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Faites vos comptes avant de donner

Donner un coup de pouce aux enfants ou éviter les droits de succession? On donne toujours avec les meilleures intentions, mais il ne faut pas oublier de penser à soi. Veillez donc à garder suffisamment de capital en réserve pour passer vos vieux jours en toute quiétude, surtout en ces temps où les taux d’intérêt sont au plus bas.
©Photo News

Vous avez payé des impôts toute votre vie et vous ne voulez pas qu’après votre mort, le fisc empoche en plus des droits de succession. Voilà un argument souvent avancé pour donner une partie de son patrimoine de son vivant et ne pas tout laisser pour après son décès. "Mais le choix entre donner ou léguer ne se résume pas à une histoire fiscale", rétorque Jo Stremersch, de la société de planification financière Stremersch, Van Broekhoven & Partners. "Dans de nombreuses familles, le premier problème ce n’est d’ailleurs pas la fiscalité. Les droits de succession sont souvent surestimés."

1. Donner procure-t-il un avantage fiscal?

Les taux des droits de succession sont progressifs. Pour des successions aux enfants, aux petits-enfants et au partenaire, on paie 3% sur la première tranche de 50.000 euros à Bruxelles et en Flandre et sur la première tranche de 12.500 euros en Wallonie. Les taux augmentent lentement ensuite, mais de façon différente d’une région à l’autre.

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  • On atteint 24% à partir de 250.000 euros et 30% au-delà de 500.000 euros, progressivement en passant par 6 tranches intermédiaires en Wallonie et 3 tranches à Bruxelles.
  • En Flandre, on paie 9% entre 50.000 euros et 250.000 euros et 27% au-delà de 250.000 euros.

"Sur le plan fiscal, l’idéal est de rester sous la limite des 250.000 euros" pour Vincent Hovine, planificateur patrimonial chez Puilaetco Dewaay. En effet, au-delà, on est proche du taux d’imposition maximal, qui s’applique sur tout ce qui dépasse ce montant. Pour les parents en ligne directe, les taux ne sont pas calculés sur la valeur totale de la succession, mais par héritier. Concrètement, si un père laisse 500.000 euros à ses deux filles, chacune sera imposée séparément sur sa part de 250.000 euros. Pour les autres héritiers, en revanche, les régions bruxelloise et flamande calculent le taux d’imposition sur la somme des parts receuillies par ces personnes.

À l’inverse de la Flandre, qui fait sortir les immeubles de la succession en ligne directe pour les imposer à part (ce qui réduit les droits à payer), tout ce que possédait le défunt se retrouve dans le même paquet à Bruxelles et en Wallonie.

"La motivation fiscale pour faire un don dépend souvent de l’âge du donateur, selon le notaire Carol Bohyn. Celui qui veut faire une donation quand il est encore jeune, une fois prépensionné par exemple, le fait souvent pour soutenir ses enfants ou petits-enfants. À un âge plus avancé, les considérations fiscales prennent le dessus et les petits-enfants gagnent en importance."

2. Êtes-vous prêt à donner? Et qu’en pensent vos enfants?

"Hormis l’aspect fiscal, les aspects familiaux et psychologiques jouent un rôle également", ajoute Vincent Hovine. Une première question qui se pose est de savoir si vous êtes prêt à donner. "Tout aussi importante est la question de savoir si les enfants, de leur côté, sont prêts à recevoir. Pourront-ils gérer le patrimoine qu’on leur met ainsi entre les mains? Pourront-ils faire face intelligemment aux propositions qu’on va leur faire?", observe Jo Stremersch. Le planificateur indépendant souligne aussi l’importance des relations familiales. "Si des parents font une donation à un enfant, ils veulent cependant que le patrimoine reste dans la famille en cas de divorce éventuel. En même temps, mettre cette condition peut affecter leur relation avec les beaux-enfants. Autre exemple: donner un immeuble aux enfants en indivision n’est pas toujours un cadeau."

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3. De combien avez-vous besoin pour vivre confortablement?

