Pourquoi le ciel de Google s'est-il assombri?

L’arrivée du phénomène ChatGPT a provoqué une alerte rouge en interne chez Google. Le chatbot lancé par OpenAI doté d’une intelligence artificielle impressionnante a rendu cette technologie mystérieuse pour le commun des mortels accessible au plus grand nombre. Avec 1 million d’utilisateurs en moins d’une semaine, ChatGPT a réussi à rendre ringards les chatbot connus jusqu'ici et... Google.

Véritable assistant capable de répondre à presque toutes les questions et rédiger un texte marketing, un devoir ou une chanson selon des consignes très précises, l’outil d'OpenAI a relégué au second plan les autres initiatives dans le domaine. Pourtant, si une société investit massivement et mise sur l’intelligence artificielle, c’est bien Alphabet et sa division Google.

Alors quand certains ont émis l’idée que ChatGPT pourrait rendre obsolète le moteur de recherche de Google, l’entreprise de Mountainview a vu rouge. Sa réplique ne devrait pas tarder. Elle porte le nom de code "Atlas" et est aussi centrée sur un chatbot qui s’appelle "Apprentice Bard" à qui l’on peut poser des questions. Grosse différence avec ChatGPT, il actualise ses données là où le chatbot d’OpenAI a arrêté ses connaissances en 2021.

Cet outil conversationnel pourrait prochainement être ajouté au moteur de recherche de Google et le faire évoluer vers un moteur de recherche "intelligent" et capable de répondre à des questions autrement que via une liste de liens liés à une requête. Google a pris un coup, certes, mais n’a pas dit son dernier mot.

Un démantèlement en vue?

Paradoxalement, l’endroit de la planète où Google risque le plus, c’est chez lui, aux États-Unis. Huit États, dont la Californie où il a son siège, et le département américain de la Justice, accusent Google d’avoir illégalement usé de sa position dominante pour régner sur le marché publicitaire en ligne.

L’accusation est très grave et pourrait avoir des conséquences dramatiques si le tribunal fédéral de Virginie tranche en faveur des plaignants. Ces derniers réclament le démantèlement de Google Ad Manager. Ce n’est ni plus ni moins que le cerveau publicitaire du géant technologique qui comprend le serveur publicitaire des éditeurs de Google et son système d'enchères publicitaires.

Pour faire simple, Google est accusé de s’être positionné, par des rachats notamment, de manière à être l’acheteur, le vendeur et le commissaire-priseur de l’affichage publicitaire sur Internet. Avec près de 90% du marché de la publicité en ligne entre ses mains, l’ogre Google va devoir se justifier de sa position dominante.

Un scénario encore plus dur évoque un démantèlement complet des différentes structures liées à Google, à l’image de ce qui s’est passé pour l’opérateur américain AT&T dans les années 1980. Seul exemple à ce jour d’une société technologique ayant perdu son bras de fer avec la justice américaine dans une procédure antitrust. Chez Google, on ne panique pas, en tout cas en façade: "Le procès intenté tente de désigner les gagnants et les perdants dans le secteur hautement concurrentiel des technologies publicitaires", a sobrement commenté l'entreprise il y a quelques jours.

Les contrats sensibles

Légère éclaircie dans la grisaille, Google et son cloud font partie des entreprises sélectionnées par le Pentagone pour assurer le futur numérique du département américain de la défense. Google sera l’un des prestataires jusqu’en 2028 d'un contrat à 9 milliards de dollars à partager avec Amazon, Microsoft et Oracle. Mais même dans ce dossier, tout n’est pas rose. En interne, cela grogne et une partie des employés critiquent ouvertement la participation de Google à ce type de contrats militaires qui iraient à l’encontre des valeurs de l’entreprise.

Les prochains mois seront déterminants pour Google tant sur le plan de l’innovation que sur le plan judiciaire.