De plus en plus de Belges optent pour les formules à taux variable au moment de souscrire un crédit hypothécaire. Chez le leader du marché BNP Paribas Fortis, on n’hésite pas à parler de rush. "En 2016, seuls 6% de nos clients optaient pour un taux variable. Au cours du premier semestre 2018, ce chiffre était passé à 18% et en novembre, nous en étions à 51%", explique la porte-parole Hilde Junius. Ce phénomène touche aussi les autres banques. Chez ING et Argenta, on parle de tendance claire, avec un pic au cours de l’été observé chez la seconde.
Une des principales raisons de la popularité du taux variable s’explique par le risque limité en cas de hausse des taux. La loi prévoit que dans une formule à taux variable, la hausse ne peut être plus importante que la baisse. Dans la pratique, cela signifie que le taux peut au maximum doubler. Avec les niveaux actuels, cette hausse éventuelle est donc limitée. Ceux qui souscrivent un emprunt à taux variable, révisable tous les trois ans, avec un taux initial de 1,15%, n’auront donc jamais à payer plus que 2,3%. D’un point de vue historique, ces taux sont très intéressants.
"En 2016, seuls 6% de nos clients optaient pour un taux variable. Au premier semestre 2018, ce chiffre était passé à 18% et en novembre, nous en étions à 51%."
L’avantage du taux variable, c’est qu’il est au départ nettement plus bas que les taux fixes. Les taux moyens publiés par le fournisseur de services financiers Immotheker, spécialisé dans la comparaison des crédits hypothécaires, le confirment. Les emprunts à 25 ans à taux fixe se négocient en moyenne à 2,03%, contre 1,15% pour les emprunts à 25 ans à taux variable révisable tous les trois ans.
Malgré tout, les taux variables ne sont pas le meilleur choix pour tous les emprunteurs. "Si vous n’aimez pas l’incertitude, il vaut mieux choisir un taux fixe, car il garantit que vos remboursements mensuels seront constants pendant toute la durée du contrat", explique-t-on chez KBC. Car même si le risque de hausse est limité avec une formule à taux variable, les montants mensuels à rembourser peuvent nettement augmenter en cas de scénario du pire.
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Imaginons un couple qui souhaite emprunter 200.000 euros sur 25 ans. Avec une formule à taux variable révisable tous les trois ans, les remboursements mensuels initiaux se montent à 767 euros. Dans un scénario du pire, ce montant pourrait passer à 862 euros après trois ans, soit près de 100 euros de plus. "Pour les jeunes couples, ce montant peut faire une grande différence", explique John Romain, d’Immotheker.
C’est pour répondre à cette inquiétude que de plus en plus de banques proposent une solution alternative: la formule "accordéon". En d’autres termes, les emprunteurs commencent avec un taux variable (le plus avantageux), mais le montant des remboursements mensuels reste constant. Si le taux monte, la durée du contrat est prolongée. Dans notre exemple, le couple continuera à rembourser 767 euros par mois, mais la durée du contrat sera dans le pire des cas prolongée à 28 ans et 9 mois.
Le problème de cette formule, c’est que la charge d’intérêt totale est très élevée en cas de scénario du pire. "Mais l’avantage, c’est que la charge mensuelle est inférieure de 10%, ce qui permet éventuellement d’investir la somme ainsi ‘épargnée’ et – en Flandre – de profiter éventuellement pendant plus longtemps de l’avantage fiscal lié aux crédits hypothécaires", explique John Romain. Pour l’expert, l’avantage fiscal supplémentaire lié à la formule accordéon se monte dans l’exemple cité à près de 3.000 euros par rapport à ceux qui optent pour un contrat fixe de 25 ans.
Préférences personnelles
Les taux proposés par les banques dépendent entre autres de l’évolution du taux belge à long terme. Le taux à dix ans se situe déjà depuis deux ans à un niveau historiquement bas, oscillant entre 0,5 et 1%. Conséquence: les emprunts hypothécaires sont déjà depuis un certain temps exceptionnellement bon marché.
Avec la décision de la Banque Centrale Européenne (BCE) de mettre fin à ses rachats d’obligations et la recrudescence des craintes d’inflation, certains s’attendent à des hausses de taux. Pour les banques, ces hausses devraient cependant rester limitées. "Nous n’attendons aucune hausse substantielle en 2019", ajoute-t-on chez BNP Paribas Fortis.
La plupart des banques s’attendent à ce que les taux des crédits hypothécaires n’augmentent que très progressivement. ING souligne cependant qu’on ne peut exclure une possible "réévaluation des primes de risques", qui pourrait pousser vers le haut les taux d’intérêt appliqués aux crédits hypothécaires.
"Pour le moment, nous nous attendons à ce que les taux hypothécaires augmentent de 25 points de base au cours des 12 prochains mois. En 2020, la tendance à la hausse pourrait se confirmer, mais il est clair que les acheteurs ont encore tout leur temps pour décider et pour profiter des taux avantageux", conclut ING.
Il ne faut pas confondre la formule accordéon avec le réexamen intermédiaire du crédit habitation. Chaque banque permet à ses clients de revoir les conditions du crédit, par exemple de prolonger sa durée. Mais ces révisions ont un coût. De plus, on ne peut exclure que les remboursements mensuels baissent. Il vaut donc mieux choisir la formule accordéon dès le début, du moins si la banque le propose.
En plus de la formule accordéon, Belfius propose une formule hybride pour les taux révisables à trois ans. "Lors de la première révision, soit après trois ans, le montant ne change qu’en cas de baisse des taux. Cela donne au client la garantie que le taux n’augmentera pas au cours des six premières années", explique la banque.
La décision d’opter pour telle ou telle formule est un choix personnel. "Tout dépend de la situation financière des clients et de leurs préférences", expliquent les banques. "Les taux variables sont plus bas que les taux fixes au moment de la signature, mais il n’est pas possible de prédire si cette différence se maintiendra au fil du temps ou si la hausse ultérieure des taux ne transformera pas en inconvénient l’avantage dont les emprunteurs bénéficient au cours des premières années du crédit", explique-t-on chez BNP Paribas Fortis.
Il est également important de prendre d’autres facteurs en considération. Les taux des crédits hypothécaires sont souvent liés à certaines conditions, comme l’obligation de souscrire une assurance incendie et/ou une assurance solde restant dû. "Il faut examiner la situation dans son ensemble. Le choix de l’assurance peut avoir un impact de 0,4% sur le taux du crédit hypothécaire. Le taux le plus bas n’est donc pas toujours le meilleur choix", ajoute John Romain.