Vient ensuite la question de savoir combien vous pouvez donner. Certes, vous voulez donner un coup de pouce aux enfants ou réduire la facture fiscale finale, mais "donné, c’est donné". Tout le monde aspire à vivre confortablement, sans être confronté à des problèmes financiers dans ses vieux jours. "La plupart des gens sont prudents et, comme on dit, ne se déshabillent pas avant d’aller dormir. Un grain de sable peut se glisser dans l’engrenage, observe Carol Bohyn. Mais d’aucuns ne savent pas vraiment ce qu’ils dépensent chaque mois ou chaque année et n’ont aucune idée du capital dont ils auront besoin jusqu’en fin de vie."

On ne doit donner que ce dont on n’aura vraiment plus besoin. Jo Stremersch fait observer que "l’actuelle faiblesse des taux d’intérêt réduit les possibilités de faire des donations. Il faut déjà disposer d’un gros capital pour justifier qu’on en donne une partie de son vivant. Ce n’est qu’en cas de revenus de pension ou de loyers suffisants qu’on n’a pas vraiment besoin d’un capital important."

Avant de parler de planification successorale, il faut donc commencer par une planification financière. Vous devez calculer de combien vous aurez besoin pour couler vos vieux jours, en prévoyant une marge suffisante pour faire face à d’éventuelles dépenses en soins de santé. Ce n’est que le surplus que vous pouvez donner à la génération suivante ou à quelqu’un d’autre. S’il n’y a pas de surplus, la donation n’est pas une option et vous devez laisser votre patrimoine aller vers la succession.

Comment faire un plan financier?

1. Quels sont les "ingrédients"?

Commencez par faire la liste des biens que vous possédez et des coûts qu’ils entraînent (coûts d’exploitation, d’entretien, etc.). "Dresser l’inventaire de son patrimoine paraît simple à première vue, mais la pratique nous apprend que ce n’est souvent pas le cas. Rares sont ceux qui sont organisés au point d’avoir rassemblé cet inventaire en un seul endroit", observe Jo Stremersch. Au fil des ans, on a accumulé de l’immobilier, des assurances, des sociétés, des placements ou des œuvres d’art. Un état du patrimoine vous apprend beaucoup sur sa composition, mais vous donne aussi une idée de sa croissance annuelle et de sa provenance: revenus de capital ou revenus du travail.

2. Quel niveau de vie souhaitez-vous maintenir?

Pendant votre carrière, vous percevez un revenu professionnel, mais une fois à la retraite, vous n’avez plus qu’une pension légale. Et souvent, elle ne suffit pas à maintenir votre niveau de vie. Vous avez donc besoin d’un complément. Et ne vous leurrez pas, une fois pensionné, vous ne dépenserez pas moins: vous aurez plus de temps libre pour voyager, vous adonner à vos loisirs, etc. Avec l’âge, le risque de problèmes de santé s’accroît également. Aussi devez-vous intégrer dans vos calculs les coûts de ces soins de santé ou d’un séjour dans une maison de repos ou autre.

3. Quelle est votre espérance de vie?

Une fois que vous avez estimé le revenu supplémentaire dont vous aurez besoin chaque année, il faudra estimer le nombre d’années que vous avez encore devant vous. Bien malin qui peut répondre à cette question. Et Jo Stremersch de prévenir: "Ne tablez pas sur l’espérance de vie moyenne. Prévoyez une marge. Le mieux est de partir d’une espérance de vie de 100 ans."

4. Quel rendement peut-on viser?

Le besoin d’un revenu complémentaire pendant le reste de votre vie doit ensuite être converti en un capital. Il faut pour cela estimer le rendement attendu de vos placements. Et cet exercice n’est pas gagné d’avance: qui peut donner un taux d’intérêt réaliste pour ces

25 prochaines années? "Jadis, on travaillait souvent avec un rendement de 4% l’an et une inflation de 2%, soit un rendement net annuel de 2%. Mais aujourd’hui, avec le niveau actuel des taux d’intérêt, c’est hors de question, a fortiori pour les années à venir, avertit Jo Stremersch. Pour les prochaines années, un taux de 0% net est nettement plus réaliste. Avec pour conséquence qu’il faut disposer d’un capital bien plus important qu’avant si on veut le garder intact."  

Guide Succession 2016

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