Parti Socialiste

Progressivité à tous les étages

Débutons par le plus iconoclaste en Belgique fiscale: la taxation, de manière progressive, des “grands patrimoines”, soit ceux dépassant la barre du 1,25 million d’euros, exception faite de l’habitation familiale et des biens liés à l’activité professionnelle. Ajoutez à cela la taxation, à hauteur de 30%, des plus-values réalisées sur des instruments financiers et la globalisation des revenus mobiliers, hors intérêts issus des comptes d’épargne réglementés. Globalisation soumise à des taux progressifs, vous l’aurez compris. Progressivité encore, à introduire dans les droits de succession et de donation pour les biens meubles.

Le PS n’entend pas laisser la thématique du pouvoir d’achat aux libéraux: via un crédit d’impôt, il est question de doper de 300 euros les bas et moyens salaires, afin de marquer la différence “avec les personnes en situation de chômage”.

Offensif, le ton l’est aussi au sujet du cadre budgétaire européen, qui tend à se resserrer. Il est question d’empêcher le “retour de l’austérité” et “d’immuniser” des normes comptables les investissements liés à la “transition juste”.

Salaire minimum en hausse et temps de travail en baisse

Le PS propose deux mesures phares. Tout d’abord, une augmentation du salaire minimum à 2.800 euros brut (soit 17 euros de l’heure), contre un peu plus de 2.000 euros actuellement. 

Ensuite, une réduction du temps de travail à 32 heures par semaine (avec embauches compensatoires et sans perte de salaire).

Les socialistes refusent toute remise en question de l’indexation des salaires, souhaitant plutôt améliorer le mécanisme. Et ils veulent rendre de la liberté aux partenaires sociaux lors des négociations salariales dans les secteurs, permettant ainsi des hausses de rémunération dans les entreprises qui sont en bonne santé. Pour cela, la norme salariale redeviendrait “indicative”. 

Pour faire face aux métiers en pénurie, le PS préconise d’améliorer les conditions de travail dans ces métiers et de faciliter l’accès aux formations ad hoc.

Faire contribuer les "bénéfices excessifs des entreprises"

Équilibre subtil: dans le registre fiscal, le programme du PS manie tant la carotte que le bâton. Prenez l’impôt des sociétés. Afin d’accompagner la transition, il est question de tenir compte des émissions de gaz à effet de serre pour l’attribution de “bonus” à l’Isoc.  

D’un autre côté, le PS annonce vouloir taxer les surprofits; en langage socialiste, cela donne “contribution sur les bénéfices excessifs des entreprises”.

Même constat pour le régime des indépendants. Le renforcement des avantages sociaux figure au menu… tout comme la manière de le financer: suppression du plafonnement des cotisations et introduction d’une progressivité. Tant qu’à parler sécurité sociale: le PS est favorable à une hausse des cotisations patronales pour les emplois à temps partiel ou de courte durée – parce que ceux-ci ont un impact négatif sur la Sécu.

Mentionnons encore la volonté de rendre les marchés publics plus accessibles aux petites et moyennes entreprises.

Revoir le mécanisme de la formation des prix de l’électricité

Sur le nucléaire, le PS a déjà tenu des propos relativement contradictoires. Que raconte, dès lors, son programme 2024? À l’horizon 2050, le scénario privilégié reste celui d’une énergie à 100% renouvelable; ce qui ne signifie pas que l’atome a dit son dernier mot. Jugez plutôt. Les socialistes sont demandeurs d’une prolongation de Doel 4 et Tihange 3 pour plus que 10 ans, “si le besoin est confirmé”. Et réclament la poursuite des études sur les SMR, ces petits réacteurs modulaires.

Le PS croit au système du tiers investisseur afin de soutenir la rénovation énergétique des bâtiments et compte bien aider à faire émerger, en Wallonie, une filière hydrogène.

Autre cheval de bataille: la réforme, à l’échelon européen, de la formation des prix de l’électricité. Prix qui devrait être “fonction du prix moyen de production”, et non “des seules centrales marginales au gaz”.

Encadrer les loyers

Faut-il taxer les loyers? Sans doute pas, le PS ne parlant de globaliser – et donc taxer – que les revenus mobiliers. Par contre, il faut les encadrer. La grille des loyers doit prendre force d’obligation. “Il s’agira de fixer un loyer maximum à ne pas dépasser pour chaque type de bien.” Ceci encore: le PS veut le retour de l’interdiction d’indexer les loyers des logements présentant un PEB faiblard.

