Assis entre deux chaises, entre une ancienne coalition PS-cdH qui a mis en chantier une série de réformes depuis le début de la législature, et une nouvelle équipe MR-cdH bien décidée de marquer de ses couleurs les deux années qui lui sont données avant les élections, les ministres wallons peinent à prendre leurs marques. Il faut dire que la place qui leur est donnée est inconfortable. Héritant des socialistes de nombreux décret en troisième lecture - des textes quasiment aboutis - les ministres libéraux n’ont pas envie d’endosser le costume de presse bouton du PS. Mais en même temps, Willy Borsus, le nouveau ministre-président libéral de la Région refuse de s’ériger en "procureur du passé". Bref, on marche sur des œufs à l’Elysette.
Parmi les dossiers, la réforme du bail passait en troisième lecture au gouvernement jeudi et a donné lieux à quelques changements à la marge. Sur le fond, l’exécutif reste aligné aux grands principes de la réforme du contrat de bail d’habitation initiée par l’ancienne équipe. Les dispositions vont renforcer une série d’obligations pour les propriétaires et pour les locataires. On y trouve par exemple l’enregistrement obligatoire des baux ou, en cas de décès du locataire, la possibilité pour les héritiers de résilier le bail dans les trois mois du décès.
Des changements ont néanmoins été apportés par la ministre du Logement. Valérie De Bue (MR) les justifie par un souci de clarté et de sécurité juridique. "Dans son avis, le conseil d’État souhaitait un décret autonome et plus clair. Nous avons donc totalement réécrit le texte", qui repassera donc par la case conseil d’état et devant le gouvernement pour une quatrième lecture.
Voici ce qui va changer
Au final, un contrat-type à chaque bail sera défini. Il rassemblera une série de règles minimales obligatoires comme l’extension du droit commun aux baux d’habitation sur des biens meubles (containers, yourtes, cabanes, caravanes,…). Les droits et obligations du bailleur et du preneur seront rassemblés au sein de deux sections clairement identifiées pour l’ensemble des baux. Il sera aussi précisé l’interdiction de la sous-location ou de la cession de bail sans accord préalable du bailleur et l’obligation de réaliser un état des lieux d’entrée.
La ministre a également apporté des améliorations sur le plan de la résidence principale des locataires avec l’harmonisation des délais de préavis de 3 mois pour le preneur et de 6 mois pour le bailleur. Le gouvernement s’est par ailleurs inspiré de Bruxelles en intégrant la possibilité de résiliation anticipée d’un bail de courte durée pour le preneur.
Deux régimes spécifiques sont aussi créés pour les baux d’étudiant et la colocation. C'est ainsi qu'en cours d'année, un préavis ne pourra plus être donné à partir du 15 mars. D'un côté, on évite de la sorte que des étudiants ne mettent fin anticipativement au bail, laissant le propriétaire sans locataire pour le reste de l'année. D'un autre, on évite l'effet pervers de voir le propriétaire augmenter le prix du loyer pour anticiper le risque d'être lâché par l'étudiant, a expliqué en substance la ministre. Exception pour la toute fin de bail: étudiant ou bailleur aura un mois de délai de préavis avant le 31 août. Enfin, le gouvernement ajoute une possibilité à celles déjà prévues pour que l'étudiant dispose d'un préavis de deux mois sans indemnité: le cas du décès d'un parent qui pourvoit à son entretien. Enfin, dans le volet colocation, la réforme imposera une solidarité des colocataires à l'égard du bailleur. “Une règle devra figurer dans le pacte de colocation.”
Le gouvernement a par ailleurs annoncé qu’il allait s’atteler à examiner le projet de grille indicative des loyers. Si l’idée n’est pas abandonnée, Valérie De Bue estime que les critères seront fortement revus. "Nous gardons le principe de cette grille mais nous allons revoir les critères dont certains sont idéologiques. Le projet actuel qui est en phase de test a tendance à pousser les loyers vers le haut. Nous allons corriger cela."