S’il est trop tôt pour évaluer le coût de l’hospitalisation et des soins ambulatoires qu’un patient Covid-19 sera amené à supporter lui-même, il est clair que la facture globale sera salée. La prise en charge des victimes du virus est souvent longue et lourde. Tout dépendra donc de leur passage ou non par une unité de soins intensifs, du coût des mesures d’hygiène, du matériel, des médicaments et, bien sûr, de la durée du séjour à l’hôpital. Sans oublier le suivi médical durant la longue convalescence.
Les mutuelles indiquent qu'elles n’ont encore aucune idée précise de la facture des hospitalisations liées au coronavirus puisque les premières arriveront bien après que les patients aient quitté l’hôpital.
Les assureurs privés confirment. "Nous n’avons pas encore reçu suffisamment de factures pour établir un coût moyen statistiquement relevant. Les factures sont en général envoyées deux mois après l’hospitalisation. Nous nous attendons donc à avoir plus d’informations à ce sujet d’ici la mi-mai au plus tôt, les hôpitaux ayant d’autres priorités en ce moment…", confirme Benoit Halbart, Director marketing & communication, Employee Benefits/Health Care chez AG Insurance.
"Jusqu'à ce que la situation se normalise, DKV a décidé d’allonger les périodes de remboursement pour les visites ou examens médicaux qui ne peuvent pas, à cause du coronavirus, avoir lieu durant la période de pré- et post-hospitalisation initialement prévue."
Mais pour donner une idée, "si l’on se réfère à des pathologies 'comparables’ au Covid-19, comme l’œdème pulmonaire, la pneumonie ou l’embolie pulmonaire, le coût d’une hospitalisation moyenne est de 1.500 à 2.000 euros pour l’assureur (donc après intervention de la sécurité sociale)", poursuit-il.
Compte tenu des remboursements prévus dans le cadre de l’Inami et de la couverture offerte par les assureurs (privés), on peut toutefois se montrer relativement rassurant. Les dépenses à supporter par un malade Covid-19 devraient correspondre plus ou moins à celles liées à une hospitalisation classique. Toutes les informations dont on dispose à ce stade permettent en tout cas de dire que le maximum sera fait pour limiter l'impact financier pour les victimes de la pandémie. Explications.
À l’abri des suppléments d’honoraires
Les patients Covid-19 ne doivent pas s’inquiéter: il n’y aura pas de suppléments d’honoraires, rassurent en chœur les mutualités. Effectivement, un patient qui se présente aux urgences - ce qui est le cas pour les personnes atteintes par le coronavirus -, est d’office pris en charge sous le statut chambre commune.
Il paiera donc uniquement le ticket modérateur (montant qui reste à charge du patient après l’intervention de l’assurance obligatoire), et ce quel que soit l’hôpital dans lequel il est admis.
Si, ensuite, le patient doit occuper une chambre individuelle parce que son état de santé le nécessite (pour éviter la contagion, les personnes atteintes du coronavirus sont automatiquement placées à l’isolement en chambre privée) et non par choix, ou s’il doit intégrer une unité de soins intensifs (USI), aucun supplément d’honoraires ne pourra non plus lui être facturé.
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Signalons encore qu'un ultime garde-fou est prévu: le maximum à facturer (MAF). Les frais médicaux qui restent à votre charge sont plafonnés (en fonction des revenus du ménage). Concrètement, à partir du moment où est atteint le plafond des tickets modérateurs qui vous sont portés en compte pour vos frais médicaux et vos achats à la pharmacie, vous ne devrez plus rien payer. Il n’y a aucune démarche à entreprendre. Le MAF est accordé automatiquement. Tous les tickets modérateurs au-delà du plafond vous seront à partir de ce moment-là intégralement remboursés par votre mutuelle.
Attention, les suppléments d’honoraires qui vous ont éventuellement été réclamés par les prestataires de soins n’entrent pas en considération pour le MAF!
