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Les marchés boursiers émergents ne constituent plus le maillon faible

Acteurs majeurs de la crise de 1997-1998, les marchés émergents s'en tirent la tête haute cette année. Alors que la crise du «subprime» a touché durement les marchés américains et européens depuis la mi-juillet, la contagion ne s'est manifestée qu'avec retard sur des Bourses pourtant réputées pour leur volatilité.

(l'écho) «Par rapport aux crises précédentes, ces marchés résistent mieux. Ceci est particulièrement frappant au début de la correction générale des marchés à la mi-juillet. Les marchés émergents n'ont commencé à brusquement corriger qu'en août», observe Eric Tazé-Bernard, directeur de la multigestion auprès d'Invesco Asset Management. «Toutefois, les marchés sensibles aux matières premières, comme le Brésil et l'Afrique du Sud, ont témoigné de leur vulnérabilité. En revanche, les marchés asiatiques plus consommateurs que producteurs d'énergie ont mieux résisté», souligne-t-il. «La Turquie s'est aussi montrée résistante, grâce aux récentes élections qui ont ramené le calme», ajoute-t-il.

Les marchés chinois ont particulièrement brillé durant ces dernières semaines. Les indices de la Bourse de Shenzen et de Shanghai ont pris 170% et 98,88% depuis le début de l'année. Depuis la mi-juillet, ils ont pris respectivement 14,27% et 40,76%. «Ces marchés ne sont pas accessibles aux investisseurs étrangers, responsables de la correction boursière ces dernières semaines. Mais la Bourse de Hong Kong, qui est, elle, accessible à ces investisseurs, a aussi bien résisté», note EricTazé-Bernard.

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Pour le stratégiste, «les marchés émergents ne sont plus les maillons faibles de la crise actuelle. Les responsables sont à chercher dans le secteur immobilier et les craintes concernant le consommateur américain. La région dispose toujours d'une croissance économique forte, d'une inflation relativement bien maîtrisée et d'une balance des paiements courants excédentaire. Ces pays dégagent désormais une épargne domestique qui soutient leur économie».

Claudia Barrulas, client portfolio manager pour JPMorgan Asset Management, partage ce point de vue. «Les marchés émergents ont été moins impactés car ils sont devenus moins dépendants des Etats-Unis, grâce à une croissance domestique soutenue. Ces pays créent plus d'emplois et génèrent plus de PIB par habitant. La population dispose de plus d'argent à dépenser», observe -t-elle. «De plus, les échanges commerciaux ne se font plus entre seulement les Etats-Unis et ces pays, mais aussi de plus en plus entre eux. L'accumulation d'excédents budgétaires qui en résulte apporte en quelque sorte un coussin pour amortir un éventuel choc économique», précise-t-elle. La gestionnaire de fonds relève que les flux de capitaux vers les fonds émergents de JPMorgan n'ont pas cessé depuis le début de la crise. «Nous avons connu quelques retraits, mais l'intérêt pour ces marchés n'a pas faibli», affirme-t-elle.

Corrélation toujours forte

L'investisseur actif sur les marchés émergents a moins souffert que celui investi dans les marchés européens et américains.

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Toutefois, considérer la région comme un placement défensif serait un leurre, selon le stratégiste et la gestionnaire de fonds. «Si nous devions entrer en récession, mais cela reste peu probable, cela aurait forcément un impact sur ces marchés. Toutefois, ceux-ci sont devenus un peu plus autonomes», remarque Claudia Barrulas.

«On ne peut pas considérer ces marchés comme défensifs car ceux-ci présentent encore une volatilité importante. Toutefois, il est vrai que ces économies, en particulier asiatiques, disposent d'un gros excédent budgétaire et du soutien de la demande interne. Elles peuvent donc jouer un rôle plus défensif que par le passé», souligne pour sa part Eric Tazé-Bernard.

Le stratégiste et la gestionnaire de fonds écartent cependant un scénario de ralentissement brutal de l'économie mondiale.

«Les marchés émergents restent toujours un soutien important pour la croissance mondiale. De plus, les entreprises aux Etats-Unis et en Europe montrent toujours une situation excédentaire au niveau de leur bilan. Enfin, les banques centrales feront ce qu'il faut pour éviter une crise trop profonde», assure Eric Tazé- Bernard. Celui-ci accorde une probabilité de 30% à un scénario d'atterrissage brutal («hard landing») de l'économie mondiale.

Thème d'investissement à long terme

Claudia Barrulas estime que les marchés émergents restent toujours un thème d'investissement à garder sur le long terme.

«La croissance de la consommation domestique et le développement des infrastructures demeurent des thèmes d'actualité», indique-t-elle. Du coup, elle ne privilégie aucun pays ou zone géographique spécifique. «Nous cherchons des bonnes idées d'investissement sur tous les marchés émergents. Nous sommes investis dans des pays comme le Brésil, le Mexique, l'Egypte et la Russie à cause des sociétés que nous avons sélectionnées», note-t-elle.

«Nous restons neutres sur les marchés émergents pour l'instant. Ils restent vulnérables à un retournement de la conjoncture économique. Toutefois, nous surpondérons l'Asie, en particulier Singapour, Hong Kong, Taïwan et la Corée pour le secteur technologique», indique Eric Tazé-Bernard.

Le stratégiste se dit neutre pour les marchés de l'Europe de l'Est. «La Russie occupe une place prépondérante dans l'indice MSCI de la région. Même si beaucoup de nouvelles sociétés font leur entrée sur ce marché, celui-ci reste dominé par la production de pétrole, dont les cours sont appelés à baisser», remarque-t-il.

Les marchés émergents, et en pariculier asiatiques, gardent donc la cote auprès des investisseurs, même s'ils présentent des ratios cours/bénéfices élevés. Celui de la Bourse de Shenzen culmine à 76,84! La rançon du succès, sans doute...

Jennifer Nille

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