Marie-Paule et son époux François ont décidé d’investir une partie de leurs économies dans l’immobilier. Ils ont donc acheté un terrain à bâtir sur lequel ils veulent construire un immeuble à appartements. Une partie des appartements sera mise en location, les autres seront destinés à être vendus. Et pendant que François s’occupe de coordonner les travaux, Marie-Paule se penche sur le portefeuille d’assurances nécessaires pendant les différentes phases du projet.
Pendant la phase de construction
→ L’Assurance Tous risques chantier
En quoi est-elle nécessaire? Une assurance TRC (Tous Risques Chantier), ou assurance chantier, permet à Marie-Paule et François d’assurer leur chantier contre les dommages matériels, les vols et les accidents, mais aussi d’être couverts en cas de dommages causés à des tiers. "Ce ne serait pas la première fois que pendant la construction d’un garage sous-terrain, des fissures apparaissent dans les murs des voisins. Sans une bonne assurance, cela peut vite se transformer en catastrophe financière", prévient Filip Dewaele, du Groupe Dewaele.
La conclusion d’une assurance TRC est une pratique courante chez les entrepreneurs généraux, qui souscrivent une assurance globale pour tous leurs chantiers. Néanmoins, Marie-Paule et François ont de bonnes raisons de prendre une assurance chantier en tant que maîtres d’ouvrage également. "Surtout si on s’inquiète de la solvabilité des autres acteurs du chantier, en cas de risque de réclamations du voisinage ou lorsqu’il s’agit de travaux (de rénovation) qui ne sont pas suivis par un architecte ou un entrepreneur général", explique-t-on du côté de la fédération sectorielle Assuralia.
Marie-Paule doit veiller à ce que l’assurance soit conclue avant le début des travaux. Il lui est conseillé aussi de prendre suffisamment de marge quant à la durée de l’assurance, afin d’éviter que le contrat ne vienne à échéance avant la fin des travaux. Si nécessaire, la garantie peut être prolongée.
Combien ça coûte? Selon Assuralia, la fédération du secteur, la prime à payer pour un projet de nouvelle construction varie en moyenne de 0,8 à 1% du coût des travaux.
→ L’Assurance responsabilité décennale
En quoi est-elle nécessaire? Une assurance responsabilité décennale doit être souscrite par les entrepreneurs, les architectes et autres prestataires de services du secteur de la construction (comme les bureaux d’étude) pour tous les permis d’urbanisme pour lesquels l’intervention d’un architecte est requise. Du moins lorsque ces acteurs fournissent des prestations ou des travaux en lien avec le gros-œuvre.
Jusqu’il y a peu, cette assurance n’était obligatoire que pour les architectes. Depuis juillet, elle l’est aussi pour les autres acteurs de la construction.
L’assurance qui a été prise par les acteurs de la construction couvre Marie-Paule et François (tout comme les futurs acheteurs des appartements qu’ils mettront en vente) contre les sinistres qui tombent sous le coup de la responsabilité décennale. Concrètement, il s’agit de problèmes liés à la stabilité, la solidité et l’étanchéité du gros œuvre lorsque ce dernier met la solidité et la stabilité de l’immeuble en péril. Si ces problèmes apparaissent dans les dix ans après la construction, les acheteurs des appartements peuvent frapper à la porte des différents acteurs de la construction pour le préjudice qu’ils subissent.
Marie-Paule et François ne doivent donc pas eux-mêmes souscrire une telle assurance. Par contre, tous les acteurs qui participent à la construction de leur projet doivent leur fournir avant le début du chantier une attestation qui prouve qu’ils ont bien conclu cette assurance de leur côté.
Lors de la mise en location
→ L’Assurance incendie
En quoi est-elle nécessaire? Il n’y a aucune obligation légale de souscrire une assurance incendie, mais tout expert estime que c’est incontournable. À vrai dire, le terme "assurance incendie" est trompeur, car il couvre bien plus que les dommages causés par le feu. En effet, l’assurance incendie indemnise aussi les dégâts causés par une tempête, l’eau, des catastrophes naturelles, des collisions (voitures), ainsi que la responsabilité vis-à-vis de tiers (par exemple, un incendie qui cause préjudice aux voisins).
"Dans un immeuble à appartements, on opte souvent pour ce qu’on appelle une police de bloc", explique Filip Dewaele. Le syndic conclut alors pour tous les propriétaires une police englobante, qui couvre chaque propriétaire pour sa partie. En principe, une telle police est moins chère que la somme de toutes les polices que les propriétaires souscriraient individuellement. Et souvent, l’indemnisation va plus vite en cas de sinistre, vu qu’il n’y a qu’une seule compagnie d’assurance concernée.