Une facture 0 euro pour le patient?
"Pour les patients qui doivent séjourner deux à trois semaines à l’hôpital, la facture des tickets modérateurs (calculés sur les médicaments, le prix de journée et certains honoraires de médecins) peut quand même être conséquente", a mis en garde le Secrétaire général de Solidaris, Jean-Pascal Labille.
Selon lui, "les patients frappés par cette terrible maladie, ainsi que leurs proches, ne devraient plus se préoccuper de leur facture de soins. Les patients Covid-19 étant clairement identifiés par un code spécifique, les hôpitaux pourraient facturer directement à l’assurance-maladie 100% de la facture, tickets modérateurs compris. Ils n’auraient alors rien à payer", avait-il dès lors suggéré. "Une demande qui est jusqu'ici restée sans suite, alors qu'elle rencontrait une certaine adhésion", note Bruno Deblander, directeur de la communication externe chez Solidaris.
Le PTB a déposé une proposition de loi en vue de la reconnaissance du Covid-19 comme maladie professionnelle pour tous, qui sera discutée en urgence la semaine prochaine en commission Affaires sociales. À ce stade, le coronavirus est reconnu comme maladie professionnelle pour les seuls travailleurs des soins de santé (ambulanciers, personnel hospitalier, des maisons de repos, etc.).
"La reconnaissance comme maladie professionnelle donne droit au remboursement de 100 % des frais médicaux et d’hospitalisation, souligne Sofie Merckx, médecin et députée PTB. Cela signifie également que les salariés perçoivent 90% de leur dernier salaire (…) alors que sous l’assurance-maladie, on retombe à 65% de son salaire après un mois, voire 40% pour les cohabitants."
L’assurance-hospitalisation...
En tout état de cause, il est toujours utile et rassurant de pouvoir compter sur son assurance-hospitalisation pour absorber l’essentiel des coûts qui restent à charge du patient.
Précisons-le d'emblée car c'est essentiel: les assurances-hospitalisation couvrent les frais d’hospitalisation et ambulatoires liés au Covid-19 au même titre que tous les autres. Il n'y a donc aucune exclusion liée à cette pathologie. Les assureurs rappellent toutefois que les conditions générales et tarifaires du contrat restent d’application. À quelques nuances près, puisqu’ils se sont quand même eux aussi adaptés aux circonstances. Pourquoi? Comment?
Suite à l’annonce du confinement, du jour au lendemain, la chaîne des soins a été brisée. Les hôpitaux et les prestataires de soins ont reporté sine die les opérations, consultations, traitements et soins considérés comme non urgents. Les patients eux-mêmes, par peur de surcharger des soignants déjà si sollicités, ou par crainte d’attraper le coronavirus, ont reporté des soins urgents, voire essentiels.Une situation qui n’est pas sans incidence sur leur santé d’abord, mais aussi sur le remboursement de leurs frais médicaux par l’assurance-hospitalisation.
... étend ses couvertures "pré" et "post"
"Qu’il s’agisse d’assurances collectives ou de polices individuelles, la plupart de nos clients ont une couverture pré-op de 1 mois et de 3 mois post-op, mais il y a plusieurs cas de figure allant jusqu’à 2 mois pré et 6 mois post", explique Benoit Halbart.
Le problème, c’est qu’en raison du report des soins - qui n'est pas encore en voie de normalisation et risque donc d'avoir des effets à long terme -, "les différents frais encourus avant l’hospitalisation (visite chez le médecin, le kiné, les médicaments, prises de sang et autres examens) ne peuvent plus relever de la période de pré-hospitalisation (généralement 30 jours). Il se peut également que des clients aient des frais médicaux à la suite d’une hospitalisation, et qui, en raison des mesures liées au coronavirus, doivent être reportés. Cela signifie que la période post-hospitalisation (généralement 90 jours) ne sera pas suffisante", explique Birgit Hannes, Chief Commercial Officer de DKV.
