La proposition de taxer davantage les revenus locatifs s’est très souvent retrouvée sur la table des négociations budgétaires, mais n’a jamais abouti. "L’immobilier est déjà suffisamment taxé en Belgique", peut-on entendre.
Ceux qui perçoivent des revenus locatifs doivent les mentionner dans leur déclaration fiscale. Mais les montants à déclarer diffèrent selon l’usage du locataire. Si le bien est loué à un particulier qui ne l’utilise qu’à des fins privées, le propriétaire est taxé sur le revenu cadastral (RC) indexé, majoré de 40%. Ce RC est encore basé sur les loyers de 1975 et est simplement indexé dans l’attente de ce que l’on appelle une "péréquation cadastrale". Idem pour les secondes résidences occupées uniquement par leur propriétaire.
Si le locataire utilise le bien à titre professionnel ou si le locataire est une entreprise, les revenus locatifs réels sont taxés. Ils comprennent le loyer ainsi que les avantages comme les frais d’entretien et de réparation qui sont normalement à charge du propriétaire, mais qui sont facturés au locataire. Les frais d’entretien et de réparation ne peuvent être déduits: le fisc applique un forfait de 40%. Au final, seuls 60% du revenu locatif sont donc taxés.
Étranger
Même si les propriétaires d’un bien immobilier à l’étranger paient déjà des taxes dans le pays où le bien est situé, ils doivent également le déclarer sur leur fiche fiscale belge.
Ceux qui mettent leur bien en location doivent déclarer les loyers perçus.
Un propriétaire qui ne loue pas son bien et qui l’utilise à titre privé doit déclarer la valeur locative estimée du bien, qui correspond au loyer qui serait perçu si le bien était mis en location pendant une année complète. Les taxes payées à l’étranger peuvent être déduites de ce montant. Le fisc applique automatiquement un forfait de 40% pour les frais et déduit les intérêts éventuellement payés pour le financement du bien. Si le bien est situé dans un État avec lequel la Belgique a signé une convention de prévention de double imposition, ces revenus sont exonérés en Belgique sous réserve de progressivité.
La différence entre la valeur locative taxable d’un bien à l’étranger et le revenu cadastral est encore trop importante et constitue un obstacle à la libre circulation des capitaux.
Cependant, en ce qui concerne la base imposable, les Belges qui possèdent un bien immobilier dans un autre État de l’Union européenne ou de l’Espace économique européen sont désavantagés par rapport à leurs compatriotes dont le bien est situé en Belgique. Notre pays s’est déjà fait taper sur les doigts en 2014 pour cette différence de traitement. La différence entre la valeur (locative) taxable déduction faite des taxes foncières étrangères et le revenu cadastral est encore trop importante et constitue un obstacle à la libre circulation des capitaux. La Belgique va devoir modifier sa législation fiscale, sans quoi elle pourrait se voir infliger des amendes ou astreintes par les instances européennes.
Mais existe-t-il un équivalent étranger à notre revenu cadastral?
Pays-Bas
Nos voisins bataves se basent sur un concept appelé "Waardering Onroerende Zaken" (ou WOZ), c’est-à-dire "Valorisation des biens immobiliers". "Cette WOZ est fixée chaque année par la commune et est généralement très proche de la valeur de revente réelle, explique Wim Vermeulen, avocat chez Cazimir. Cette valeur sert de base pour le calcul de l’impôt sur le revenu que tous les propriétaires de biens immobiliers doivent payer aux Pays-Bas. Pour déterminer cette taxe dans ce que l’on appelle la ‘box 3’, le rendement est fixé forfaitairement. Il varie entre 1,935 et 5,6% de la valeur, en fonction de la valeur WOZ. Les emprunts souscrits pour financer l’achat du bien peuvent être déduits de la WOZ, avec une exonération pouvant aller jusqu’à 30.360 euros par an. Un impôt de 30% est dû sur la différence."
L’Echo se penche sur huit idées très répandues concernant l’immobilier.
- L’immobilier offre un rendement minimum de 3%
- Emprunter sans apport de départ? Impossible!
- Mieux vaut acheter du neuf que de l’immobilier existant
- Se séparer d’un locataire est impossible
- Il vaut mieux être propriétaire que locataire
- Le "home staging" est un must pour vendre sa maison
- L’immobilier est déjà assez taxé
- Les prix de l’immobilier ne peuvent qu’augmenter
Les Belges qui possèdent un bien aux Pays-Bas doivent le mentionner dans leur déclaration fiscale belge. Ici aussi, ils peuvent déclarer le rendement forfaitaire basé sur la valeur WOZ. La taxe foncière néerlandaise peut être déduite. "La valeur WOZ suit de près la valeur du marché et le rendement forfaitaire est donc très proche du rendement locatif effectif ou de la valeur réelle. Nous estimons que cette base d’imposition ne peut être une option satisfaisante par rapport à la déclaration sur la base du revenu cadastral", explique Vermeulen.
France
En France, le rendement d’un bien est déterminé sur la base de sa valeur locative. "Cette valeur est en principe inférieure à la valeur locative réelle. Mais contrairement à la Belgique, elle est déterminée chaque année par l’administration sur la base d’une comparaison avec d’autres biens", explique Evelyne Van der Elst, avocate chez Cazimir.
En France, les propriétaires sont exemptés d’impôt sur ces revenus théoriques s’ils occupent eux-mêmes leur bien. "En cas de location, les revenus locatifs nets sont taxés au taux progressif. Pour les non-résidents, cette taxe est en principe d’au moins 20%, précise Van der Elst. Si les revenus locatifs annuels ne dépassent pas un certain montant, le propriétaire peut déduire des frais forfaitaires et ne doit donc pas présenter de justificatifs. Les non-résidents doivent également verser une cotisation de solidarité de 7,5% sur les revenus locatifs nets."
Lors de la déclaration en Belgique de biens détenus en France, les contribuables belges peuvent utiliser la base d’imposition qui est mentionnée sur l’avis d’imposition relatif à la taxe foncière française. Ce montant doit être multiplié par deux pour obtenir la valeur locative brute. Les propriétaires peuvent déduire la taxe foncière mais pas la taxe d’habitation, qui doit être payée par l’occupant du bien. "Sur la base de l’arrêt européen, la formule utilisant la valeur locative devrait en principe pouvoir être utilisée en cas de location du bien à des fins privées, et pas uniquement si le propriétaire occupe lui-même son bien. Ce procédé n’a pas encore été confirmé par l’administration fiscale, mais cette dernière peut difficilement ignorer l’arrêt de la Cour européenne", conclut Vermeulen.