La Région bruxelloise a lancé début décembre «My Permit», une nouvelle plateforme permettant d’introduire une demande de permis d’urbanisme en ligne. Si actuellement seules les instances publiques peuvent s’en servir, «cela sera également possible pour les entreprises et les particuliers courant 2021», explique le porte-parole du secrétaire d’État bruxellois en charge de l’Urbanisme, Pascal Smet. L’objectif étant de faciliter la tâche aux demandeurs, mais aussi d’accélérer un processus qui peut parfois s’avérer très long.
"En tant qu’architecte, j’applaudis cette initiative de la Région bruxelloise."
La Région wallonne devrait prochainement lui emboîter le pas: «Cette démarche est inscrite dans le chantier de la dématérialisation des permis d’urbanisme qui est actuellement en cours», explique le cabinet du ministre compétent, Willy Borsus. «La Wallonie travaille à digitaliser le plus possible de démarches, notamment les démarches urbanistiques.»
Mais, qu’il s’agisse d’une demande digitale ou version «old school» en papier, comment cela fonctionne-t-il au juste?
1. Comment demander un permis d’urbanisme?
La plupart du temps, pour les particuliers, cette demande doit être introduite auprès de l’autorité communale. Pour les permis plus importants qui concernent plus souvent des entreprises ou des autorités publiques, comme les écoles, les crèches, etc., c’est auprès du fonctionnaire délégué, autrement dit la Région (bruxelloise ou wallonne), qu’il faut effectuer la demande de permis. C’est dans ce cas précis que l’outil «My Permit» est utile.
«En tant qu’architecte, j’applaudis cette initiative de la Région bruxelloise», se réjouit Fabrizio Trobbiani. «La demande en ligne est très facile: une carte d’identité et un lecteur de carte ou bien l’application itsme suffisent pour accéder à la plateforme et effectuer les démarches, qui sont toutes expliquées en ligne», indique-t-il. «Mais il faudrait aller encore plus loin dans la digitalisation, il faudrait une vraie réforme», ajoute l’architecte.
«La demande en ligne est très facile: une carte d’identité et un lecteur de carte ou l’application itsme suffisent.»
Une série de documents doivent être fournis lors de la demande de permis: «Les plans de la situation existante de fait et de droit, les plans de projet en grand format, le plan d’implantation. Il faut mesurer les trottoirs, les parcelles voisines, on doit aller chercher les renseignements auprès des communes ou de la Région», détaille Fabrizio Trobbiani. L’avocat en urbanisme Barthélemy Gorza précise: «Il faut également un formulaire administratif de demande, les aspects liés au PEB, des documents statistiques…»
2. Quels sont les délais?
Une fois le tout récolté, la version papier de ce dossier doit être déposée à l’administration communale. «Vous recevez alors un récépissé confirmant que la demande a bien été introduire, mais la procédure ne s’enclenche que lorsque le dossier est complet.»
Une fois le dossier considéré comme complet, "vous recevez alors un accusé de réception de dossier complet et là commence l’instruction. Il existe aujourd’hui des délais de rigueur, depuis la réforme du CoBat à Bruxelles, que les autorités doivent respecter. Si l’autorité communale ne se tient pas aux délais, elle perd sa compétence, et c’est alors l’autorité supérieure, soit le fonctionnaire délégué (la Région) qui reprend la main", explique l’avocat.
"Il existe des délais de rigueur que les autorités doivent respecter."
Les délais varient d’une demande à l’autre, selon les différentes mesures d’instruction ou événements auxquels est soumise la demande de permis. Concrètement, le collège des bourgmestres et échevins a, une fois le dossier complet – il a d’ailleurs 45 jours pour se prononcer sur sa complétude –, 75 jours pour se prononcer lorsqu’il s’agit d’une demande «simple», c’est-à-dire la plupart des demandes qui concernent les particuliers et ne nécessitent pas l’intervention d’un fonctionnaire délégué ou de mesures particulières de publicité. Sinon les délais peuvent aller de 90 à 160 jours.
