Le parc immobilier belge, assez ancien, compte énormément de bâtiments qui souffrent de problèmes d’isolation, d’humidité et qui ont un réseau électrique ou sanitaire complètement dépassé. Inutile de dire qu’on est loin du rendement énergétique optimal, qui est aujourd’hui devenu "LA" priorité en matière d’immobilier. La case "rénovation" est donc un passage quasi obligé et même un must pour la plupart des nouveaux propriétaires. Mais il y a rénovation et rénovation. Si pour certains il s’agira d’optimiser l’investissement, pour d’autres, la rénovation sera une condition sine qua non pour habiter l’immeuble et/ou l’adapter à leur goût et à leurs besoins.
Identifier les travaux indispensables
Celui qui envisage l’achat d’une habitation, a fortiori si elle nécessite d’importantes rénovations, a intérêt à en faire le tour au préalable avec un professionnel du bâtiment, qui listera une série de points d’attention, pour obtenir un avis. "N’hésitez pas à faire appel à un architecte. Pour un montant compris entre 80 et 160 euros, il pourra réaliser une première estimation. Et même si cela coûtera évidemment un peu plus cher, il est possible d’obtenir un rapport plus détaillé ou des réponses à des questions précises. En tout état de cause, ce n’est rien en comparaison avec le prix d’une maison", insiste l’architecte bruxellois Fabrizio Trobbiani.
N’hésitez pas à faire appel à un architecte. Pour un montant compris entre 80 et 160 euros, il pourra réaliser une première estimation.
Trop de gens sous-estiment en effet le coût des travaux de rénovation indispensables. "Ils sont alors obligés de phaser les travaux et de vivre dans une maison à moitié terminée. Ou alors ils optent pour la mission légale: ils confient uniquement le gros œuvre à l’architecte et font le reste eux-mêmes. Résultat: cela ne ressemble pas toujours à grand-chose, alors que c’est précisément sur la partie ‘rénovation’ que la plus-value des architectes est de loin la plus importante", observe-t-il.
Isoler dans tous les cas
Même si vous achetez une maison un peu vétuste mais en relativement bon état, dans laquelle vous pouvez poser vos valises sans devoir faire de travaux, "il est vraiment judicieux, si vous en avez les moyens, de procéder directement à quelques rénovations qui, à tous les coups, s’avéreront très rentables", conseille vivement l’architecte Philippe Meilleur. Lequel vise plus spécifiquement l’isolation du toit, des murs et la pose de nouveaux châssis. "J’insiste sur la nécessité de penser à tout cela dès l’origine de la transformation. Isoler des murs est un investissement que l’on ne fera probablement plus jamais après s’être installé! Si l’esthétique du bâtiment est belle, on privilégiera l’isolation par l’intérieur. Mais d’un point de vue technique, l’isolation par l’extérieur est plus facile et surtout plus efficace car on isole ‘en continu’ et on évite ainsi les ponts thermiques", détaille l’architecte.
"Une démarche à envisager pour se faire une idée et qui a été un peu oubliée suite au coup d’arrêt brutal de la plupart des primes à la rénovation en 2017: demander un audit énergétique. Un spécialiste (ingénieur, architecte ou autre) fait le tour du bâtiment, prend des mesures qu’il encode dans un logiciel de calcul qui fournit deux scénarios d’améliorations (l’un minimaliste, l’autre maximaliste) indiquant, en fonction du bâtiment, de ses caractéristiques, de son volume et des déperditions, les postes par lesquels il serait le plus utile de commencer, ainsi qu’une indication du retour sur investissement", détaillePhilippe Meilleur. Tout cela pour un coût de 800 à 1.000 euros.
Pour son confrère bruxellois Fabrizio Trobbiani, "la priorité c’est le toit. En trois ans, l’investissement est amorti grâce à la baisse de la facture de gaz-électricité. Ensuite, je conseille de changer les châssis, mais attention, cela nécessite de revoir la ventilation de la maison, faute de quoi l’humidité risque de s’accumuler dans les murs, principalement dans les angles, met-il en garde. Quant à l’isolation de la façade, elle sera amortie sur 10 ans. L’isolation des sols est également à envisager mais parfois plus difficile à mettre en œuvre."
En rénovation, certaines choses sont de toute façon remplacées, comme une installation électrique vieille de 40 ans, qui n’est bien sûr plus adaptée aux besoins et présente des défaillances en matière de sécurité, ou une installation sanitaire qui fonctionne peut-être encore, mais dont la performance énergétique est totalement insuffisante.
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Évaluer le coût
L’avantage d’une construction neuve, c’est qu’en gros, on est fixé sur son prix dès le départ, même si on n’est jamais à l’abri d’un extra imprévu. Pour une rénovation, en revanche, on n’obtiendra au mieux qu’une estimation correcte de la facture globale et souvent on n’évitera pas l’une ou l’autre (très) mauvaise surprise à l’entame des travaux.
