On sait enfin avec plus de certitude ce qui attend les placements sur le plan fiscal en 2018. Le projet de loi-programme que le gouvernement fédéral a déposé récemment permet de connaître plus en détail la fiscalité financière qui nous attend à partir du 1er janvier.
On a suffisamment épilogué sur la taxe sur les comptes-titres, qui frappera ceux qui détiennent des actifs d’un montant total supérieur à 500.000 euros sur leur compte-titres. Signalons tout de même un dernier détail dont nous venons d’obtenir confirmation auprès du cabinet du ministre des Finances: les bons d’État inscrits en compte-titres entrent bien en considération dans le calcul de la taxe. Par contre, les bons d’État nominatifs, détenus par des particuliers par le biais d’une inscription dans le "grand-livre" de l’Agence de la dette, ne sont logiquement pas pris en compte.
Pour le reste, on se contentera de rappeler, comme évoqué dans notre récent supplément à l’occasion du salon Finance Avenue (L’Echo du 18/11), qu’il existe différentes manières d’éviter la taxe sur les comptes-titres. Son caractère discriminatoire à plusieurs égards laisse en outre planer des doutes sur sa pérennité. Lors de Finance Avenue, François Parisis, responsable de la fiscalité à la Banque Transatlantique Belgium, s’est dit "optimiste quant au fait que cette taxe puisse finalement ne jamais voir le jour". L’avenir nous le dira.
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Taxe sur les sicav obligataires
En attendant, compte tenu de son caractère bancal dès le début, cette taxe sur les comptes-titres a focalisé l’attention des médias et du monde politique. Or, dans les mesures annoncées par le gouvernement l’été dernier, il y a bien d’autres modifications fiscales qui méritent qu’on s’y intéresse de près.
À commencer par l’élargissement de la taxe sur la plus-value de la part d’obligations de certaines sicav. Cette "taxe Reynders", ainsi dénommée parce qu’elle fut introduite en 2006 alors que Didier Reynders était ministre des finances, frappe actuellement les sicav de capitalisation qui investissent au moins 25% en obligations. Dès 2018, elle s’appliquera aux sicav de capitalisation dès que ces dernières détiendront 10% d’obligations. Le seuil est donc fortement abaissé, ce qui ne manquera pas de ramener bon nombre de sicav dans le champ d’application de cet impôt.
Cela aurait pu être pire: à l’origine, le gouvernement envisageait de supprimer purement et simplement ce seuil. Mais cela aurait conduit à taxer des fonds 100% actions parce que ceux-ci conservent toujours une petite part de liquidités… considérées comme des obligations sur le plan juridique. L’exécutif fédéral a donc fait marche arrière et s’est "contenté" d’abaisser le seuil à 10%.
Taxe boursière sur les fonds
Les détenteurs de fonds et sicav ne sont pas quittes pour autant. Une autre mesure fiscale, qui n’était pas prévue a priori, frappera bon nombre d’entre eux dès l’an prochain. Il s’agit de l’augmentation de la taxe boursière. Quand le gouvernement a annoncé – en se pinçant le nez – cette hausse du tarif de la TOB (taxe sur les opérations de Bourse) l’été dernier, il a d’abord prétendu qu’elle ne toucherait que les actions et les obligations.
Or, s’il est vrai que les transactions sur obligations verront le tarif de la TOB passer de 0,09% à 0,12% et que les achats et ventes d’actions seront désormais taxés à 0,35% au lieu 0,27%, et même si les opérations sur certaines parts de fonds et sicav resteront soumises à une taxe boursière inchangée de 1,32%, d’autres fonds subiront bel et bien de plein fouet l’augmentation de la TOB.
"Il y a tant d’obstacles qui se dressent devant cette taxe sur les comptes-titres qu’actuellement, je suis optimiste quant au fait qu’elle puisse finalement ne jamais voir le jour."
Il s’agit plus précisément des fonds et sicav cotés en Bourse, parmi lesquels on trouve principalement des trackers ou ETF (exchange traded funds), c’est-à-dire des fonds qui répliquent la performance d’un indice boursier. S’agissant de trackers de capitalisation enregistrés en Belgique, il n’y a pas de changement: la TOB de 1,32% demeure. Rappelons que les fonds de capitalisation sont ceux qui ne distribuent pas de dividende: ils réinvestissent les revenus de leurs actifs sous-jacents dans le portefeuille du fonds. Précisons toutefois qu’en pratique, on trouve peu d’ETF soumis à ce régime fiscal car la plupart de ces trackers évitent d’être enregistrés en Belgique afin, précisément, d’échapper au taux le plus élevé de la TOB.
Trackers soumis à la TOB
Par contre, les trackers de distribution enregistrés, eux, seront soumis, lors de leur achat ou de leur vente, à une taxe boursière de 0,12% au lieu de 0,09% actuellement. Et en ce qui concerne les trackers non enregistrés, la TOB s’élèvera dès l’an prochain à 0,35% au lieu de 0,27% aujourd’hui, également en cas d’achat ou de vente. Beaucoup de trackers proposés par les banques et courtiers sur le marché belge sont concernés par ces augmentations de la TOB.
A priori, les taux de cette taxe boursière peuvent paraître modestes mais il faut rappeler qu’ils s’appliquent à la valeur totale de la transaction. Il s’agit donc d’une forme de taxe sur le capital qui peut rapidement s’avérer très élevée au regard du rendement du fonds concerné.
Par conséquent, les conseillers financiers recommandent à ceux qui envisagent de vendre, dans un avenir proche, les parts de leurs fonds ou sicav de bien vérifier s’ils seront ou non affectés par la hausse de la TOB. Si tel est le cas, il sera peut-être judicieux d’anticiper légèrement cette vente pour la réaliser avant la fin de cette année et ainsi éviter le taux plus élevé de la taxe boursière applicable dès janvier prochain.
Le jeu en vaut la chandelle car, quand on y réfléchit, le passage de la TOB de 0,09% à 0,12% et de 0,27% à 0,35% revient à augmenter cette taxe boursière de… 33% et 30% respectivement.
En outre, il ne faut pas perdre de vue que des sicav de capitalisation investissant en partie en obligations, disponibles sur le marché belge, exposent les investisseurs à une "double peine": non seulement ils subiront la "taxe Reynders" sur la plus-value obligataire mais en plus, ils devront payer, lors de la revente de leurs parts, la taxe boursière la plus élevée, au tarif de 1,32% qui, maigre consolation, n’augmentera quant à lui pas en 2018. Il y a là matière à réflexion pour ceux qui envisagent d’investir dans des fonds à l’avenir.
Les autres modifications attendues en 2018 sont schématisées dans l’infographie. Pour conclure, on rappellera que les choix d’investissement ne doivent pas être uniquement dictés par des considérations fiscales.