La réforme fiscale wallonne est sur les rails. Les grands principes sont connus, et l’objectif du gouvernement wallon est de faire entrer en vigueur un paquet de mesures dès le 1er janvier 2018. Mais comme on le rappelle au cabinet du ministre des Finances Jean-Luc Crucke (MR), les détails pourraient encore changer au cours du parcours législatif des textes. Une série de mesures n’ont par ailleurs pas encore été totalement dévoilées. Voici donc ce que l’on sait pour le moment. Ce qui est certain, c’est que la fiscalité immobilière est considérablement allégée.
1. Abattement fiscal sur les droits d’enregistrement
→ Aujourd’hui
A la différence des deux autres Régions, il n’existe pas d’abattement fiscal sur les droits d’enregistrement pour les primo acquérants (ceux qui achètent leur premier bien immobilier, souvent des jeunes).
→ En 2018
Un abattement sur les 20.000 premiers euros est introduit, probablement, comme c’est le cas dans les deux autres Régions, sous réserve de conditions, comme le fait de se domicilier dans le bien.
Avantage?
Le taux des droits d’enregistrement étant de 12,5% en Wallonie, la mesure représente un gain immédiat de 2.500 euros (12,5% de 20.000 euros).
2. Suppression du taux de 15% de droits d’enregistrement
→ Aujourd’hui
Depuis le 1er janvier 2016, si vous achetez un bien résidentiel en Wallonie, vous devez vous acquitter de droits d’enregistrement majorés si vous possédez déjà au moins deux habitations. Que ces deux habitations soient situées en Belgique ou à l’étranger ne change rien. Dans ce cas, les droits d’enregistrement s’élèvent à 15% du prix d’achat, contre 12,5% pour les deux premières résidences.
→ En 2018
Le taux de 15% disparaît, et c’est le taux de 12,5% qui s’applique à nouveau pour toutes les acquisitions.
Conseil
Si vous avez l’intention d’acheter un bien en Wallonie et que vous avez déjà deux autres résidences, vous avez donc tout intérêt à signer l’acte d’achat en 2018. De fait, le cabinet du ministre des Finances a confirmé que la date de signature de l’acte serait prise en compte, en principe, pour déterminer si vous tombez encore sous la règle des 15% de droits d’enregistrement ou non. Même si vous avez signé le compromis de vente en 2017, vous ne devriez donc plus payer les droits d’enregistrement majorés, pour autant que vous passiez l’acte après le 31 décembre 2017.
Avantage? Sur un bien de 200.000 euros, la différence entre un taux de 12,5 et de 15% de droits d’enregistrement s’élève à 5.000 euros. Les montants ne seront sans doute jamais réellement déterminants, mais les professionnels de l’immobilier ont toujours souligné la portée symbolique de ce taux majoré qui refroidit les investisseurs.
3. Baisse des droits d’enregistrement pour le viager
→ Aujourd’hui
Lorsque vous achetez un bien en viager, vous payez des droits d’enregistrement calculés sur la valeur de l’habitation en pleine propriété. Or, en cas de viager occupé, vous ne jouirez de l’usufruit du bien qu’au décès du vendeur ou au terme du contrat (souvent limité à 15 ans).
→ En 2018
Les droits d’enregistrement seront réduits lors de l’achat en viager. Vraisemblablement, le taux des droits d’enregistrement passera à 6%, contre 12,5%. Les droits ne seront en outre plus calculés sur la valeur de l’habitation, mais sur la nue-propriété (valeur de la pleine propriété, de laquelle on retire la valeur de l’usufruit).
Avantage?
Comme l’explique Philippe Verdonck, directeur de l’agence immobilière Viah! et co-fondateur du fonds ViagerFund, "actuellement, acheter une maison de 250.000 euros en viager à un monsieur de 76 ans coûte 31.250 euros en droits d’enregistrement (12,5% de 250.000 euros). Si la fiscalité wallonne change, les droits d’enregistrement ne s’élèveront plus qu’à 11.250 euros. Cela représente donc un gain de 20.000 euros".
4. Portabilité des droits d’enregistrement
→ Aujourd’hui
Le fait de revendre votre maison en Wallonie pour en racheter une autre en Wallonie ne vous procure aucun avantage fiscal sur les droits d’enregistrement.
→ En 2018
Il s’agit d’introduire le principe selon lequel, si vous vendez votre habitation pour en racheter une nouvelle (toutes deux en Région wallonne), vous bénéficierez d’une réduction des droits d’enregistrement lors de l’achat de votre nouvelle résidence. Ce système existe déjà en Flandre, sous certaines conditions (notamment en termes de délai de domiciliation dans le nouveau bien) et est limité à 12.500 euros.
Avantage?
Par exemple, vous avez payé 30.000 euros de droits d’enregistrement lors de l’achat de la maison A. Vous revendez la maison A et vous achetez la maison B. Le montant des droits d’enregistrement pour la maison B s’élève à 45.000 euros. Etant donné que vous avez "déjà" payé 30.000 euros la dernière fois, le montant de 45.000 euros est diminué de 12.500 euros, vous ne paierez donc que 32.500 euros. Le montant maximum de reportabilité n’a toutefois pas encore été divulgué.
5. Droits d’enregistrement de 6%
→ Aujourd’hui
Les acquéreurs d’une habitation dite "modeste" ont droit à un taux de droits d’enregistrement réduit de 6% sur une première tranche du prix de l’immeuble, ce qui peut représenter un avantage fiscal de 10.050 euros, voire davantage en zone de pression immobilière. Pour déterminer le caractère "modeste" de l’habitation, on se base sur le revenu cadastral (RC), qui ne peut pas dépasser 745 euros (ou plus en fonction du nombre d’enfants à charge).