En effectuant des recherches sur internet, on trouve des fourchettes de prix selon l’ampleur et la nature des travaux. Sont-elles pertinentes et peut-on s’y fier? "Estimer le coût est très compliqué. Tout dépend du bâtiment. Il y a énormément de paramètres à prendre en compte: les spécificités, la localisation, l’état de l’immeuble, la qualité et le prix des matériaux, les modifications envisagées, le degré de finition/de luxe souhaité, le recours à des professionnels, etc. La seule façon de travailler correctement consiste à faire une estimation poste par poste", explique Philippe Meilleur. Et on ne sera effectivement jamais à l’abri d’une mauvaise surprise…
"Généraliser n’a en effet que peu de sens, compte tenu de tout ce que peut inclure une rénovation", confirme Fabrizio Trobbiani, qui se risque tout de même à lâcher un chiffre pour une rénovation en profondeur: 1.800 euros/m² (1.000 euros pour le gros œuvre et 800 euros pour la rénovation intérieure). "Mais le fait de toucher ou non aux techniques a également une influence. Sur la plupart des chantiers, on se rend compte par exemple que toute l’installation électrique est à refaire…", souligne-t-il.
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Se conformer aux normes
En Région bruxelloise, des critères vont être instaurés qui obligeront les propriétaires à atteindre des niveaux de performance en matière d’isolation pour 2025, 2035 et 2050.
Fabrizio Trobbiani, qui est également responsable de la Chambre bruxelloise de l’Ordre des architectes, rappelle opportunément l’existence d’une Directive européenne qui impose aux Etats membres d’adopter une stratégie bas carbone à l’horizon 2050. Dans ce cadre, "les pays membres devront notamment afficher un taux élevé de rénovation, en particulier en termes de performance énergétique. Alors certes, aujourd’hui, tous les permis doivent déjà être conformes en matière de PEB, mais si l’on considère le nombre de permis par rapport au patrimoine, il faut bien constater que ces normes n’ont encore eu qu’un impact limité sur l’économie d’énergie. Or, poursuit-il, en Région bruxelloise, des critères vont être instaurés qui obligeront les propriétaires à atteindre des niveaux de performance en matière d’isolation pour 2025, 2035 et 2050. L’idée étant qu’à un moment donné, toutes les habitations affichent par exemple le label PEB ‘C’, puis ‘B’ puis ‘A’ pour un critère défini. Les architectes bruxellois sont enthousiastes face au défi (de la stratégie de rénovation 2030-2050), à condition qu’il soit basé sur le monitoring, le résultat concret et pas sur un programme virtuel, normatif et compliqué de calcul des amendes", conclut-il, laissant entendre que le PEB subira inévitablement un sérieux lifting pour coller davantage à la réalité de terrain et aux objectifs poursuivis.
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La Flandre se prépare de son côté à instaurer une sorte de diplôme pour chaque bâtiment, ajoute Fabrizio Trobbiani. "Ce document reprendra non seulement la performance énergétique, mais aussi la conformité aux normes d’installation électrique, de gaz, ainsi qu’une fourchette de prix pour les rénovations".
"Ce qui est sûr en tout cas, c’est qu’aujourd’hui, beaucoup d’acheteurs sous-estiment les travaux à réaliser. Quand ces normes entreront en vigueur, ils seront d’autant plus surpris", met en garde le professionnel, pour qui ces changements sont susceptibles de modifier de fond en comble le marché immobilier.
Demander un permis
"Tant qu’on ne touche pas à la stabilité d’un bâtiment et qu’on ne modifie pas sa volumétrie, son affectation ou son esthétique extérieure, aucune autorisation n’est nécessaire, résume Philippe Meilleur. Si vous envisagez de transformer un ancien garage automobile ou une grange agricole en logement, par contre, il s’agira bien d’un changement d’affectation nécessitant un permis".
Certains travaux qui nécessitent un permis d’urbanisme bénéficient toutefois de procédures allégées. Il faut en outre être très attentif à toutes les considérations relatives à l’environnement.
Votre situation familiale est un paramètre-clé pour déterminer les travaux de rénovation et de transformation à effectuer à court ou moyen terme. Envisagez-vous d’avoir des enfants? Combien de personnes vont partager l’habitation? Combien d’heures par jour est-elle chauffée? Pour un couple pensionné qui prend une douche deux fois par semaine, par exemple, l’installation d’un chauffe-eau solaire ne s’avérera pas très intéressante. Elle le sera par contre pour un ménage avec trois enfants. "Les perspectives à long terme sont importantes également, souligne Bart Deneckere, coach rénovation auprès de l’intercommunale ouest-flamande Leiedal. Comment voyez-vous l’habitation dans dix ou vingt ans? Si vous envisagez de déplacer la cuisine, mieux vaut déjà prévoir les conduites dans le sol et les prises de courant nécessaires". Et quid le jour où vous serez moins mobile? Peut-être devrez-vous transformer le bureau en chambre à coucher au rez-de-chaussée? Autant de paramètres dont il vaut mieux tenir compte dès que vous élaborez les plans de vos travaux de rénovation, faute de quoi vous risquez de refaire votre devoir ultérieurement.