Le groupe immobilier suédois SBB inquiète les investisseurs
Après avoir vu sa note dégradée à "junk" par S&P Global, le groupe immobilier SBB retarde le paiement de son dividende et annule son augmentation de capital.
Le groupe immobilier suédois Samhällsbyggnadsbolaget i Norden (SBB) tutoie désormais les abysses. Un jour après la décision de l'agence de notation S&P Global de classer la note de crédit de la société au rang d'"obligation pourrie" et la chute de 19,9% de l'action, l'entreprise en difficulté a annoncé retarder le paiement de son dividende et annuler son augmentation de capital de 2,6 milliards de couronnes suédoises (232,7 millions d'euros).
La dégradation à "obligation pourrie" de la note de crédit de SBB était inscrite dans les astres depuis l'année passée. En aout 2022, les analystes de Goldman Sachs avaient déjà craint que les agences de notation dégradent la note du groupe immobilier en difficulté. Ils avaient conseillé de vendre le titre. Les investisseurs qui auraient suivi leur conseil auraient été bien avisés, car l'action a dévissé de plus de 50% depuis cette date.
Fraser Perring, le shorteur britannique qui mise depuis l'année dernière sur une chute du titre, a multiplié les tweets pour rappeler son opinion sur une société jugée comme "le parfait exemple d'une société mal gérée qui s'est gavée de dettes à bon marché".
Un problème de financement
Car à l'origine du problème de SBB se trouve son financement. Le groupe suédois, comme ses concurrents, s'était appuyé sur l'émission d'obligations hybrides, qui présentent la particularité d'être à long terme, voire sans échéance, pour attirer de nouveaux investisseurs et bénéficier d'un rating favorable auprès des agences de notation.
Avec la remontée brutale des taux d'intérêt, ces obligations ont vu leur valeur chuter et atteindre un niveau "de détresse" selon les analystes. Cette source de financement pour les groupes immobiliers suédois s'est progressivement tarie, et a rendu leur coût de financement plus élevé.
Cette perspective survient alors que ces groupes doivent refinancer des obligations qui viennent à échéance durant les cinq prochaines années pour un montant de plus de 40,8 milliards de dollars, dont un tiers cette année. Avec une notation "obligation pourrie", SBB se retrouve désormais avec des coûts de financement encore plus élevés que ses rivaux. Et le groupe affiche une dette élevée, de 8,1 milliards de dollars, selon l'agence d'informations financières Bloomberg.
Michael Johansson, analyste chez Arctic Securities AS, s'étonne du timing de la décision de S&P Global. "La dégradation n'était pas une surprise, mais le timing l'est, commente-t-il. "Je pensais que SBB aurait eu plus de temps étant donné que le groupe a réduit sa dette en vendant des actifs et annoncé une augmentation de capital".
La sanction de S&P Global fait craindre d'autres dégradations pour les sociétés immobilières suédoises. Cela explique la réaction des investisseurs depuis lundi. Les actions des groupes comme Fastighets, Castellum et Wallenstam ont fortement dévissé. Leur recul a pesé sur l'ensemble du secteur immobilier en Europe, qui se retrouve à nouveau en bas des performances du Stoxx 600.
"L'annulation de l'augmentation d'actions illustre le manque actuel d'accès au marché des capitaux pour SBB."
Michael Johansson n'est toutefois pas trop pessimiste pour SBB. "Le report du dividende et l'annulation de l'augmentation d'actions sont positifs pour les actionnaires" remarque-t-il. Mais d'autres analystes ne partagent pas son avis. "L'annulation de l'augmentation d'actions illustre le manque actuel d'accès au marché des capitaux pour SBB, et augmente les risques de refinancement", écrivent les analystes de Danske Bank. Les analystes de S&P Global ont placé la note de SBB sous surveillance négative, car ils s'attendent à d'autres dégradations.
Cofinimmo, WDP et Aedifica, les trois SIR (sociétés immobilières réglementées du Bel 20) subissent en bourse l'effet négatif des problèmes des groupes suédois. Mais leur situation financière s'avère bien différente. En raison de leur statut de SIR, ces sociétés ne peuvent pas afficher un endettement élevé. Celles-ci maintiennent un ratio d'endettement sous 50%. Elles continuent à verser leurs dividendes, contrairement à d'autres groupes européens en difficulté. De plus, elles ont déployé l'usage de dérivés pour se couvrir de la remontée des taux d'intérêt. Les agences de notation n'ont pas placé leur rating sous surveillance négative, mais plutôt à perspective stable, signe que celles-ci ne s'inquiètent pas pour l'instant pour ces entreprises.
Les performances des trois SIR du Bel 20 depuis le début de l'année montrent aussi que les investisseurs ne sont pas inquiets. Cofinimmo affiche une hausse de 1,49%, et WDP et Aedifica baissent respectivement de 1,95% et 2,9%, bien moins que SBB (-59,32%) ou la société immobilière allemande en difficulté Aroundtown (-52,63 %).
- Le groupe suédois en difficulté SBB a dû reporter son dividende et annuler son rachat d'actions un jour après l'abaissement de sa note de crédit à "obligation pourrie" par S&P Global.
- Il est confronté à une augmentation de ses coûts de financement, comme le reste du secteur immobilier suédois.
- Le groupe inquiète en raison d'une dette élevée de 8,1 milliards de dollars.