La localisation d’un bien d’investissement n’est pas quelque chose à prendre à la légère. Tous les conseillers en investissement immobilier vous le diront. "La localisation, c'est le b.a.-ba en immobilier. On peut avoir une villa au fin fond des Ardennes qui vaudra moins cher qu’un petit appartement en centre-ville. C’est le critère le plus important", martèle Nicolas Jacquet, cofondateur de OWN, société de conseil en investissement immobilier. Si un bien est mal situé, l’investisseur risque en effet d’avoir plus de difficultés à trouver un locataire et devra éventuellement faire face à du vide locatif, ce qui comprimera son rendement.
"La localisation, c'est le b.a.-ba en immobilier."
Mais le coronavirus a-t-il fait évoluer les besoins et critères concernant la localisation d’un bien d’investissement?
L’hypercentre et des espaces verts
Investir en centre urbain reste un must. Plus on est proche des facilités, mieux c’est. Parmi ces facilités, on pense notamment aux artères commerçantes, écoles, transports, hôpitaux, crèches, etc.
"Il faut cibler une série de facilités qui vont être utiles au locataire, favorables pour ficher son choix. Les centres-villes sont donc une valeur sûre. La crise n’a fait que renforcer les normes déjà établies: l’hypercentre et ses commodités, tout en gardant une bonne qualité de vie", pointe Nicolas Jacquet.
"La crise n’a fait que renforcer les normes déjà établies: l’hypercentre et ses commodités, tout en gardant une bonne qualité de vie."
"Les gens se sont rendu compte, suite à la crise sanitaire, qu’il fallait, encore plus qu’avant, avoir tout à proximité. Ils désirent avoir un maximum de facilités au pied de leur immeuble. Il est donc important, en tant qu’investisseur, de viser des quartiers avec une âme, des commerces, de l’horeca, soit des quartiers établis", confirme Adrian Devos, cofondateur de BuyerSide, société de conseil en investissement immobilier.
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Le Guide Immobilier, ce samedi 14/11, gratuit avec L'Echo.
Le confinement étant passé par là, propriétaires occupants comme locataires recherchent aussi plus de "verdure". En plus d’être proche d’une série de services, l’investisseur doit désormais regarder à la proximité de parcs, zones vertes aux alentours du bien, afin de coller à la demande et s’assurer de trouver facilement des locataires.
Le télétravail change (un peu) la donne
Pour le bureau d’expertise en immobilier Stadim, là où il était encore important de résider à proximité de son lieu de travail il y a quelques mois, cela est désormais moins nécessaire suite à la généralisation du télétravail.
"Les gens travaillent de plus en plus depuis leur domicile et cela va s’ancrer à l’avenir. Il sera donc plus important de se trouver près de services et espaces verts que près de son lieu de travail", pointe Tim Leysen. Il ajoute: "La deuxième couronne des grandes villes comme Gand, Bruxelles et Anvers répond donc à ces besoins d’espaces verts et de proximité avec certaines commodités."
Trois quartiers en devenir à Bruxelles
Adrian Devos et Nicolas Jacquet en sont convaincus: de par son statut de capitale belge et européenne, Bruxelles reste un bon terrain de jeu pour les investisseurs. "C’est une ville avec beaucoup d’expatriés, elle draine une population internationale qui vient y travailler et qui est souvent locataire. C’est aussi la plus grande ville belge où se trouvent beaucoup d’entreprises. D’autres villes offrent également des opportunités, notamment Anvers, Gand, Namur… tout en restant le plus proche possible des poumons économiques", détaille Nicolas Jacquet.
"Bruxelles est une ville avec beaucoup d’expatriés, elle draine une population internationale qui vient y travailler et qui est souvent locataire."
Adrian Devos liste de son côté, pour Bruxelles, trois quartiers à haut potentiel: La Chasse, Le Parvis de Saint-Gilles et Matongé. Par exemple, ce dernier quartier jouit d’une situation idéale, proche de la Porte de Namur, entre Louise et la place du Luxembourg, en bordure du pentagone, cœur de Bruxelles. "Le quartier évolue fortement. La chaussée de Namur a été rénovée et est devenue piétonne. Il existe encore beaucoup de biens à rénover dans le quartier, ce qui offre de belles opportunités pour les investisseurs. Il jouxte également la place de Londres, qui est en quelques années devenue ‘the place to be’", explique l’expert. La Chasse et le Parvis de Saint-Gilles profitent également d’une bonne localisation entre certaines communes et lieux-dits, avec, aux alentours, un bon parc immobilier à rénover. "Le Parvis a été rénové et il devient très branché, tout comme les quartiers l’entourant."