Une police de bloc ne couvre pas les biens personnels ni les meubles meublants. On a toujours besoin d’une assurance séparée pour couvrir ces risques.
Combien ça coûte? La prime annuelle pour un appartement de 200.000 euros est de l’ordre de 160 euros.
→ L’Assurance responsabilité civile (RC)
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En quoi est-elle nécessaire? L’assurance responsabilité civile (RC) indemnise tout dommage causé à des tiers. Comme une tuile du toit qui tombe sur une voiture ou une fuite d’eau qui provoque des dégâts des eaux chez le voisin.
La responsabilité civile peut être conclue en supplément de l’assurance incendie. Une assurance RC n’est pas obligatoire, mais elle fait quasi toujours partie de l’assurance incendie. "Pour un immeuble à appartements, l’association des copropriétaires peut aussi souscrire une assurance RC complémentaire, qu’on appelle une RC ACP, indique Filip Dewaele. Cette assurance couvre la responsabilité des copropriétaires pour une série d’éléments qui ne sont pas couverts par la RC ordinaire du bâtiment. Songez à un conteneur de déchets qui dévale contre des voitures stationnées ou à un passant qui glisse sur un trottoir qui n’a pas été déneigé."
Combien ça coûte? La prime annuelle pour cette assurance complémentaire est d’environ 25 euros par appartement.
→ L’Assurance défense en justice
En quoi est-elle nécessaire? En tant que propriétaire d’un immeuble, Marie-Paule se voit conseiller de prendre une assurance défense en justice. Lorsqu’un litige ne peut pas être résolu à l’amiable, cette assurance couvre par exemple les frais d’avocats et d’experts. Le plus souvent, l’assurance défense en justice peut être conclue en complément de l’assurance incendie.
Combien ça coûte? La prime annuelle s’élève à quelque 25 euros par appartement. Mais elle peut grimper à 200 euros si Marie-Paule choisit une formule "all in", qui couvre tous les risques (y compris les litiges locatifs).
→ L’Assurance loyers impayés
En quoi est-elle nécessaire? Comme Marie-Paule s’inquiète de locataires qui ne paieraient pas leur loyer, elle envisage de prendre une assurance qui la protège contre les retards de paiement de loyer. Ce type d’assurance étant relativement neuf, l’offre n’est pas très étendue. "Une telle assurance est chère: la prime atteint vite 4 à 6% des revenus locatifs", prévient Filip Dewaele, qui suggère quelques alternatives. Notamment l’assurance défense en justice, nettement moins chère. Certes, elle ne protège pas contre un retard de loyer, mais elle couvre les frais d’avocat si le propriétaire décide de saisir un juge pour récupérer les arriérés. Celui qui confie la mise en location à une agence peut en outre choisir des formules qui garantissent le paiement du loyer. Il n’est donc pas toujours nécessaire de couvrir ce type de risque par une assurance.
Celui qui emprunte pour l’achat d’un immeuble de rapport doit envisager l’utilité de conclure une assurance solde restant dû pour lui-même. Cette assurance rembourse intégralement ou partiellement l’emprunt en cas de décès d’un des emprunteurs. Lors de l’achat d’une habitation familiale, les banques ont tendance à fortement recommander cette assurance pour éviter qu’en cas de décès, le remboursement de l’habitation ne soit en péril. "Par contre, un investisseur ne raisonne pas forcément de la même façon. Une assurance solde restant dû n’est pas aussi importante dans ce cas que lors de l’achat d’une habitation familiale", explique Ivo Van Bulck, secrétaire général de l’Union professionnelle du Crédit (UPC).
Pourquoi? Lors de l’achat d’un immeuble de rapport, on investit en général davantage de fonds propres. Beaucoup d’investisseurs en immobilier tablent en outre sur les revenus locatifs pour couvrir le remboursement du crédit. Le décès d’un emprunteur ne met donc pas nécessairement le remboursement du crédit logement en danger. "De plus, les investisseurs en immobilier sont souvent moins impliqués émotionnellement dans leur achat. Du coup, cela leur pose moins de problème s’il faut vendre le bien", poursuit Ivo Van Bulck.
Et puis, il y a le coût de l’assurance solde restant dû. Celui qui achète une habitation à 35 ans pourra probablement souscrire un contrat beaucoup moins cher que quelqu’un qui achète un immeuble de rapport à 55 ans. Or, c’est généralement quand on est un peu plus âgé qu’on dispose des fonds nécessaires à un investissement immobilier.