Le nouveau droit successoral a instauré l’usufruit continué. En vertu de celui-ci, le conjoint survivant récolte l’usufruit que s’est éventuellement réservé son époux prédécédé dans le cadre d’une donation d'avoirs financiers qu’il a consentie de son vivant à ses enfants ou toute autre personne, pendant la durée du mariage.
"L’usufruit continué est un usufruit légal. Pas un usufruit conventionnel. Le conjoint survivant ne bénéficiera donc pas de l’ensemble des modalités particulières de l'usufruit que le conjoint donateur avait organisées dans l'acte de donation."
Problème 1: l’usufruit continué est un usufruit légal
Avant la réforme, par le rapport en nature, le conjoint survivant bénéficiait de l’usufruit que le conjoint prédécédé s’était organisé, c’est-à-dire de l’usufruit et de l’ensemble des modalités y relatives.
La différence, c’est que l’usufruit continué est un usufruit légal. Pas un usufruit conventionnel. "Le conjoint survivant ne bénéficiera donc pas de l’ensemble des modalités particulières de l'usufruit que le conjoint donateur avait organisées dans l'acte de donation", pointe Grégory Homans, avocat associé au cabinet Dekeyser & Associés.
Un exemple? "Dans le cadre d'un portefeuille-titres, le donateur a pu notamment se réserver le droit de pouvoir vendre certains titres et de réinvestir le prix de vente dans d'autres, sans l'autorisation des enfants. Le conjoint survivant bénéficiant d'un usufruit continué ne pourra, a priori, pas bénéficier de cette faculté", ajoute-t-il.
→ La solution. Pour corriger cet écueil, l'époux donateur pourrait, dans un testament, structurer l'usufruit continué dont bénéficiera son conjoint survivant afin qu'il dispose des droits souhaités, conseille le spécialiste.
Problème 2: l’usufruit continué ne porte que sur le bien donné
La loi prévoit que l’usufruit continué porte uniquement sur le bien donné. Si le bien est vendu, et ce même avec l’accord de l’usufruitier, l’usufruit continué ne pourra pas s’appliquer sur le prix de vente ou sur le bien acquis avec le montant de la vente!
→ La solution. "Prévoir la faculté de subrogation dans le cadre d’un testament", indique Me Homans. La subrogation est un mécanisme par lequel un bien en remplace un autre. Sur le plan juridique, le bien subrogé doit être considéré comme le bien qu’il remplace.
Les Régions bruxelloise et wallonne considèrent que l’usufruit continué
porte sur un actif qui est sorti par donation du patrimoine du défunt.
L’usufruit qui nait dans le chef du conjoint survivant n’opère ainsi pas de
transfert successoral taxable.
En Région flamande, en revanche, l’usufruit continué est taxé. "Dans le cadre d’une planification patrimoniale, il peut ainsi être préférable d’exclure l’application de l’usufruit continué taxable et d’organiser d’une autre manière le transfert d’usufruit en faveur du conjoint survivant", suggère Grégory Homans, avocat associé au cabinet Dekeyser & Associés.
Problème 3: il est possible de priver son conjoint de l’usufruit continué par testament
Cela signifie que son conjoint pourrait même le faire à son insu!
→ La solution. Si le couple souhaite bétonner sa situation et pour autant que la situation le permette, Me Grégory Homans recommande de préférer un accroissement d'usufruit à un usufruit continué.
"Dans le cadre d’une donation d’avoirs financiers indivis, les époux peuvent se réserver un usufruit sur les avoirs donnés et prévoir une clause d’accroissement de cet usufruit au profit du conjoint survivant. Cela garantit à ce dernier de bénéficier, au décès de son époux, de l’intégralité de l’usufruit des avoirs donnés. En effet, aucun d’eux ne peut supprimer unilatéralement la clause d’accroissement (contrairement à l’usufruit continué)", explique Me Homans. Sur le plan fiscal, cette clause d’accroissement d’usufruit peut être exonérée d’impôt.
Pour en savoir plus sur l'impact de la réforme du droit successoral sur les donations d'avoirs financiers, lisez ceci.