→ En 2018
Il s’agirait vraisemblablement de contrôler si le RC du bien colle avec la réalité avant d’accorder ce taux de droits d’enregistrement réduit, et/ou de lier cette obtention à la valeur vénale du bien (sa valeur sur le marché, en cas de revente dans des conditions normales).
Avantage? Aucun pour vous.
6. Précompte immobilier réduit dès le premier enfant
→ Aujourd’hui
Les propriétaires peuvent obtenir une réduction de leur précompte immobilier dès qu’ils ont deux enfants à charge. La réduction s’élève à 125 euros par enfant.
→ En 2018
La réduction du précompte immobilier pourrait s’obtenir dès le premier enfant.
Avantage? Les ménages avec un seul enfant à charge gagneront 125 euros par an sur leur précompte immobilier (si le montant de la réduction ne change pas).
7. Soutenir les parents de koteurs
→ Aujourd’hui
Certains étudiants sont contraints de kotter parce qu’ils n’ont pas d’accès à une offre de formation supérieure dans la filière de leur choix à proximité de leur domicile. Aucune aide n’est prévue pour soutenir financièrement les parents.
→ En 2018
Un soutien fiscal forfaitaire serait introduit pour les parents dont les enfants se trouvent dans cette situation.
Avantage? Pas d’infomations à ce stade. Reste aussi à voir quels seront les critères pris en compte pour juger que le jeune se trouve bien dans la situation décrite.
1. Baisse des droits de donation mobilière
→Aujourd’hui
Lorsque vous désirez donner des valeurs mobilières (argent, titres financiers, œuvres d’art, etc.) via une donation enregistrée, vous payez des droits d’enregistrement dont le taux varie en fonction du lien que vous avez avec la personne gratifiée. Ainsi, en ligne directe (parents-enfants-petits-enfants), entre époux ou entre cohabitants légaux, le taux s’élève à 3,3%. Entre frères et sœurs, oncles et tantes, neveux et nièces, ce taux s’élève à 5,5%. Il grimpe à 7,7% dans tous les autres cas.
→ En 2018
Le taux de 7,7% disparaîtra. Il ne subsistera donc que le taux de 3,3% (catégorie inchangée) et le taux de 5,5% (catégorie qui englobe les donations entre frères, sœurs, oncles, tantes, neveux, nièces ET tous les autres liens entre donateur et donataire).
Les donations en Wallonie en ligne directe, entre époux ou cohabitants légaux restent un peu plus chères que dans les deux autres Régions (3,3% contre 3%). En revanche, les donations entre deux personnes au lien de parenté plus éloigné ou sans aucun lien de parenté deviennent plus intéressantes que dans les autres Régions (5,5% contre 7%).
Avantage? Si vous souhaitez léguer 100.000 euros à un ami, vous paierez 5.500 euros de droits d’enregistrement contre 7.700 euros actuellement.
A noter que le gouvernement envisage aussi d’assouplir les règles et conditions pour les donations mobilières et immobilières.
2. Immunisation totale de l’habitation familiale lors d’une succession
→ Aujourd’hui
Si votre conjoint (époux ou cohabitant légal) décède, vous devez payer des droits de succession sur la partie du patrimoine du défunt qui vous revient. Mais votre habitation familiale est exemptée de droits de succession à hauteur de 160.000 euros. Cela signifie que vous ne paierez aucun droit de succession tant que la valeur totale de votre maison ne dépasse pas 320.000 euros (160.000 euros x 2) pour autant que l’immeuble appartienne aux deux conjoints et que la part du conjoint décédé ait été attribuée au conjoint survivant.
→ En 2018
Le plafond de 160.000 euros sauterait. La totalité de l’habitation familiale serait immunisée de droits de succession, comme c’est déjà le cas en Région bruxelloise et en Flandre. "Gardez toutefois à l’esprit que l’immunisation ne met pas fin à la progressivité. En conséquence, les droits de successions seront calculés sur l’ensemble du patrimoine en ce compris les biens ayant fait l’objet d’une immunisation ", rappelle le notaire Renaud Grégoire.
Avantage? Si votre maison vaut plus de 320.000 euros et qu’elle vous appartient à tous les deux, vous allez bénéficier de cette mesure. Par exemple, si votre maison vaut 500.000 euros, la part de votre conjoint défunt vaut 250.000 euros. Actuellement, vous payez des droits de succession sur 90.000 euros (250.000 euros – 160.000 euros), soit 9.750 euros. Un montant que vous ne devrez plus payer à partir de 2018.
→ Aujourd’hui
Si vous possédez une télévision, vous devez vous acquitter d’une taxe annuelle d’un montant de 100 euros. La redevance télévision ne doit être acquittée qu’une seule fois pas ménage, quel que soit le nombre d’appareils installés.
→ En 2018
La téléredevance disparaîtra.
"En matière de téléredevance, ce qui est dû est dû. Les procédures actuelles de recouvrement restent d’application."
Quid des arriérés de paiement? Si l’administration vous réclame des arriérés de paiement pour des téléredevances impayées, la suppression de la taxe ne va pas vous tirer de là. Comme l’explique Pierre-Laurent Fassin, porte-parole du ministre des Finances wallon Jean-Luc Crucke, "ce qui est dû est dû. Pour toutes les périodes antérieures à 2018, les procédures actuelles de recouvrement resteront d’application. La prescription pour l’établissement de la taxe est de 5 ans. Elle peut toutefois faire l’objet d’une interruption permettant d’assurer le recouvrement de la dette. L’important est de bien comprendre que l’on ne peut accepter que des redevables n’ayant jamais payé la taxe due soient favorisés par rapport à ceux qui ont ‘joué le jeu’ en payant régulièrement la taxe. Des contrôles pourront donc toujours se faire".