Alors que la plupart des carnets d’épargne ne rapportent que 0,11% par an, le flux d’argent frais qui les alimente s’accélère encore. Au cours des six premiers mois de 2019, les avoirs sur les comptes d’épargne réglementés se sont étoffés en effet d’au moins 8,4 milliards d’euros, selon une estimation établie par notre rédaction après avoir interrogé une douzaine de banques. C’est la plus forte augmentation depuis 2013. Les livrets affichent à présent un montant record de 279 milliards d’euros.
Certains épargnants semblent ignorer que le pouvoir d’achat de leur épargne diminuera cette année de 1,5%.
"Au vu de l’extrême faiblesse des taux d’intérêt sur le marché, il existe peu de solutions alternatives au bon vieux livret", souligne BNP Paribas Fortis. Des produits d’épargne sûrs, tels que les bons de caisse et les comptes à terme, ne rapportent pas plus, ou à peine, qu’un carnet de dépôt. Il en va de même pour de nombreuses obligations. Le taux offert par les obligations d’État belges à dix ans a encore baissé ce lundi pour s’établir à 0,02%, un plancher historique.
Argent "parqué"
Diverses banques observent que les épargnants "parquent" sur leurs livrets d’épargne l’argent reçu à l’échéance de leurs bons de caisse, comptes à terme et obligations. Ils sont nombreux à attendre ainsi depuis des mois, sinon des années, que les taux d’intérêt à long terme remontent. Jusqu’à présent, en vain.
Le pouvoir d’achat de l’argent placé sur les carnets d’épargne en 2019 diminuera de 4,2 milliards d’euros.
Le climat politique et économique incertain ainsi que la chute des marchés d’actions à la fin de 2018 incitent également les Belges à mettre leur épargne en lieu sûr. Chez Crelan, on note que "les investisseurs se tiennent sur leurs gardes et se montrent prudents. Ils privilégient la stabilité, quitte à ce qu’elle rapporte très peu, par rapport à la volatilité et aux risques."
Par ailleurs, de nombreux Belges mettent plus d’argent de côté en raison du tax shift et de la hausse des salaires qui ont accru leur pouvoir d’achat davantage que les années précédentes. "Les ménages n’adaptent que progressivement leurs dépenses à l’augmentation de leurs revenus ", explique la Banque nationale. Cette année, les ménages épargneront 12,7% de leurs revenus, contre 11,7% l’an dernier.
Atouts traditionnels
Enfin, le carnet d’épargne continue à bénéficier de ses atouts traditionnels: la sécurité, l’avantage fiscal et la disponibilité. L’État garantit en effet les avoirs d’épargne jusqu’à 100.000 euros et les exonère de précompte mobilier jusqu’à 980 euros d’intérêts.
Certains épargnants semblent ignorer ou faire fi de la perte de pouvoir d’achat de leur épargne. En partant de l’hypothèse que leur livret rapporte en moyenne 0,2% et que l’inflation s’élève à 1,7% cette année, les épargnants voient la valeur réelle de leurs avoirs s’éroder de pas moins de 1,5%. Cela signifie que le pouvoir d’achat de l’argent placé sur les carnets d’épargne en 2019 diminuera de 4,2 milliards d’euros.