En Wallonie également, il existe des délais de rigueur instaurés par le CoDT. Si la demande ne requiert pas de mesures particulières de publicité ni d'avis d’instances consultatives ou du fonctionnaire délégué, l’autorité communale dispose de 30 jours. Sinon, les délais peuvent aller de 60 jours à 130 jours.
3. Quels travaux nécessitent un permis?
À Bruxelles, la dispense de permis est plutôt l’exception que la règle. En général, tous les travaux de construction, démolition, rénovation, transformation, changement de destination d’un immeuble nécessitent l’obtention préalable d’un permis d’urbanisme. Certains cas exceptionnels peuvent bénéficier d’une dispense comme la transformation d’une cuisine en salle à manger, la démolition d’une annexe invisible depuis l’espace public, l’installation de panneaux photovoltaïques tant qu’ils sont invisibles depuis l’espace public ou encore l’aménagement d’une terrasse.
En Wallonie, par contre, de nombreux travaux de rénovation ou de transformation ne nécessitent pas de permis si vous respectez bien certaines conditions. Mais il est nécessaire d’obtenir un permis d’urbanisme pour certains travaux comme un changement d’affectation, une modification de la forme du toit, la création d’un appartement dans votre habitation, la construction d’un garage, d’un mur entre deux propriétés, le placement de panneaux photovoltaïques, etc.
4. Qui peut/doit demander le permis?
Il n’y a pas de règle légale en la matière. Concrètement, vous pourriez vous-même introduire une demande de permis. Mais en général, c’est l’architecte qui s’en charge puisque, pour la plupart des travaux d’aménagement, de rénovation ou construction, son intervention est nécessaire, voire obligatoire.
«Dans les faits, c’est l’architecte, qui représente également le maître d’ouvrage, qui effectue la demande, mais les documents doivent être signés à la fois par l’architecte et le maître d’ouvrage», précise Fabrizio Trobbiani.
«Dans les faits, c’est l’architecte, qui représente également le maître d’ouvrage, qui effectue la demande.»
Me Barthélemy Gorza ajoute: «Il existe de petits permis sans architecte, mais c’est très rare et le dossier est tellement compliqué à composer qu’on passe souvent par un architecte.»
5. Combien coûte-t-il?
Difficile de donner un prix moyen pour les experts. «Tout dépend de l’ampleur du projet», indique Me Barthélemy Gorza, et donc de l’ampleur du permis à demander. «Mais il existe des coûts liés à la démarche qui sont incompressibles, ce qui pénalise les petits permis», reconnaît l’architecte Fabrizio Trobbiani. «On a autant de documents à remettre, que le permis soit petit ou grand, c’est-à-dire qu’il s’agisse de petits travaux ou d’une rénovation en profondeur.»
Mais, concrètement, pour ces petits permis, il faut compter entre 2.500 et 3.000 euros, chiffre-t-il. Pour les plus grands permis, par exemple la rénovation d’une maison, il faudra là débourser quelque 5.000 euros.
6. Et s'il est refusé?
«Si le projet est problématique, je conseille toujours de le régler avec les autorités durant la procédure d’instruction. Il est possible d’introduire des plans modificatifs durant la procédure, d’adapter sa première demande de permis sur la base des commentaires qui ont été faits par l’administration communale, puis ensuite de soumettre ces nouveaux plans à l’autorité», explique Me Gorza.
"En cas de refus, le demandeur peut introduire un recours interne à l’administration régionale."
Si in fine, l’administration refuse votre demande de permis, «le demandeur peut introduire un recours interne à l’administration régionale (Région bruxelloise ou wallonne, NDLR). Le gouvernement régional va alors refaire le même examen du dossier qui a été effectué par la commune, puis prendra une décision. C’est alors la Région qui délivrera le permis», explique l’avocat. Il existe un délai de 30 jours à dater la réception de la décision de refus pour introduire ce recours auprès de votre Région.