Une enquête pénale a été ouverte sur Deliveroo
L’auditorat du travail de Bruxelles et le pool fraude sociale planchent depuis des mois sur le statut des coursiers de Deliveroo. "Une enquête très longue et compliquée", décrit une source.
Dans le plus grand secret, et depuis plusieurs mois, le pool fraude sociale et l’auditorat du travail de Bruxelles travaillent sur une enquête "de longue haleine" autour des pratiques sociales de la filière de Deliveroo Belgique, l’entreprise de livraison de plats à domicile.
"Deliveroo est pleinement engagée avec les autorités compéten-tes pour expliquer la façon dont les coursiers travaillent avec nous."
Selon une source proche de l’enquête, le dossier est ouvert sur la base de possibles infractions dues aux statuts des coursiers et à leur changement de régime, depuis celui de salarié via la Smart à celui de prestataire de service dans le cadre de l’économie collaborative. "C’est une enquête de très longue haleine, très compliquée à mener. On est dans le cœur du cyclone et d’un changement de société. Nous ne sommes pas là pour couper des têtes mais pour vérifier que les règles sont respectées", tempère cette source.
Le nœud de l’enquête est de parvenir, légalement, à déterminer le statut exact des coursiers de Deliveroo, salarié ou indépendant. Si les coursiers devaient être reconnus comme des salariés, l’entreprise ferait alors face à des poursuites pénales aux conséquences importantes sur son avenir.
Des coursiers entendus
Jusqu’ici, plusieurs dizaines de coursiers ont été auditionnés par les enquêteurs, qui appartiennent à l’ONSS, l’Inasti et au contrôle des lois sociales. La direction de l’entreprise n’a pas encore été formellement entendue mais, indique la source proche de l’enquête, elle "collabore en transparence, sans volonté de se cacher". De nouveaux devoirs d’enquête sont d’ores et déjà prévus pour le mois de juin. "Deliveroo est pleinement engagée avec les autorités compétentes pour expliquer la façon dont les coursiers travaillent avec nous", précise-t-on au sein de l’entreprise, qui confirme l’existence de l’enquête.
Selon nos informations, Deliveroo Belgique compte environ 2.000 coursiers, parmi lesquels 1.500 sont aujourd’hui et nouvellement prestataires de services dans le cadre de l’économie collaborative. 146 sont des indépendants à titre principal, 0 à titre complémentaire et 282 sont des étudiants sous statut indépendant. Signe que le bouleversement orchestré par Deliveroo et son passage vers le statut de "plateforme de l’économie collaborative" s’est déroulé de manière extrêmement rapide. Indication, aussi, du fait que la très grande majorité de ses coursiers ne travaillent que très ponctuellement.
Statut fiscal
Filiale de la société britannique, Deliveroo Belgique est née en septembre 2015 et revendique une collaboration avec plus de 1.000 restaurants. En octobre, Deliveroo Belgique avait annoncé avec fracas sa volonté de quitter le système de la Smart, qui permet aux travailleurs indépendants de bénéficier des avantages du statut de salarié. Dans la foulée, Deliveroo avait obtenu l’agrément du gouvernement fédéral en tant que "plateforme numérique" dans les clous de la loi du 1er juillet 2016 sur l’économie collaborative. Cela lui permet de faire bénéficier ses coursiers d’un statut fiscal plus avantageux sous certaines conditions.
"C’est une enquête de très longue haleine, très compliquée à mener. On est dans le cœur du cyclone et d’un changement de société. Nous ne sommes pas là pour couper des têtes mais pour vérifier que les règles sont respectées."
Ainsi, selon la loi, l’imposition se fait à un taux très intéressant de 20% sur un montant annuel brut de 5.100 euros. Mais si celui-ci est dépassé, alors l’intégralité des revenus sera imposée de manière classique. On en conclut que seuls les coursiers qui travaillent très peu bénéficient du taux d’imposition avantageux. "Le seul objectif de Deliveroo est d’arriver à une analyse objective et complète de son modèle. Deliveroo est confiante dans le jugement que feront les tribunaux d’un modèle parfaitement légal, comme cela a déjà été le cas en France et au Royaume-Uni en 2017", espère l’entreprise, qui voit là une occasion de limiter de manière très importante ses paiements de cotisations sociales.
Deliveroo assure
Chaque coursier travaillant avec Deliveroo pourra désormais, partout dans le monde, accéder gratuitement à une assurance accident. La couverture d'assurance des coursiers belges de Deliveroo se boit donc sensiblement améliorée.
> La période d'attente sera plus courte pour les paiements en cas d'incapacité (7 jours au lieu de 14 précédemment)
> Les remboursements des frais médicaux seront augmentés, passant de 5.000 à 7.500 euros
> L'intervention pour les nuits passées à l'hôpital est, elle aussi, revue
à la hausse (de 1.500 à 3.000 euros).
Dans le même temps, l'entreprise a lancé une assurance accidents et responsabilité civile pour les 35.000 livreurs des douze pays où elle opère, dont plusieurs collaboreront avec la start-up belge Qover.
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