En matière de droits d’enregistrement, le PS fait le choix de la progressivité. Qui serait fonction de la valeur du bien acquis, mais aussi “de l’importance du patrimoine immobilier déjà détenu par le contribuable”. Avec des réductions pour qui mène des travaux “économiseurs d’énergie”. Progressivité encore pour le précompte immobilier. Si le PS veut alléger la facture, voire la rayer pour le “logement d’habitation”, il est question d’instaurer un impôt, plus lourd, pour les multipropriétaires, “avec une logique de progressivité”.

Ajoutons la volonté d’encadrer l’offre d’hébergements touristiques via des plateformes comme Airbnb.

Cap sur la “gratuité totale” des transports en commun

Cela ne lui ressemble pas trop, au PS, vu le niveau de détail du programme. Pourtant, il se montre plus que vague au sujet des voitures de société. Tout au plus lâche-t-il qu’il est fondamental que la fiscalité prenne davantage en considération les impacts environnementaux. Et qu’il “conviendra de fixer une valeur plus proche de la valeur réelle de l’avantage attribué”. Le manque d’enthousiasme est plus flagrant encore au chapitre “taxation kilométrique intelligente”. Nulle trace dans le programme; il n’est même pas question d’une réforme de la fiscalité automobile.

Concernant le plan de circulation bruxellois “Good Move”, les socialistes se mouillent un peu plus. En demandant une révision de la méthode de travail et un renforcement de la concertation locale.

Côté transports en commun, le PS entend boucler le métro 3 à Bruxelles, et même prolonger la ligne 2. Et de rappeler son attachement à la gratuité. Totale. Première étape: les moins de 25 ans, les plus de 65 ans et les bénéficiaires de l’intervention majorée (BIM).

Revaloriser les petites et moyennes pensions

Revaloriser les pensions des salariés et indépendants pour converger vers celles des fonctionnaires en termes de taux de remplacement: c’est la volonté exprimée par le PS. Les socialistes insistent pour revaloriser l’ensemble des petites et moyennes pensions. 

Le PS veut aussi permettre de partir à la pension à partir de 60 ans pour celles et ceux ayant 42 années de carrière (au lieu de 44 années aujourd’hui) et alléger la condition de carrière, pour l’accès à la pension anticipée, à 40 ans pour les personnes ayant connu de la pénibilité au travail. Le PS défend un premier pilier “robuste”. 

Pour assurer l’équilibre financier de la Sécurité sociale, les socialistes envisagent la création d’une cotisation sociale généralisée.

Des critères de régularisation inscrits dans la loi

Le PS veut fixer des critères clairs, objectifs et permanents pour la régularisation individuelle des sans-papiers et les inscrire dans la loi. Les socialistes proposent aussi d’octroyer, au niveau national, un titre de séjour temporaire automatique aux personnes dites inéloignables. Dans le même esprit, ils prévoient, en cas de saturation du réseau d’accueil, un mécanisme d’octroi d’un titre de séjour temporaire au public vulnérable. 

Le PS veut mettre en place un système efficace et transparent de traitement des demandes d’asile et accélérer l’ensemble des procédures, quelle que soit la situation du demandeur d’asile. Les socialistes veulent aussi utiliser les visas humanitaires comme un outil permettant de répondre de manière souple, rapide et efficace aux situations de crise. Le PS met en avant l’intégration par le travail. Le PS entend ne recourir à la détention des personnes en centre fermé qu’en dernier recours et exclut cette possibilité pour les mineurs.

Des chambres correctionnelles de traitement de la toxicomanie

En matière de drogues, le PS constate que “la répression seule est inefficace”, d’où la volonté de placer la santé “au cœur de la réponse publique”. Jusque devant les tribunaux, le PS évoquant le développement de “chambres correctionnelles de traitement de la toxicomanie”, à l’état actuel de projet pilote. Objectif? La mise en place d’un “plan visant la sortie de l’addiction”. Et le prononcé d’une peine dépendant des efforts fournis par la personne poursuivie.

Au rayon “lutte contre le terrorisme”, le PS souhaite la création d’un coordinateur de la sécurité nationale, appelé à assurer la cohérence et la coordination dans la lutte contre le terrorisme, l’espionnage et le trafic de stupéfiants.

Sur le fonctionnement de la justice, le PS s’oppose à la “vision managériale” de la droite, mise sur le renfort de l’aide juridique de première ligne et entend “corriger” la réforme sur l’autonomie de gestion des cours et tribunaux.

Enfin, signalons que le PS n’est pas à cheval sur les 2% de PIB consacrés aux dépenses militaires. “Il ne faut pas dépenser plus, mais investir mieux et ensemble, en tant que partenaires fiables, à l’échelle européenne”.

