et de former des podcasters", ajoute-t-elle. Pour ce faire, elle a bénéficié de subsides au Fonds d’aide à la création radiophonique de la Fédération Wallonie-Bruxelles, de la Fondation Roi Baudouin et de la province de Liège, "ceci pour des contenus qui n’ont aucune vocation de rentabilité, on est là typiquement dans le modèle de l’exception culturelle de l’Union européenne", argumente-t-elle. La SRL a pour sa part reçu une bourse de 30.000 euros du fonds public St’Art.

Des podasts monétisables

Basée dans les locaux fraîchement rénovés de la Grand Poste à Liège, lvdt.studio produira, lui, des podcasts monétisables auprès des auditeurs - via un modèle à développer - et surtout après des entreprises, institutions, etc. À l’instar de la dernière production maison "Bière et faits divers", ou des podcasts produits pour des instances comme le Théâtre de Liège, la Grand Poste, Wallonie Design, la RTBF, ... qui ont déjà permis de dégager, à en croire Caroline Prévinaire, 200.000 euros de chiffre d’affaires.

Celle-ci en est bien consciente: les différents subsides dont son projet a déjà pu bénéficier ne suffiront pas. Il va sans doute falloir impliquer des investisseurs, lever des fonds et, surtout, générer du revenu. "L’idée du studio est de faire en sorte que les podcasts soient conçus dès le début avec cette notion de rentabilité. Dans le cas de "Bière et faits divers" on pourrait très bien placer des marques de bière dans le podcast, c’est du placement de produit assumé car la pub dans le podcast fonctionne, c’est souvent de la recommandation de gens qui consomment les produits ; bref, si vous vendez des croquettes pour chien, trouvez un podcast pour amateurs de chiens!"

"L’idée du studio est de faire en sorte que les podcasts soient conçus dès le début avec cette notion de rentabilité."

Caroline Prévinaire
Fondatrice de lvdt

Outre le placement de produits, la jeune entrepreneuse a ainsi identifié différents moyens de monétiser les podcasts: régie publicitaire pour ses propres contenus et ceux de tiers, création de produits dérivés autour de podcasts (livres, spectacles…), podcasts pour entreprises (autour de thèmes comme le management, la prévention du burn-out, la gestion de crise, etc.) ou encore des podcasts de marques. Et de citer l’exemple de Chanel qui a lancé un podcast atour de la créativité sous tous ses angles. L’an dernier, on comptait ainsi en France quelque 120 podcasts de marques.

50.000
téléchargements
L'objectif de lvdt.studio est d’atteindre 50.000 téléchargements d’ici la fin 2022.

L’offre de lvdt.studio est destinée à être accessible sur toutes les plateformes: Spotify, Apple, Pocketcast, YouTube… L’objectif est d’atteindre les 50.000 téléchargements d’ici un an.

Une audience en plein boom

Que ce soit en termes d’audience (le CIM ne le mesure pas) ou de revenus, difficile de dire ce que pèse exactement le marché du podcast en Belgique. Ce qui est sûr c’est que l'écoute de podcasts explose. Publiée en juin dernier, l’étude Audio Observer de la régie publicitaire IP (RTL) indique que la part du podcast dans la consommation audio en Belgique (radio, streaming, podcast…) est passée de 1% en 2017 à près de 7% en 2021. Un chiffre qui monte à plus de 11% chez les 25-34 ans. La durée d’écoute s’élève en moyenne à 23 minutes par jour, contre moins de 2 minutes en 2017.

L’étude démontre que les auditeurs sont surtout des hommes (65%) et que l’écoute se fait en tous lieux, mais elle est plus importante dans les transports en commun ou pendant la pratique d’un sport. L’écoute est donc particulièrement engagée et attentive, pointe l’étude.

La RTBF est sans doute le plus grand acteur du podcast en Belgique francophone. Avec deux catégories: le replay d’émissions radio ("Un jour dans l’histoire", "5 heures du soir" …) et des créations originales (podcasts natifs) autour de thématique comme l’actualité, l’histoire, la fiction, etc. "Un jour dans l’histoire" est le podcast n°1 (plus de 1,1 million de replays et téléchargements pour l’ensemble des 200 émissions annuelles) devant "5 heures du soir" (770.000). La série sur les Ovnis est le premier podcast natif avec 445.000 replays et téléchargements pour les 9 épisodes.

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