Investr, bureau de conseil en investissement immobilier, a analysé les opportunités en termes d’investissement pour différentes agglomérations en Belgique. Voici ses conclusions.
Bruxelles (+/-)
Selon Investr, le marché bruxellois est complexe. D’une commune, voire d’un quartier à l’autre, cela peut changer du tout au tout. "Bruxelles a un marché très divisé entre le nord et le sud, notamment", explique Frédéric Vandenhende, CEO. Son atout est qu’il y a, chaque année, un grand nombre de nouveaux résidents et donc de potentiels nouveaux locataires pour les propriétaires (+17,4% de nouveaux résidents entre 2010 et 2019). Il s’agit de la ville belge avec le plus grand nombre de locataires, "plus de 70% des résidents sont locataires à Bruxelles", précise l’expert. C’est également la ville la plus attractive en Belgique, avec beaucoup d’entreprises et donc d’emplois. "Mais il faut prendre en compte que 60% des ménages vivent avec un seul revenu, c’est beaucoup. Et le revenu moyen s’élève à 12.801 euros, ce qui n’est pas très élevé", pointe Frédéric Vandenhende, qui rappelle toutefois des différences notables entre communes. Il conseille donc de bien se renseigner sur le marché local (quartier/commune) avant d’y placer ses billes.
Charleroi (-)
La ville de Charleroi est, actuellement, un marché fort risqué pour les investisseurs, où la croissance de l’immobilier résidentiel est très fortement limitée. C’est une ville où très peu de nouveaux résidents s’installent (+ 0,1% entre 2010 et 2019). Le revenu moyen y est relativement faible (13.444 euros) et 57% des ménages ne disposent que d’un seul revenu. "Environ 400 nouveaux appartements sont vendus chaque année. Mais si personne ne vient y vivre, qui achète finalement ces appartements? Pourquoi délivrer autant de permis (256 en 2018 et 131 en 2019, NDLR)?" s’interroge Frédéric Vandenhende. Il voit toutefois plus de potentiel aux alentours de la ville, "dans des communes comme Gerpinnes, Pont-à-Celles, Fleurus… Les revenus y sont meilleurs, il y a plus de nouveaux résidents…"
Liège (-)
Le marché liégeois est similaire au marché carolo. 65% des ménages ne disposent que d’un seul revenu, "c’est énorme et anormal. Le revenu moyen est également ‘moyen’ (14.873 euros, NDLR). Il y a toutefois plus de croissance en termes de nouveaux résidents qu’à Charleroi (+2,4% entre 2010 et 2019). Par contre, les communes adjacentes à Liège, contrairement à Charleroi, sont aussi très pauvres. Notamment Herstal, Seraing, Saint-Nicolas, Sclessin… Seules quelques villes font figure d’exception (Chaudfontaine, Beyne-Heusay)." La ville de Liège est surtout composée de locataires, "les revenus n’étant pas assez élevés pour accéder à la propriété". Investr considère qu’il y a trop de doutes, de risques pour investir actuellement sur le marché liégeois, bien qu'il soit relativement bien proportionné en termes de nouveaux permis délivrés, d’offre et de demande de logements.
Namur (+)
Namur bénéficie de plusieurs atouts: présence d’étudiants, bon revenu moyen (18.159 euros), marché stable entre l’offre et la demande et en termes de permis délivrés. "On n'y construit pas trop de nouvelles unités, il y a un bon équilibre entre le nombre de nouveaux arrivants, les départs et les revenus", pointe le CEO d’Investr. Les villes adjacentes ont, elles aussi, un bon potentiel (La Bruyère, Gembloux…). "Tous les signaux sont au vert pour y investir."
Mons (+)
Le revenu moyen s’élevant à 16.166 euros et le nombre de ménages avec un seul revenu étant de 57%, il s’agit là d’une ville wallonne plus stable que Charleroi ou Liège. Il y a également plus de nouveaux résidents en moyenne (+4,5% entre 2010 et 2019). "C’est aussi assez stable en termes d’achats, d’offre et de demande. La différence avec Liège et Charleroi, c’est que les résidents des villes adjacentes à Mons disposent en moyenne du même revenu que les Montois, il n’y a pas de gros écarts (excepté à La Louvière et Quaregnon). Le contexte y est donc intéressant et propice à l’investissement. C’est la ville wallonne ayant la croissance la plus rapide."
