(mon argent) - Les produits bio sont plus chers que leurs équivalents non bio, cela ne fait aucun doute. L'échantillon annuel composé par le VLAM (équivalent flamand de l’Agence wallonne pour la promotion d’une agriculture de qualité APAQ) montre que l’an dernier, la différence entre les deux atteignait 30% en moyenne. Mais ce chiffre doit être pondéré. Alors que l’écart de prix atteignait 71% pour un poulet bio, il n’était que de 19% pour un burger aux légumes.
Il faut tenir compte aussi d’une forte variation des prix d’une année à l’autre. En 2008, ce même poulet bio vous coûtait le double d’un poulet classique. Ces brusques fluctuations sont dues au caractère cyclique du marché bio. Des périodes d’excédents et de prix bas succèdent à des périodes de relative rareté et de prix élevés. C’est généralement ce fonctionnement cyclique qui justifie les différences de prix que vous observez.
"Cycle de la pomme de terre"
Dans la formation des prix, c’est le "cycle de la pomme de terre" qui fait office de référence pour les produits issus de l’agriculture. Dans le cas de l’agriculture biologique, des facteurs comme l'étroitesse du marché et le volume de récolte plus réduit accentuent encore le phénomène. Un agriculteur bio n’utilise pas de pesticides; il doit donc consacrer plus de temps au désherbage et sa récolte est moins importante que celle de l’agriculteur qui n’est pas tenu de respecter ces règles.
En plus d’une forte intensité de travail, les processus liés à l’agriculture biologique impliquent aussi des investissements plus conséquents: les semences et les plants sont en effet plus chers. Qui plus est, l’agriculteur qui passe au bio doit tenir compte d’une période transitoire de 6 mois au cours de laquelle il n’a quasiment pas de revenus. Et compte tenu de la lenteur de cette procédure, le marché est moins susceptible de répondre aux pics de la demande.
Les coûts liés à la transformation des produits bio sont plus élevés, eux aussi, car toutes les matières premières doivent être d’origine biologique. Voilà pourquoi l’écart de prix par rapport aux produits classiques sera plus important pour une lasagne fraîche bio, par exemple, que pour une tomate fraîche bio. Les coûts de distribution (plus de kilomètres parcourus pour de moindres quantités) sont plus élevés aussi. Enfin, le contrôle qualité obligatoire et le label Biogarantie (la "marque" qui rassemble les anciens labels BLIK et Ecocert) se répercutent aussi sur le prix.
A quand une baisse des prix?
Conclusion: il y a peu de chance qu’un jour, nous payions au même prix le bio et le non-bio. Les coûts liés aux réglementations ne disparaîtront pas et les coûts de distribution et de transformation ne diminueront que si la part de marché augmente. L’an dernier, le bio représentait tout juste 1,5% (350 millions d’euros) des dépenses alimentaires des Belges. Le secteur reste donc très confidentiel, ce qui se répercute immanquablement sur le prix. Tant que le marché ne décollera pas véritablement, il ne faudra pas espérer de baisse structurelle des prix.
La seule lueur d’espoir, ce sont certains changements importants dans la distribution. Cela fait longtemps que le bio n’est plus l’affaire de petites boutiques de pulls tricotés main. La moitié des achats sont effectués en grandes surfaces et cette part de marché est en croissance. Il est significatif de constater que des chaînes à bas prix comme Aldi et Lidl s’arrogent une part des dépenses bio des ménages qui a pratiquement doublé en un an (1,5% en 2008, contre 2,7% en 2009). La part des magasins spécialisés est en hausse également, en raison notamment du succès de concepts comme Bioplanet, la filiale de Colruyt. Ces changements dans la distribution indiquent que le bio est devenu une niche commerciale intéressante. Tôt ou tard, le jeu de la concurrence pèsera donc sur les prix. Et c’est tant mieux pour le consommateur.
To bio or not to bio
Un produit n’est "cher" ou "bon marché" que par rapport à un schéma de dépenses déterminé. En 1950, les dépenses alimentaires engloutissaient près de la moitié des revenus des ménages. En 1970, ce pourcentage n’était plus que de 30% et aujourd’hui, il n’atteint même pas les 12%. Cette "dévaluation" de l’alimentaire a une grande influence sur notre mode de consommation. Disons tout simplement que nous rechignons à dépenser de l’argent pour de la nourriture. Ce qui pousse les producteurs bio à argumenter ainsi: nos produits ne sont pas chers, ce sont les autres qui sont trop bon marché.
Les écarts de prix étant fonction des habitudes alimentaires, nous avons composé un panier "neutre", à base de pâtes, de légumes, de fruits et un panier "malbouffe" contenant davantage d’en-cas, de sauces et de viande. À vous de juger.