Crédit temps ou congé thématique? Pour vous, c'est sans doute chou vert et vert chou. Tout ce que vous voulez, c'est prendre du temps pour vous, pour vous former, pour vous occuper de vos enfants ou encore pour vous occuper d'un membre de votre famille qui rencontre de gros problèmes de santé, peu importent les appellations administratives. Cependant, si vous pensez à "lever le pied", il va falloir se pencher sur le sujet, car ces congés se ressemblent mais ne concernent pas toujours les mêmes travailleurs et n'exigent pas toujours les mêmes conditions pour pouvoir être obtenus.
Notez qu'à partir du 1er juin 2019, les travailleurs pourront prendre un demi-jour de congé parental par semaine ou un jour complet toutes les deux semaines. L'arrêté d'exécution de cette mesure vient d'être publié au Moniteur. Certains congés thématiques deviendront également plus flexibles.
Commençons par démêler les appellations: le congé thématique s'adresse à tous les salariés (dans le secteur privé et dans le secteur public), le crédit temps est destiné aux salariés du secteur privé tandis que l'interruption de carrière est son "équivalent" pour le secteur public. Nous n'allons pas nous pencher sur cette dernière forme de congé dans cet article.
Concentrons-nous donc sur le congé thématique et le crédit temps pour les travailleurs du secteur privé. Quels sont leurs points communs?
- Ils donnent tous les deux droits à une allocation de l'Onem pour compenser (partiellement) la perte de revenus;
- Ils sont assimilés à des périodes de travail aux yeux de l'Office national des pensions (pour les crédits temps à partir de 2015, les périodes maximales prises en compte correspondent à la durée maximale du crédit temps, soit 51 mois ou 36 mois)
- Ils vous protègent contre le licenciement. Votre employeur ne peut pas rompre, de manière unilatérale, votre contrat de travail, sauf pour une faute grave ou un motif suffisant. Cette protection débute dès le jour où vous adressez votre demande écrite et s’achève trois mois après la fin de l’interruption. En cas de licenciement pendant la période de protection, l’employeur doit payer au travailleur une indemnité forfaitaire égale à 6 mois de salaire, en plus des indemnités normales. Notez à ce sujet que la personne concernée sera ensuite admise au chômage sur la base de la dernière rémunération qu’elle avait avant son crédit temps ou son congé thématique.
- Depuis 2017, leur autre point commun est que le salarié ne peut en faire la demande que s'il a une bonne raison de le faire: de fait, le crédit temps "sans motif" a été supprimé.
Pour le reste, les deux régimes sont différents sur plusieurs points.
Un employé qui gagne 3.700 euros brut et qui passe en 4/5 en congé parental ne perd, en net, qu’environ 10% de son salaire, grâce aux 117,34 euros mensuels versés par l’Onem. Ce montant atteint 750,33 euros pour une interruption complète et 345,85 euros pour un passage à mi-temps. Attention, pour les enfants nés avant le 8 mars 2012, l’intervention de l’Onem s’arrête après trois mois (temps plein), six mois (mi-temps) et quinze mois (4/5e).
1) Les thèmes (ou motifs)
Vous pouvez prendre un congé thématique dans trois circonstances :
- vous occuper de votre bébé (jusqu'à ses 12 ans!). C'est le "fameux" congé parental.
- vous occuper d'un membre de votre famille gravement malade
- pour assister une personne en soins palliatifs.
Vous pouvez prendre un crédit temps pour six motifs bien précis
- vous occuper de votre bébé (jusqu'à ses 8 ans!)
- vous occuper d'un membre de votre famille gravement malade
- assister une personne en soins palliatifs
- vous occuper de votre enfant handicapé (jusqu'à ses 21 ans)
- vous occuper de votre enfant mineur gravement malade
- suivre une formation reconnue
Ajoutons que la réduction de son temps de travail en attendant la pension est également possible via le crédit temps, sous conditions et seulement à mi-temps ou à 4/5. C'est le crédit temps de fin de carrière. Lire aussi Voici ce que prévoit l'accord interprofessionnel pour les prépensions et le crédit temps.
2) La durée
De manière générale, la grande différence entre les deux régimes réside dans le nombre de fois que vous pouvez "faire appel" au congé, en gardant en tête que les périodes prises dans le cadre d'un régime ne sont jamais déduites de ce que vous pouvez prendre dans l'autre régime. C'est pour cela que vous pouvez par exemple commencer par prendre un congé parental pour vous occuper de votre bébé et enchaîner avec un crédit temps, sans que la durée de ce dernier ne soit amputée par les mois que vous avez pris en congé parental...
