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"L'Afrique, paradis des stock-pickers"

"Dans ma carrière, j’ai toujours cherché à sélectionner les actions adéquates. Aujourd’hui, l’Afrique est le paradis des stock-pickers. Les risques liés aux investissements dans la région sont largement surestimés." C’est l’opinion de Daniel Broby, Chief Investment Officer de Silk Investt.

(mon argent) - Au regard de la situation actuelle en Afrique du Nord, le discours de ce Britannique de 46 ans peut laisser perplexe. Mais Daniel Broby de Silk Invest n’en démord pas. "C’est vrai: les risques individuels sont élevés dans cette région, mais pas plus qu’en Russie ou en Chine. Et il est possible de les diversifier en combinant plusieurs pays présentant un potentiel de croissance énorme. De plus, tout investissement en Afrique s’envisage forcément sur le long terme", répond le stratégiste en chef.

Daniel Broby n’est pas né de la dernière pluie. "Lorsque j’ai commencé ma carrière, en 1985, le Portugal figurait encore parmi les pays émergents", sourit-il quand on l’interroge sur son expérience. Au cours de ses 25 années de carrière, Broby a notamment occupé la fonction de Chief Investment Officer auprès de grands gestionnaires de fonds russes et danois. Il fut le premier à créer un fonds à effet de levier sur le sol danois et a écrit trois ouvrages consacrés à la gestion des fonds. Aujourd’hui, son cœur bat clairement pour les pays émergents. "Ce qui m’y attire, c’est le processus d’industrialisation qui accompagne leur expansion", explique Broby.

Pas étonnant, par conséquent, que notre homme ait participé à la naissance de Silk Invest en 2008. Cet opérateur de niche dans la ges-tion de patrimoine se concentre sur les "marchés frontières", comme l’Afrique et le Moyen-Orient. Silk Invest gère aujourd’hui quatre fonds disposant d’un passeport européen, dont African Lions. Aucun n’est aujourd’hui enregistré en Belgique, mais ce devrait être chose faite d’ici l’été, affirme Broby.

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En tant que gestionnaire de fonds, quel regard portez-vous sur les événements qui secouent actuellement l’Afrique du Nord?

"Ces événements sont normaux dans le cycle de convergence de cette région et sont positifs pour le long terme. La Tunisie a connu un bouleversement radical en quelques semaines, mais dispose aujourd’hui d’un gouvernement et est en train de se stabiliser. On peut comparer ce qui s’y est passé aux événements qui ont frappé la Thaïlande l’an dernier. Tout comme la Thaïlande, la Tunisie s’est rapidement reprise après une sévère raclée. L’Égypte est plus complexe, mais là aussi, la situation devrait se stabiliser rapidement. Et dans le pire des cas, il suffira de boucler un cycle, comme en Turquie. À l’époque où les coups d’État s’y succédaient, personne ne voulait investir en Turquie. Voyez où le pays en est aujourd’hui."

Ces troubles n’ont-ils aucun effet sur la croissance?

"À court terme, ils risquent évidemment de freiner l’économie. Nous devrions ainsi assister à une révision à la baisse des prévi-sions de bénéfices des entreprises. En Égypte, le secteur du tourisme pèse 11 milliards de dollars par an. Le manque à gagner pourrait se chiffrer à 1 milliard de dollars. Mais une sévère correction sur un marché déjà caractérisé par des valorisations réduites ne peut traîner en longueur. Tôt ou tard, les flux monétaires s’inverseront à nouveau et les actions nord-africaines retrouveront preneurs. En tout cas, nous disposons de liquidités à réinvestir."

Pourquoi les investisseurs doivent-ils prendre des actions africaines en portefeuille?

"Pour les investisseurs qui en comprennent les opportunités et les risques, l’Afrique est l’investissement idéal à long terme. Au contraire de l’Europe occidentale, les dettes y sont limitées. Les entreprises appliquent des modèles clairs, les opportunités sont nombreuses, l’environnement macroéconomique soutient les entreprises axées surtout sur les consommateurs. Equity Bank est un organisme kényan spécialisé dans les microcrédits. Il rémunère l’épargne et accorde des prêts. Les Kényans étant de plus en plus nombreux à voir leurs revenus s’accroître, la banque, en plein essor, s’accroît même à un rythme plus soutenu que l’économie."

Quels sont les éléments à prendre en compte lorsqu’on investit en Afrique?

"Les investisseurs doivent avoir conscience que les marchés y sont plus petits, moins liquides. Individuellement, il s’agit de placements risqués, raison pour laquelle il convient de diversifier. Il est en outre important d’être sur place. Nous avons des bureaux au Kenya, au Maroc, en Égypte et en Afrique du Sud. Nos gestionnaires connaissent parfaitement les marchés et produits locaux."

Pourquoi l’Afrique est-elle préférable à l’Asie?

"La principale raison est qu’en Afrique, l’industrialisation ne fait que commencer. En Asie, le processus est en cours depuis 20 ans. Les perspectives de croissance y sont donc déjà intégrées dans les cours. La Bourse de Shanghai, par exemple, affiche une capitalisation boursière de quatre trillions de dollars. Un montant qui permettrait d’acheter quatre fois toutes les Bourses africaines et 100 fois la Bourse du Nigéria! De plus, les valorisations moyennes des actions africaines sont très inférieures à celles des actions chinoises, et leur rendement de dividende est quatre fois plus élevé."

Quel est votre pays préféré?

"Le Nigéria, sans aucun doute. Ce pays affiche une croissance de 7% par an. Son secteur bancaire est bien développé et il dispose de réserves pétrolières. Nous sommes également très optimistes à l’égard du Ghana, du Kenya et du Maroc. L’Afrique du Sud reste de loin le pays le plus important dans les indices, mais nous limitons sa pondération à 25% pour des raisons de diversification."

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Quels sont les secteurs qui remportent vos préférences?

"Je privilégie le secteur du ciment. Peu de gens savent que le ciment est un matériau qui se détériore rapidement lorsqu’il est stocké. Le ciment expédié de Chine a donc déjà perdu en qualité au moment où il est débarqué en Afrique. De plus, le transport du ciment est relativement coûteux. C’est pourquoi je crois énormément aux producteurs de ciments locaux."

Quelle est votre action favorite?

"C’est Fanmilk. Ce producteur de produits laitiers est basé au Ghana, pays qui a enregistré la deuxième plus forte croissance au monde en 2010. Il a réussi sa transition vers la démocratie et sa classe moyenne est en pleine expansion. Fanmilk dispose de motos spécialement conçues pour vendre des crèmes glacées dans les villes. L’entreprise est parfaitement positionnée pour profiter de l’essor de la classe moyenne."

Est-il difficile d’éviter les entreprises qui n’offrent pas toutes les garanties requises en matière de gouvernance?

"Pas autant que vous pourriez le penser. Il faut commencer par analyser la composition du conseil d’administration et du comité de direction. Une entreprise bien gérée, en Afrique ou ailleurs, applique les principes de bonne gouvernance à tous les maillons de la chaîne."

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