Gand (+/-)
Le marché gantois est très atypique, "il y a eu beaucoup de transactions ces dernières années et les prix sont très élevés. D’un autre côté, c’est un marché avec 67% de locataires. Ce qui offre donc de belles opportunités pour les investisseurs, pour autant que le prix d’achat du bien d’investissement reste maîtrisé", explique Frédéric Vandenhende. En outre, la moitié des ménages (49%) vivent avec un seul revenu, qui s’élève en moyenne à 18.789 euros. "Le nombre d’habitants a augmenté de 8,4% entre 2010 et 2019, ce qui est également bon signe pour les investisseurs. Il s’agit essentiellement d’étudiants qui restent en général après leurs études, soit jusqu'à leurs 30 ans, puis quittent la ville pour fonder leur famille. Souvent, ils n’ont pas les moyens d’acheter, vu les prix de l’immobilier, et restent donc locataires plus longtemps." Le nombre de permis délivrés est relativement sous contrôle, estime l’expert, ce qui permet d’avoir une offre qui correspond relativement bien à la demande.
Anvers (+/-)
"Anvers est un peu comme Gand: il y a beaucoup de turnover, c’est un marché locatif (+- 60% des résidents) plutôt que de propriétaires. Il faut également prêter attention au prix du bien acheté et éviter d’acquérir un bien à un coût trop élevé, ce qui rongerait le rendement. Anvers jouit d’une politique visant à améliorer la qualité de vie depuis de nombreuses années, notamment en augmentant le nombre d’espaces verts, parcs, etc. pour les riverains", explique Frédéric Vandenhende. Environ un ménage sur deux vit avec un seul revenu et le revenu moyen s’élève à 16.900 euros. Le nombre de nouveaux résidents y a augmenté d’environ 9,5% entre 2010 et 2019.
Louvain (+/-)
Cette ville draine une grande population d’étudiants. "Un peu comme à Gand, la ville attire les jeunes, qui finissent par s’en aller vers 30 ans. Les biens partent comme des petits pains dans le centre, car l’offre est limitée. Le revenu moyen y est assez élevé, soit 20.706 euros." Toutefois, les prix de l’immobilier à Louvain et alentours augmentent vite, car c’est un marché où il y a déjà beaucoup d’investisseurs. C’est aussi un marché avec une majorité de locataires. La ville reste encore un bon marché pour les investisseurs, pour autant que le prix d’achat du bien soit maîtrisé. C’est une ville d’investissement par excellence au vu du nombre d’étudiants y vivant.
Bruges (-)
"C’est un marché à propos duquel je me pose beaucoup de questions quant à l'évolution dans les prochaines années", alerte l’expert. "Très peu de nouveaux résidents s’y installent chaque année (1,6%) comparé aux autres villes flamandes, et les habitants de Bruges sont très âgés. Les jeunes ne viennent plus y vivre. Les prix de l’immobilier y sont très élevés, même si leur croissance est ralentie, excepté pour les biens neufs; trop de permis sont également délivrés. C’est donc un gros problème pour l’avenir. Bruges n’attire plus les jeunes, ce qui est pourtant important à la fois pour l’emploi et le marché locatif", analyse Frédéric Vandenhende. Malgré le revenu moyen élevé (20.379 euros), Bruges reste un marché incertain pour les investisseurs.
Malines (+)
Cette ville est assez stable en termes d’offre et de demande. "Tout est sous contrôle du côté du nombre de permis délivrés, mais aussi du revenu des ménages (en moyenne 19.240 euros), qui est assez confortable", pointe l’expert. En outre, seuls 43,5% des ménages ne disposent que d’un seul revenu. Le nombre de nouveaux habitants a augmenté de 7,4% entre 2010 et 2019, bref le marché est peu risqué pour les investisseurs. "La croissance y est stable et contrôlée", conclut le CEO d’Investr.
Hasselt (-)
De prime abord, on pourrait croire qu’investir à Hasselt, vu le revenu moyen (20.720 euros) et le nombre de ménages disposant d’un seul revenu (43,5%), n’est pas très risqué. "Mais il y a un gros souci à Hasselt en ce moment: 940 appartements sont à vendre. C’est énorme proportionnellement à la taille de la ville. Trop de permis ont été délivrés récemment et on se retrouve avec une suroffre sur le marché. Cela se traduit par une hausse des prix plus lente, une croissance limitée du nombre de transactions… ce qui va in fine faire reculer les prix. Le nombre d’habitants ne croît pas assez pour combler cette suroffre (+7,7% entre 2010 et 2019)", explique Frédéric Vandenhende. Ce n’est, selon lui, pas un moment opportun pour investir à Hasselt.