En vous connectant sur le site break@work, vous pouvez directement savoir combien de mois il vous reste à prendre dans le cadre du crédit temps ou d'un congé thématique. Vous pouvez vous identifier facilement via itsme ou un lecteur de cartes.
Revenons à la possibilité de cumuler/ou pas, les périodes de congé dans chacun des régimes.
Ainsi, vous avez droit à un nombre de mois maximum dans le cadre du crédit temps avec motif, une fois dans votre vie. Si vous avez épuisé votre crédit (de temps) en vous occupant de votre enfant de moins de huit ans, alors vous ne pourrez plus le prendre pour suivre une formation quelques années plus tard. Par contre, vous pouvez par exemple prendre 10 mois pour vous occuper de votre premier enfant, six mois pour suivre une formation, ce qui vous laissera encore du crédit pour solliciter à nouveau un crédit temps dans quelques années pour vous occuper du petit dernier. Vous avez droit à un crédit maximal de 51 mois dans votre vie pour les motifs de soins, et de 36 mois pour les autres. Ces durées sont les mêmes, quel que soit le type de congé que vous prenez : 1/5, mi-temps ou temps plein.
A l'inverse, les congés thématiques sont "cumulables". De fait, vous avez le droit de prendre autant de congés parentaux que vous avez d'enfants, pour autant qu'ils aient moins de 12 ans au moment de la demande (21 ans s'ils souffrent d'un handicap). Si les circonstances l'imposent, vous pouvez également vous occuper à de plusieurs membres de votre famille gravement malade. Et vous pouvez recourir aux trois formes de congé thématique autant de fois que nécessaire. Ici, les durées maximales varient en fonction du type de congé que vous prenez. Par exemple, pour le congé parental :
- Congé parental complet
Il peut être obtenu pendant une période de quatre mois maximum. Ces quatre mois peuvent être fractionnés par périodes de un mois ou un multiple.
A partir du 1er juin, ce congé pourra être scindé en semaines, moyennant l'accord de l'employeur.
- Congé parental à mi-temps
Le congé parental à mi-temps peut être obtenu pendant une période de huit mois maximum. Ces huit mois peuvent être fractionnés par périodes de deux mois ou un multiple.
A partir du 1er juin, ce congé pourra être scidné en mois, moyennant l'accord de l'employeur.
- Congé parental d'1/5
Le congé parental d' 1/5 temps peut être obtenu pendant une période de vingt mois maximum. Ces vingt mois peuvent être fractionnés par périodes de cinq mois ou un multiple.
- Congé parental d'1/10
A partir du 1er juin 2019, les travailleurs pourront prendre un demi-jour de congé parental par semaine ou un jour complet toutes les deux semaines. Ce congé peut être obtenu pour une période de 40 mois, fractionnée en périodes de dix mois.
A partir du 1er juin, le congé pour assistance médicale à temps plein sera désormais posible à raison d'une semaine, de deux semaines ou de trois semaines, moyennant l'accord de l'employeur.
3) Les conditions d'ancienneté
Pour demander un congé thématique, il n'y a pas de conditions d'ancienneté à remplir dans l'entreprise, sauf pour un congé parental (minimum 12 mois d'occupation). Pour demander un crédit temps, vous devez être employé depuis au moins deux ans par votre entreprise, sauf si la demande vient juste après un congé parental épuisé.
4) Les possibilités de refus
L'employeur ne peut pas refuser un congé thématique. Il peut seulement le reporter (six mois en congé parental, 7 jours en assistance médicale). Il ne peut pas reporter un congé pour soins palliatifs.
Si votre société emploie plus de dix personnes, le crédit temps est également un droit. Si pas, elle peut vous le refuser. En outre, il peut être prévu par convention collective de travail sectorielle ou propre à votre entreprise que certaines catégories de personnes sont exclues du crédit temps, par exemple le management.
Par ailleurs, lorsqu'il y plus de 10 travailleurs dans l'entreprise, le droit aux différents types de crédit-temps est limité à un quota d'absences simultanées (5 % du nombre total de travailleurs occupés dans l'entreprise ou le service). Vous devrez donc sans doute attendre qu'une "place" se libère pour obtenir votre crédit temps. L'employeur distribue les places disponibles en respectant un ordre de priorité. Les employés qui sollicitent un crédit temps pour s'occuper d'un enfant handicapé de moins de 21 ans, pour assister une personne en soins palliatifs ou pour s'occuper d'un membre de la famille gravement malade - et qui ont épuisé les congés thématiques prévus dans ces circonstances - sont prioritaires.
