Le nombre de fois où l’on a constaté une baisse de l’immobilier en Belgique au cours des 50 dernières années peut se compter sur les doigts d’une main. La Belgique est un des rares pays européens où les prix des logements n’ont que peu et brièvement reculé après la crise financière de 2009.
Depuis le milieu des années 1990, le prix des habitations en Belgique a en moyenne été multiplié par trois. Si l’on tient compte de l’inflation, on peut parler d’un doublement de la valeur réelle. Mais il ne faut pas oublier l’amélioration du confort des habitations. Le prix moyen d’une habitation datant d’il y a 20 ans sans salle de bains, sans chauffage central ou sans isolation n’a évidemment pas triplé.
L’Echo se penche sur huit idées très répandues concernant l’immobilier.
- L’immobilier offre un rendement minimum de 3%
- Emprunter sans apport de départ? Impossible!
- Mieux vaut acheter du neuf que de l’immobilier existant
- Se séparer d’un locataire est impossible
- Il vaut mieux être propriétaire que locataire
- Le "home staging" est un must pour vendre sa maison
- L’immobilier est déjà assez taxé
- Les prix de l’immobilier ne peuvent qu’augmenter
La plupart des Belges qui achètent aujourd’hui une habitation n’ont jamais connu de période où la valeur réelle d’un bien immobilier était inférieure à son prix d’achat. Ce fut pourtant le cas dans le passé: ceux qui ont acheté une maison aux alentours de 1980 ont dû attendre 15 ans avant qu’elle ne retrouve sa valeur réelle.
C’était une autre époque diront certains. En effet. Au début des années 1980 (au moment de la dévaluation du franc belge), l’inflation était de 9% et les taux hypothécaires caracolaient aux alentours de 15%. Aujourd’hui, l’inflation est proche de 2% tandis que les taux hypothécaires dépassent à peine 1%.
Personne ne s’attend aujourd’hui à une forte hausse des taux à long terme, et donc des taux hypothécaires. Avec des comptes d’épargne et des obligations qui ne rapportent quasiment rien, et après quelques déconvenues en Bourse avec des actions comme Lernout & Hauspie, Nyrstar, etc., l’achat d’un bien immobilier pour l’occuper ou le mettre en location a plus de sens que jamais.
De plus en plus de Belges se lancent dans cette aventure. Des taux historiquement bas, un marché de l’emploi favorable, l’augmentation du nombre de ménages, la hausse des revenus et le manque de solutions alternatives plus rentables pour les investisseurs, donnent un fameux coup de pouce à l’immobilier résidentiel, qui accumule les records.
Surévaluation?
Mais les prix actuels sont-ils raisonnables? Le marché immobilier vit-il au-dessus de ses moyens? Pour parler en termes économiques, est-il surévalué?
Au niveau international, lorsque l’on compare les prix, on se base souvent sur le rapport entre les prix de l’immobilier et les revenus moyens des ménages ou la moyenne des loyers. Sur la base de ces critères, l’OCDE et le magazine britannique "The Economist" ont conclu que le marché belge était surévalué de 50%.
Presque nulle part ailleurs on ne parle d’une surévaluation aussi importante. Ces chiffres alarmants doivent cependant être relativisés. La forte baisse des taux a permis aux candidats-acheteurs d’emprunter davantage et donc d’acheter un logement plus cher, même si leurs revenus n’ont pas augmenté. "Par conséquent, la surévaluation mesurée au cours du quatrième trimestre 2018 ne dépasse pas 5,3%", a calculé Johan Van Gompel de KBC.
Si l’on tient également compte de facteurs fondamentaux comme les revenus des ménages, le nombre de ménages et la fiscalité immobilière, on obtient d’autres chiffres.
D’après le modèle utilisé par la Banque Nationale, on parle d’une surévaluation de 6,5% au cours du quatrième trimestre de l’an dernier. Selon la Banque centrale européenne, on parle par contre d’une sous-évaluation de 4%. D’après Johan Van Gompel, la plupart des experts estiment que la surévaluation de l’immobilier belge ne dépasse pas 10%.
"L’équilibre peut facilement basculer si les investisseurs commencent à se détourner de l’immobilier."
Mais il ne faut pas pour autant se réjouir. La Belgique est un des pays où la dette hypothécaire a le plus augmenté au cours des dernières années. Depuis 2015, elle est plus élevée que la moyenne de la zone euro si l’on se base sur les revenus des Belges. De nombreux dossiers de crédits hypothécaires affichent d’ailleurs un profil de risque élevé.
La situation globale masque une embarrassante dualité qui caractérise le marché belge. D’une part, de nombreux ménages doivent lourdement s’endetter pour acheter leur logement, et, d’autre part, certains de nos compatriotes ont les moyens d’acheter et font monter les prix. Ils se retrouvent également en concurrence avec un groupe grandissant d’investisseurs particuliers. "L’équilibre peut facilement basculer si les investisseurs commencent à se détourner de l’immobilier, par exemple si les taux augmentent plus que prévu", prévient l’économiste.
Scénario "idéal" incertain
Pour les six premiers mois de l’année, les notaires ont constaté une hausse des prix des maisons et des appartements de respectivement 2,1% et 2,6%. Si les prix continuent à augmenter de 3 à 4% par an, dans un contexte où l’on s’attend à un ralentissement de la croissance économique et à une hausse des taux, des nuages noirs pourraient s’accumuler dans notre ciel immobilier, estime Van Gompel. Toute crise économique ou financière peut aussi faire rapidement basculer le marché.
Van Gompel s’attend à une hausse de l’immobilier belge de 2,3% en 2019 et 2,1% en 2020.
Si l’on tient compte de l’inflation, la hausse se monte encore respectivement à 0,6 et 0,5%. Dans ce cas, l’immobilier résidentiel continue à garder sa valeur, ce qui est le scénario idéal pour les économistes. Mais ce scénario "idéal" est loin d’être garanti.