Il fallait s’y attendre. Depuis la fin du premier confinement, la ruée vers l’or vert ardennais est si intense que la Fédération royale du Notariat a jugé opportun de faire une sortie ciblée sur ce marché résidentiel de niche très couru pour l’instant.
Ce n’est pas la première vague du genre qui déferle sur l’Ardenne et son bâti rural typique. Mais la précédente, surtout néerlandaise, remonte à 25 ans déjà. Depuis, ce sont des vaguelettes très locales qui faisaient de temps en temps le bonheur des propriétaires vendeurs, au grand dam des acheteurs locaux, souvent moins fortunés.
Mais aujourd’hui, ce qui ressort de ce premier "Baromètre de l’Ardenne" lancé par la Fédération du Notariat (Fednot), c’est que l’acheteur type est, surtout depuis un an, plutôt originaire de Flandre. "Dès la fin du confinement, de nombreux Belges se sont pressés pour acheter une seconde résidence. L’activité immobilière a augmenté de +5,3% dans la région, alors qu’au niveau de l’ensemble du pays elle chutait de –2,7%. La demande a été tellement forte qu’il n’y avait souvent plus de biens à vendre. Les portefeuilles immobiliers étaient tous vides", explique Frédéric Dumoulin, notaire à Durbuy, une commune particulièrement prise d’assaut ces derniers mois.
"À Durbuy et dans les communes voisines, on constate un effet ‘Marc Coucke’. Un pôle d’attractivité est en train de s’y développer – des restaurants, un chef étoilé qui est une star en Flandre, un parc de loisirs – et élargit la palette de l’offre de loisirs pour les propriétaires de secondes résidences logées à proximité immédiate", ajoute ce dernier.
Les écarts se creusent d’une commune à l’autre
Cette surchauffe ciblant l'habitat rural au cœur de la nature a fait chauffer les prix à d'autres endroits. En moyenne, celui des maisons ardennaises a gonflé de +11% alors que la hausse avoisinait +6% au niveau national. Et ce qui attire toujours pour l’instant les candidats à l’achat venus d’ailleurs, c’est qu’une maison ardennaise coûte toujours en moyenne 30.000 euros de moins que le prix moyen d’une maison en Wallonie, aujourd’hui pondéré à 208.642 euros.
Cette ruée massive fait aujourd’hui le bonheur des communes wallonnes qui n’étaient jusqu’ici pas les premiers choix des acheteurs venus d’ailleurs. Ainsi, les populaires Viroinval et Hastière, qui affichent depuis des décennies les prix régionaux – voire nationaux – les plus bas (autour de 110.000 euros) et attiraient surtout des acheteurs locaux moins fortunés, sont désormais également dans les radars des demandeurs éconduits ailleurs.
Sous la pression de la demande, le prix moyen a dépassé l’an dernier le seuil des 200.000 euros dans 6 communes très courues: Durbuy (33% d'acheteurs flamands), La-Roche-en-Ardenne (40%) et Houffalize (31%), bien sûr, mais aussi Erezée (36%), Gouvy (16%) et Trois-Ponts (25%), des lieux beaucoup moins prisés par les amateurs de secondes résidences que les trois précédentes.
Des acheteurs flamands entre 51 et 65 ans
Si plus d’un acheteur sur trois ciblant l’Ardenne est originaire de Flandre pour l’instant, par endroit ce ratio est plus élevé encore, comme à Rendeux, où il atteint désormais 44%.
Dans le top 5 des communes qui enregistrent pour l’an dernier les hausses les plus fortes d’acheteurs venus de Flandre, les notaires pointent Rendeux (+13%), Rochefort (+8%), Durbuy (+7%), Manhay et Vielsalm (+6%). Et si l’on jauge plus spécifiquement l’âge de ces acquéreurs, il se situe majoritairement entre 51 et 65 ans.
Terrains à bâtir également
Sur le terrain, Frédéric Dumoulin constate également un changement de comportement récent de la part de certains investisseurs venus de Flandre. "Un engouement plus important qu’avant pour les terrains: les montants demandés ici sont beaucoup plus faibles et ils n’hésitent pas à faire monter les prix. Certains achètent pour construire une seconde résidence, mais d’autres spéculent et n’hésitent pas à investir dans des coins peu courus, comme à Bièvre par exemple, où les prix sont au plancher."