Vous avez l’intention de commander bientôt une nouvelle voiture de société? Vous remarquerez que les prix de certains modèles ont sensiblement augmenté. "Les mensualités du leasing sont actuellement supérieures de 2 à 4% en moyenne à celles de l’an dernier", nous déclare une source bien placée dans le secteur.
Ce renchérissement est dû en grande partie à la difficulté de revendre les voitures diesel sur le marché de l’occasion. Selon le spécialiste en analyse des données du marché automobile Gocar Data, quelque 34.192 voitures d’occasion, soit près de 30% du stock belge en ligne, sont à vendre depuis déjà plus de quatre mois. Deux-tiers de ces voitures "invendables" roulent au diesel. Gocar Data estime qu’un même modèle diesel a perdu, en l’espace d’un an, 11% de sa valeur, soit pas moins de 2.000 euros.
Or, les entreprises de leasing calculent leurs tarifs mensuels sur la base de la "valeur résiduelle" estimée, c’est-à-dire le prix qu’elles espèrent pouvoir obtenir d’une voiture de société au terme d’un contrat de leasing. Mais, comme les véhicules diesel d’occasion ne sont plus vendus que moyennant de gros rabais, leur valeur résiduelle chute, ce qui fait remonter mécaniquement les tarifs du leasing des nouvelles voitures.
"Au cours de ces dernières années, de nombreuses marques ont mis sur le marché des volumes très importants. Et cela se répercute à présent sur la valeur résiduelle."
L’étoile des véhicules au diesel pâlit depuis le début de l’année 2017. La part du diesel dans le total des voitures vendues en Belgique est passée, l’an dernier, de 46 à 35%, selon les chiffres de la fédération automobile Febiac. Sur le marché des entreprises, la part du diesel se situe encore à 52%. "La menace d’une interdiction des voitures diesel dans les villes, l’instauration de zones à faibles émissions à Bruxelles et à Anvers et le prix plus élevé de ce carburant à la pompe dissuadent de nombreux Belges d’acheter de tels véhicules", explique Steven Brandt, gérant du commerce de voitures d’occasion Autobrandt à Anvers. "Une Nissan diesel de trois ans est devenue tout simplement invendable, sauf à un prix cassé. Aujourd’hui, acheter un véhicule diesel ne vient plus à l’idée de personne."
Offre surabondante
L’abondance de l’offre de voitures de société d’occasion pèse également sur la valeur résiduelle des véhicules. Pendant des années, des constructeurs comme BMW ont inondé le marché de l’entreprise de voitures diesel parce qu’il existait une forte demande de modèles d’occasion vendus souvent à des prix très attractifs.
Aujourd’hui, cette masse de véhicules se vend plus difficilement sur le marché de l’occasion. "Au cours de ces dernières années, de nombreuses marques ont mis sur le marché des volumes très importants. Et cela se répercute à présent sur la valeur résiduelle", fait observer Miel Horsten, qui dirige l’entreprise de leasing ALD Automotive. Et ce d’autant plus que le débouché qu’ont pu constituer les marchés étrangers pour les diesels d’occasion s’est lui aussi fortement tari.
étude
Les délais pour vendre des voitures d'occasion s'allongent en Belgique, particulièrement pour les véhicules diesel. Les vendeurs pourraient donc se tourner vers l'étranger
Malgré les discours rassurants de plusieurs constructeurs automobiles, on l'avait déjà entendu plusieurs fois dans le marché. Les valeurs des véhicules d'occasion souffrent sur le marché automobile. Une réalité que Gocar Data, qui travaille dans l'analyse des données du marché automobile, a voulu étayer avec des chiffres.
Premier constat: près de 30% des voitures d'occasion sur le marché belge le sont depuis au moins quatre mois, soit "un stock d'invendus d'une valeur marchande de 805,2 millions d'euros", pointe Gocar Data. "Quatre mois, c'est plutôt long quand on sait qu'un concessionnaire mise toujours sur une rotation de son stock de voitures dans les deux mois maximum", ajoutent les analystes.
Au total, 34.192 voitures se retrouvent dans cette situation. "Ce sont surtout les voitures diesel qui s'écoulent difficilement. Les Belges souffrent d'une 'crainte du diesel'et se tournent pour l'instant davantage vers d'autres types de moteurs, tels que l'essence ou le LPG", indique Derek D'Ursel, cofondateur de Gocar. Il rappelle que bon nombre de ces diesels d'occasion sont pourtant récents et peuvent encore circuler dans les zones de basse émission.
Gocar Data a estimé qu'un véhicule diesel équivalent d'occasion avait subi une décote de 2.000 euros en un an. "En outre, il faut compter à peu près sept euros par jour, soit 840 euros pour quatre mois, pour l'entretien et le stockage d'un tel véhicule diesel", indique Marc Gros, analyste dans l'entreprise. L'un dans l'autre, le manque à gagner sur un véhicule diesel d'occasion non vendu dans les 4 mois serait donc de 2.840 euros.
Les revendeurs de voitures se tournent donc vers les pays de l'Est et le Sud de l'Europe pour écouler leurs diesels d'occasion. "La valeur marchande d'une VW Golf 1,6 TDI de trois ans avec 125.000 kilomètres au compteur était récemment 28% plus élevée au Portugal qu'en Belgique", nous communique CarsOnTheWeb, un site internet de vente aux enchères de véhicules.
Ce dernier s'est associé avec Gocar Data pour trouver le meilleur marché au meilleur moment pour la vente des voitures d'occasion. L'occasion tant pour les vendeurs belges et les acheteurs des pays du Sud et de l'Est de l'Europe de réaliser une meilleure affaire.
"À partir du 1er février, les acheteurs néerlandais, français, italiens et luxembourgeois pourront voir à quel prix ils peuvent vendre les voitures belges proposées sur leur propre marché. D'ici la fin 2019, ce qu'on appelle le prix à la consommation sera étendu dans au moins encore 15 autres pays", souligne Derek D'Ursel.
Reste à voir comment ce marché de seconde main va évoluer dans les pays de l'Est et du Sud de l'Europe, dans les mois et années qui viennent. Le marché de l'occasion là-bas doit en effet absorber beaucoup de voitures de l'Europe de l'Ouest notamment d'Allemagne.
Benjamin Everaert