C’est la raison pour laquelle, "jusqu’à ce que la situation se normalise, DKV a décidé d’allonger les périodes de remboursement pour les visites ou examens médicaux qui ne peuvent pas, à cause du coronavirus, avoir lieu durant la période de pré- et post-hospitalisation initialement prévue".
Même souplesse chez AG. Si votre admission à l’hôpital pour une opération planifiée a été reportée, nous rembourserons temporairement les frais ambulatoires pour la période précédant la date planifiée ainsi que ceux exposés entre la date d’hospitalisation initialement prévue et la nouvelle date fixée.
Un exemple. Marc devait être hospitalisé le 1er avril 2020, mais son opération a été reportée au 15 mai en raison des mesures liées au coronavirus. Son assurance-hospitalisation prévoit une couverture d’un mois des frais pré-hospitalisation. Elle remboursera donc exceptionnellement les frais médicaux ambulatoires liés à l’hospitalisation qui ont été exposés entre le 1er mars et le 15 mai.
"Nous élargissons également les périodes post-hospitalisation qui couraient au-delà du 13 mars (début de la période de confinement) pour autant que les frais engendrés soient en relation directe avec l’intervention et soient médicalement nécessaires", poursuit Benoit Halbart.
Un exemple. Sylvie a été hospitalisée le 13 février 2020 pour une intervention au genou. Son assurance couvre une période " post " de 3 mois. Ses frais de kiné seront remboursés pendant 2 mois après la réouverture des services non urgents, puisqu’un mois a déjà été couvert entre le 13 février et le 13 mars. " Il suffit que l’assuré nous le signale pour déclencher cette mesure exceptionnelle. Ce principe s’applique en tenant en compte la durée ‘post’ du contrat du client ", précise Benoit Halbart.
Les mutuelles ont également pris les devants. "Les soins pré- et post-hospitalisation tombant en dehors des périodes prévues (30 jours et 90 jours) à cause du coronavirus seront couverts par l’assurance-hospitalisation sur la base d’une simple attestation de l’hôpital précisant le report de l’intervention ou des soins post-hospitalisation", communique la Mutualité Chrétienne. "Nous adaptons les assurances-hospitalisation en fonction des circonstances, tant pour les délais pré- que post-hospitalisation", indique Bruno Deblander (Solidaris).
Vous avez fait un test de dépistage du coronavirus?
Vous serez remboursé à 100% par l’assurance obligatoire, si le test a été réalisé par un laboratoire de référence. Les autres labos ont reçu pour instruction de retenir temporairement la facturation des tests aux patients.
Vous avez eu une téléconsultation avec votre médecin?
Les médecins sont autorisés temporairement à organiser des téléconsultations afin de trier et orienter les patients potentiellement atteints par le virus, pour garantir la continuité des soins et pour les personnes souffrant de maladies chroniques ou faisant partie de groupes à risques (seniors, etc.). Ces prestations pour lesquelles un nouveau code Inami spécifique a été prévu, peuvent être facturées 20 euros en tiers payant : les honoraires sont payés directement au médecin par la mutualité, dans le cadre de l’assurance maladie.
Vous êtes placé en quarantaine en raison du coronavirus?
Si vous devez être placé en quarantaine sans que vous soyez malade, "ce séjour préventif ne sera pas couvert par votre assurance hospitalisation", indique sur son site AG Insurance qui ajoute que "ces frais sont en principe pris en charge par les autorités locales ou belges".Vous êtes en chômage temporaire à cause du Covid-19. Étes-vous toujours couvert par l’assurance hospitalisation collective?
"Oui. Vous restez, ainsi que les membres de votre famille (s'ils sont également assurés), affiliés à l'assurance hospitalisation collective pendant cette période de chômage temporaire. Vous êtes donc bien assurés dans le cas où vous devriez être hospitalisé", lit-on dans les FAQ de DKV.