Nouveaux rythmes pour l’enseignement supérieur

Forcément, avec une ministre à la manœuvre, il ne saurait être question de revenir en arrière sur la réforme des rythmes scolaires. Alors le PS trace sa route et parle à présent de nouveaux rythmes académiques dans le supérieur et d’étendre la réflexion en vue d’une refonte des rythmes journaliers dans l’enseignement obligatoire. 

Voilà qui n’engage pas à grand-chose, en somme: les socialistes entendent “renforcer l’enseignement des langues”. Et introduire le codage à l’école, s’agissant de développer les savoirs et compétences numériques dans le primaire et le secondaire.

Quant à l’enseignement supérieur, le PS espère œuvrer à son refinancement et soigner son accessibilité, notamment en étendant l’actuel gel du minerval à l’ensemble des cursus.

Gratuité des "soins primaires"

C’est l’un des chevaux de bataille des socialistes: la gratuité des soins primaires, à savoir la médecine générale, la dentisterie et la psychologie “de première ligne”. Accessibilité financière toujours: le PS souhaite poursuivre le rabotage des suppléments d’honoraires dans le monde hospitalier.

Autre dossier sensible: les quotas de médecins. Pour le PS, il faut faire sauter la digue pour les généralistes. Et il appelle, pour les autres spécialités, à “une réflexion en profondeur sur la pertinence du système actuel de planification de l’offre médicale”.

Comment revaloriser les professions médicales? Reconnaissance de la pénibilité et amélioration des conditions de travail, avance le PS. Qui suggère que les indexations d’honoraires prennent place tous les trimestres, et non plus une fois l’an.

Enfin, le PS bombarde la santé mentale “grande cause nationale”. Ce qui rime avec investissements à tous les étages.

Non au confédéralisme, pour une Sécu fédérale forte

Le PS martèle explicitement son opposition ferme à tout “confédéralisme”. Le PS n’est pas demandeur d’une nouvelle réforme de l’État et de débats institutionnels incessants “qui ne répondent pas aux préoccupations des citoyens”. Il souligne sa défense d’une Sécurité sociale fédérale. 

Il entend par ailleurs réformer le financement des partis dans l’esprit des propositions formulées par le panel citoyen “We need to talk” et veut ainsi interdire les dépenses de communication des partis sur les réseaux sociaux. Le PS prône une rémunération plafonnée pour les élus et la fin du statut social particulier des parlementaires.

Allonger à 18 semaines le délai légal pour la pratique de l’avortement

“Neutralité et impartialité”, insiste le PS, pour qui l’interdiction du port visible de signes convictionnels dans la fonction publique ne doit concerner que les agents exerçant “des fonctions d’autorité” et étant “en contact visuel avec le public”.

Les socialistes se montrent favorables à la légalisation de l’usage récréatif du cannabis et à la mise en place d’un marché réglementé par l’État, avec de règles strictes allant de la production à la consommation, en passant par la vente.

Sur le dossier de l’interruption volontaire de grossesse, le PS entend aussi avancer. En faisant passer de 12 à 18 semaines le délai durant lequel l’IVG peut être pratiquée. En supprimant l’actuel délai de réflexion de 6 jours. Et en dépénalisant complètement l’avortement pour les femmes.

Enfin, les socialistes remodèleraient bien les congés de maternité et de paternité. Pour ce dernier, l’idée est de l’aligner progressivement sur les 15 semaines du congé de maternité, avec “une partie” obligatoire. Le congé de maternité n’est pas oublié, les socialistes le voyant bien passer de 15 à 21 semaines.

Reconnaître l’État de Palestine

L’Europe qui revient à la discipline budgétaire, voilà qui fait grincer des dents chez les socialistes. Au-delà des grands discours – “austérité” et “dogme libéral” –, le PS plaide pour que les investissements liés à la “transition juste” ne soient pas comptabilisés dans les déficits excessifs.

Sur le Green Deal, par contre, le PS entend aller un pas plus loin. En élargissant aux secteurs non concernés le périmètre de la taxe carbone aux frontières. En renforçant les normes environnementales sur les produits consommés dans l’Union pour réduire la concurrence déloyale de produits importés. En favorisant le développement industriel de l’Europe via un “Buy European Act”, taxé de “protectionnisme intelligent”. Et en mettant sur pied un fonds européen de transition pour aider les agriculteurs à aller vers un modèle de production plus durable.

Enfin, les socialistes proposent de reconnaître officiellement l’État de Palestine. Ceci même: la Belgique devrait prendre la tête d’un groupe de pays européens pour créer un mouvement en faveur d’une solution pacifique. Cela implique notamment de “dénoncer le système d’apartheid et les politiques d’annexion”. La Belgique devrait aussi “tendre vers une interdiction du commerce avec les colonies” israéliennes.